Plusieurs décisions de la Cour de Cassation peuvent être utilisées lorsqu'un adversaire conteste l'opposabilité d'une expertise à laquelle il n'a pas participé.
Trois décisions seront ici reprises dans leur attendu de principe, lequel rappelle que le fait de le soumettre à la discussion des parties écarte toute référence à son inopposabilité.
Analysons tout d'abord l'arrêt rendu le 23 mars 2005 par la troisième chambre civile de la Cour de Cassation.
Le cas d'espèce :
Les époux X... avait produit le rapport de leur propre expert M. Z..., pour voir ordonner le bornage selon le tracé figurant sur ce rapport. Les époux Y... avaient fait valoir que l'avis de M. Z... ne revêtait pas un caractère contradictoire et ne pouvait leur être opposé, préférant le tracé figurant sur le rapport d'expertise judiciaire.
La cour d'appel de Lyon a fait droit à l'argumentaire des époux Y en retenant l'absence de caractère contradictoire dudit rapport critiqué.
La cour de Cassation casse cet arrêt au motif qu'alors qu'elle avait relevé que le rapport produit par les époux X... avait été régulièrement communiqué, elle n'a pas tiré toutes les conséquences légales de ses constatations sur le caractère contradictoire du rapport.
Dans un arrêt rendu le 28 juin 2006, la deuxième chambre civile de la cour de cassation confirme cette jurisprudence.
Le cas d'espèce :
Le Tribunal d'Instance d'Aix-en-Provence avait condamné M. X..., artisan serrurier, à verser certaines sommes à M. Y... en raison de malfaçons ayant affecté la pose d'une serrure.
M. X... s'est alors pourvu en cassation reprochant jugement de l'avoir condamné alors que le rapport d'expertise établi non contradictoirement ne pouvait être retenu par le juge.
La Cour de Cassation rejette le pourvoi en retenant et rappelant que si Monsieur X ne s'était pas rendu aux opérations d'expertise amiable, il avait produit une lettre émanant d'un tiers infirmant en partie le rapport litigieux alors soumis à la libre discussion des parties, et qu'ainsi le principe du contradictoire avait été respecté.
Enfin dans une décision en date du 14 septembre 2006, la cour confirme sa position.
Le cas d'espèce :
La société STS Côte d'Azur (la société), ayant réalisé les travaux d'étanchéité d'une piscine, avait assigné Monsieur X... en paiement du solde de sa facture.
Monsieur X fut condamné à payer la société.
Pour le condamner, le jugement avait retenu que si celui-ci faisait état de malfaçons et versait à l'appui de ses dires une expertise, l'absence de convocation de la société aux opérations, rendait le rapport non contradictoire et non opposable à la société, qu'il convenait alors de l'écarter des débats.
La Cour de Cassation casse ce jugement en retenant que si le juge ne peut se déterminer au seul vu d'une expertise établie non contradictoirement, il ne peut refuser d'examiner une pièce, dont la communication régulière et la discussion contradictoire n'étaient pas contestées.
Ainsi, quand bien même une pièce versée par la partie adverse, à savoir un rapport d'expertise, n'a pas été établie contradictoirement, le fait de la communiquer au cours d'une audience permet alors d'en discuter les termes, ce qui respecte le principe du contradictoire, et autorise le juge à en tenir compte dans sa décision, sans que l'inopposabilité et l'absence de caractère contradictoire puissent être invoqués.
Cour de Cassation des :
- 23 mars 2005 n°04-11455,
- 28 juin 2006 n°05-17759,
- 14 septembre 2006 n°05-14333.
La suite et les précisions de la Chambre mixte de la Cour de Cassation du 28 septembre 2012 sont ici.
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