Le harcèlement moral se définit comme des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Cette définition légale ne fait toutefois aucune référence à la durée des agissements.

La Cour de cassation, dans sa décision du 26 mai 2010 , a posé clairement pour principe que les faits constitutifs de harcèlement moral peuvent se dérouler sur une brève période. Elle a en effet estimé que l'article L. 1152-1 du code du travail ne reposant sur aucune condition de durée, la cour d'appel, en se fondant sur la brièveté des actes, a ajouté au texte une condition qu'il ne prévoit pas.

Et, de ce fait, la haute juridiction a reconnu le harcèlement moral attesté par les documents médicaux démontrant l'altération de l'état de santé du salarié. En l'espèce, le salarié estimait avoir été victime de harcèlement moral de la part de son employeur. Le salarié, à la suite d'un congé maladie, avait repris son travail le 11 septembre 2006. Il invoquait, au soutien de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, sa rétrogradation dès le 6 novembre 2006 à des fonctions subalternes à celles qu'il occupait avant son congé maladie, ainsi que des menaces et des propos dégradants au cours de la seconde semaine suivant la reprise du travail, notamment lors d'un entretien. La cour d'appel, estimant que ces faits s'étaient déroulés durant une très brève période, avait écarté la qualification de harcèlement moral, compte tenu des arrêts maladie postérieurs à la reprise du travail. Le salarié avait en effet été à nouveau en arrêt maladie du 22 septembre au 22 octobre 2006 pour traumatisme psychologique.

Cette argumentation est donc rejetée par la Cour de cassation puisque « les faits constitutifs de harcèlement moral peuvent se dérouler sur une brève période ».

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à Dijon (21)

Spécialiste en droit du travail

11 Bd voltaire - 21000 Dijon

03.80.48.65.00

jpschmitt@audard-schmitt.com

Soc. 26 mai 2010 n° 08-43152

POUR ALLER PLUS LOIN

L'accumulation de notes internes, d'échanges de courriers entre le médecin traitant et le médecin du travail constitue autant de preuves que la relation de travail se poursuit dans des conditions dégradées, impropres au maintien de l'équilibre psychologique de celui qui la subissait. Par exemple, il est possible de démontrer le caractère injustifié ou discriminatoire d'une « mise au placard » ou d'une absence totale de travail en y faisant référence dans un courrier courtois mais circonstancié.

De même, lorsque des manoeuvres sont entreprises pour pousser un salarié à la faute, par exemple en le surchargeant de travail, il peut être opportun de cesser la communication orale pour préférer l'envoi de notes écrites (dont une copie est à conserver).

Cette façon de procéder permet de démontrer que l'on a :

- attiré l'attention du harceleur sur l'importance du travail à effectuer dans un délai impossible à tenir;

- demandé quelles étaient les tâches à accomplir en priorité;

- averti des conséquences préjudiciables (pour l'entreprise et pour soi) des agissements du harceleur.

Il est aussi important de communiquer sur le lieu de travail mais aussi à l'extérieur, auprès de sa famille, de son médecin traitant comme du médecin du travail.