Mon blog a déjà commenté ce sujet (http://avocats.fr/space/jpschmitt/content/paiement-du-temps-d-habillage--_BF5FE417-F72D-3C34-ABE0-3EEBCD9C5E5E), mais un arrêt récent rendu par la cour de cassation me donne l'occasion d'y revenir.

Dans cette affaire qui a conduit au prononcé de l'arrêt du 17 février 2010, un employeur avait été condamné pour ne pas avoir accordé de contreparties à ses salariés en compensation du temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage de leur tenue de service obligatoire. À tort, selon la Cour de cassation, qui rappelle et précise les règles encadrant cette question.

Généralement, ces temps d'habillage et de déshabillage ne sont pas assimilés à des périodes de travail effectif, sauf disposition conventionnelle plus favorable. Mais ils doivent donner lieu à des contreparties (financières ou sous forme de repos) lorsque deux conditions cumulatives sont réunies :

- le port de la tenue de service est obligatoire (loi, convention ou accords collectifs, contrat de travail ou règlement intérieur) (c. trav. art. L. 3121-3) ;

- l'habillage et le déshabillage dans l'entreprise ou sur le lieu de travail sont également imposés (cass. soc. 26 mars 2008, n° 05-41476, BC V n° 73 ; cass. soc. 28 octobre 2009, n° 08-41953 FSPB).

Dans cette affaire, si la première condition était remplie, la seconde faisait défaut.

La Cour de cassation a balayé l'interprétation des juges d'appel qui avaient considéré que l'obligation de s'habiller et de se déshabiller dans l'entreprise pouvait être déduite par un « faisceau d'indices » résultant des éléments du dossier, savoir :

- la volonté de préserver la tenue de travail ;

- la pratique habituelle des autres salariés d'enlever la tenue de service sur le lieu de travail ;

- la liberté individuelle de circuler anonymement lors des trajets pour se rendre à leur poste, sans que le public ne puisse reconnaître leur appartenance individuelle (insigne et logo de l'entreprise figurant sur l'uniforme).

Ces arguments sont inopérants pour la Cour de cassation qui juge que les salariés demeuraient libres de choisir de revêtir et d'ôter leur tenue, ou non, sur le lieu de travail.

Aussi, conformément à sa jurisprudence récente, la haute juridiction considère que l'obligation d'effectuer les opérations d'habillage et de déshabillage sur le lieu de travail doit être expresse (via accord collectif, contrat de travail, règlement intérieur, décision unilatérale de l'employeur, etc.) pour que l'employeur soit contraint au versement de contreparties.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

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Cass. soc. 17 février 2010, n° 08-44343 D