Selon l'article L1332-4 du Code du travail, « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance (...) ». La prescription est donc de deux mois, pas un jour de plus. Et l'employeur qui se risque à licencier pour une faute commise il y a plus de deux mois au moment où il engage la procédure devra impérativement prouver qu'il n'a pas eu connaissance immédiatement des faits, ce qui peut être le cas d'un vol découvert ultérieurement.

Mais, le délai de deux mois ne court pas nécessairement à date fixe. Ou plutôt, ce délai est prorogé en cas de poursuite du comportement fautif du salarié. En effet, dans un tel cas, la poursuite de la faute par le salarié permet à l'employeur d'engager une procédure disciplinaire à son encontre dans le délai de deux mois courant à compter du dernier jour où la faute a été commise, ou du jour où il a été informé de la persistance de ces faits.

Dans cette affaire qui a donné lieu à l'arrêt du 17 décembre 2008, un employeur avait découvert en octobre l'usage abusif à des fins personnelles du téléphone portable professionnel mis à la disposition d'un salarié. Or, cet usage abusif s'était poursuivi jusqu'au mois de décembre, ce dont l'employeur n'a pu avoir connaissance au plus tôt qu'en janvier suivant. Ce qui en résulte en droit ; en cas d'agissements fautifs répétés sur plusieurs mois, le délai de prescription ne court qu'à compter du jour où l'employeur a eu connaissance des derniers faits en date. Ainsi, le délai de prescription concernant l'usage abusif du téléphone portable professionnel mis à la disposition du salarié ne court pas dès la découverte du montant de la facture d'octobre mais à la connaissance en janvier suivant de la facture de décembre. Dans un tel cas, le délai de deux mois est préservé.

Mais attention tout de même à ne pas laisser perdurer la poursuite de ces faits fautifs car même si le délai de prescription est préservé, c'est la qualification de la faute grave qui peut ne plus être admise. En effet, la faute grave est définie comme celle qui rend impossible la pousuite du contrat de travail. Citons à cet égard l'arrêt du 12 juin 2008 concernant deux salariés qui avaient refusé de porter leurs équipements individuels de protection. Leur employeur les avait alors convoqués à un entretien préalable un peu moins de deux mois après la date des premiers faits constatés. Alors que la procédure avait bien été engagée dans le délai de prescription de deux mois, les juges ont refusé de valider les licenciements prononcés pour faute grave en raison de la mise en œuvre tardive de la procédure de licenciement. Ainsi, l'employeur qui n'engage pas la procédure de licenciement pour faute grave dans un délai restreint, après avoir eu connaissance des faits fautifs reprochés à un salarié, ne peut se prévaloir de la faute grave d'un salarié.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

03.80.48.65.00

Cass. soc. 17 décembre 2008, n° 07-44450

Cass. soc. 12 juin 2008, nos 07-42358 et 07-42359 FD