L'avocat en droit de la santé est amené à répondre à différentes questions de la famille d'un enfant né après un manque d'oxygène conduisant à une encéphalopathie anoxo-ischémique et ultérieurement une infirmité motrice cérébrale ( paralysie cérébrale ). Cette encéphalopathie est aujourd'hui traitée par hypothermie contrôlée ( cryothérapie ) laquelle baisse la température du nouveau-né de manière modérée afin de protéger le cerveau.

Ceci dit, une question critique de la famille d'un enfant atteint de handicap concerne l'opportunité d'engager une action en justice.

Pour répondre à cette question, l'avocat spécialiste doit, dans un premier temps, déterminer si une faute ( comme une négligence, une imprudence ou plus généralement tout manquement aux données acquises de la science médicale ) a été commise. Dans un second temps, il faudra déterminer si cette faute est en lien de causalité avec l'infirmité motrice d'origine cérébrale donc la paralysie cérébrale.

Sur la faute, il faudra dire à la famille si les intervenants ( la sage-femme, le gynécologue-obstétricien, l'anesthésiste-réanimateur et le pédiatre ) ont respecté la bonne pratique clinique définie par les sociétés savantes telles que le collège national des gynécologues-obstétriciens français. En effet, la réponse à cette question permet à la famille de la victime de connaître les chances de succès d'une action en justice.

Les pièges sont nombreux tant sur le plan de l'interprétation du rythme cardiaque fœtal que celui des anomalies de la progression du travail comme des dystocies.

Nous avons déjà évoqué pour l'avocat et la victime la question de l'interprétation du rythme cardiaque fœtal à https://dimitriphilopoulos.com/avocat-droit-de-la-sante/avocats-droit-de-la-sante-rythme-cardiaque-foetal.php

Cet article concerne une autre question à savoir celle de la particularité de l'orientation de la présentation du bébé à naître lorsque sa tête est en variété postérieure.

I. L'accouchement en variété postérieure

L'avocat en droit de la santé doit examiner avec soin le partogramme ( diagramme d'accouchement ) pour dire à la famille si la sage-femme ou le gynécologue-obstétricien ont réagi de manière appropriée ( aux yeux des experts judiciaires et de la jurisprudence des cours et tribunaux ) à toute anomalie de la progression du travail.

Dans le sujet qui nous préoccupe, la variété postérieure n'est pas, proprement dite, une dystocie qui entraîne une difficulté ou une impossibilité d’accoucher par voie basse. 

Cependant c'est une malprésentation de la tête fœtale qui pourra avoir des conséquences défavorables voire dramatiques sur le travail et l'accouchement par exemple au moment de l'engagement : or, si la tête du bébé s'engage à travers l'aire supérieure du bassin de la maman, le pronostic d'un accouchement par les voies naturelles est favorable.

Le plus souvent, la tête du bébé s'engage avec la partie arrière de sa tête ( appelée l'occiput ) en position antérieure autrement dit le dos du fœtus est vers les côtés gauche ou droit du ventre de la mère.

Cette position antérieure de l'occiput est critique car elle favorise la bonne flexion et ainsi la diminution du diamètre critique de la tête du bébé qui, en raison de la forme particulière de l'aire supérieure du bassin due à la colonne vertébrale, doit s'engager dans l'un de ses diamètres obliques.

Concrètement, lors de l'engagement en oblique de la tête en variété antérieure, le front rentre en contact d'abord avec la partie postéro-latérale du bassin de la maman avant que l'occiput ne touche sa partie antéro-latérale.

Dans ce cas, le diamètre de la tête fœtale qui se présente pour s'engager dans le bassin de la mère présente sa dimension critique la plus petite, en moyenne 9,5 centimètres, permettant l'engagement dans l'un des diamètres obliques de l'aire supérieure du bassin de la maman.

Malheureusement, l'engagement de la variété postérieure ne se passe pas de la même manière.

Il en est ainsi car lorsque la tête du bébé à naître tente de s'engager avec l'occiput en arrière, ce dernier rentre d'abord en contact avec la partie postéro-latérale du rebord à l'entrée du bassin avant que le front ne se touche sa partie antéro-latérale.

Aussi la flexion se trouve-t-elle limitée avec pour conséquence néfaste une dimension critique en moyenne de 10,5 centimètres soit une augmentation d'un centimètre par rapport à la présentation antérieure.

Le diagnostic de la variété postérieure se fait par le toucher clinique permettant de repérer les fontanelles de la tête fœtale mais l'échographie est d'une aide précieuse car elle permet de visualiser les globes oculaires du fœtus signant la variété postérieure.

Fort heureusement, après l'engagement dans le bassin, mais le plus souvent la tête du bébé tourne spontanément en position antérieure pendant sa rotation habituelle dans la partie moyenne du bassin ( devenue nécessaire car l'aire du bassin moyen n'est plus empiétée par la colonne vertébrale de la maman ) pour arriver en position antérieure normale permettant un dégagement habituel en occipito-pubien.

Néanmoins, dans une minorité des cas, il y a une variété postérieure persistante de la tête d'où un dégagement en occipito-sacré.

Bien qu'une variété antérieure puisse tourner en arrière pendant la rotation habituelle de la descente dans le bassin, les études échographiques pendant le travail ont montré que, le plus souvent, la variété postérieure persistante résulte de l'engagement oblique en variété postérieure suivi d'une petite rotation en arrière d'un huitième de tour pendant ladite descente.

Plus la tête fœtale descend, moins il y a de chances de corriger spontanément une variété postérieure qui devient persistante.

En tout état de cause la variété postérieure persistante peut avoir une incidence néfaste sur la santé de la mère et de l'enfant.

Par exemple, la variété postérieure peut être à l'origine d'un travail plus long et difficile avec plus de césariennes et d'extractions par forceps et ventouse outre les déchirures graves du périnée.

Concernant le traitement, des postures maternelles et des rotations instrumentales ont rencontré différents taux de succès selon les études. Les rotations manuelles ont bénéficié d'un intérêt certain car un essai clinique randomisé a montré que celles-ci sont associées à une diminution du taux d'extractions instrumentales. Cependant un autre essai n'a pas trouvé ce résultat. 

II. L'incidence médico-légale de la variété postérieure

La famille de la victime d'une infirmité motrice cérébrale et l'avocat en droit de la santé devraient noter que l'étude en population de référence de Badawi et collègues ( BMJ 1998;317:1554-8 ) a trouvé qu'en présence d'une variété postérieure persistante le risque d'encéphalopathie néonatale a augmenté de 4 fois donc une augmentation de 300 % !

Sans surprise, les variétés postérieures persistantes se retrouvent dans des procédures judiciaires relatives à la responsabilité du gynécologue-obstétricien ou de la sage-femme lorsque l'enfant est né avec une encéphalopathie anoxo-ischémique conduisant à une paralysie cérébrale.

Il en est ainsi en raison des difficultés d'engagement, des erreurs de diagnostic de l'engagement en présence d'une bosse sérosanguine importante, des attentes prolongées pour l'accouchement par voie basse devant des anomalies du rythme cardiaque fœtal ou des échecs de forceps conduisant à des césariennes d'extrême urgence.  

Ces événements expliquent pour partie l'augmentation majeure du risque d'encéphalopathie retrouvée dans l'étude précitée.

C'est pourquoi l'avocat spécialiste de la famille d'un enfant atteint de paralysie cérébrale doit analyser attentivement l'incidence d'une éventuelle présentation occipito-postérieure persistante. 

III. Rôle de l'avocat de la famille de la victime d'une infirmité motrice cérébrale

L'avocat en droit de la santé doit rester vigilent en présence d'une variété postérieure persistante car les erreurs médicales y sont fréquentes et peuvent engager la responsabilité de la sage-femme et/ou du gynécologue-obstétricien de la maternité.

Ainsi devant la persistance de la position postérieure de l'occiput l'avocat doit analyser toute anomalie de la dilatation, l'engagement et la descente, l'activité utérine, le rythme cardiaque fœtal, le liquide amniotique et l'expulsion afin de se prononcer sur l'opportunité d'engager une action en justice. 

Or, pour que l'avocat puisse effectuer cette analyse, la famille de la jeune victime d'un handicap subi pendant la naissance doit demander une copie du dossier d'accouchement ainsi que ceux du service de réanimation néonatale et du service de néonatologie. 

La famille de la victime peut trouver une lettre type de demande du dossier d'accouchement à cette page du site internet de notre cabinet d'avocat : 

https://dimitriphilopoulos.com/erreur-grossesse-accouchement-naissance/avocat-erreur-medicale-accouchement.php

Il ne faut pas oublier de demander également le compte rendu du service de réanimation néonatale et celui du service de néonatalogie.

Dimitri PHILOPOULOS

Avocat à la Cour de Paris et Docteur en Médecine

22 avenue de l'Observatoire - 75014 PARIS

Site internet du cabinet : https://dimitriphilopoulos.com

Tél : 01.46.72.37.80