S'il ne souhaite ni démissionner, ni prendre acte de la rupture de son contrat, le salarié peut demander au juge qu'il prononce la rupture du contrat de travail en apportant la preuve des manquements de l'employeur. Cette demande de résiliation judiciaire oblige toutefois le salarié à continuer à exécuter son contrat qui n'est pas suspendu du seul fait de l'action prud'homale engagée, sauf à bénéficier d'arrêts maladie prolongés jusqu'à l'issue du litige.

 

Dans son arrêt du 10 avril 2013, la Cour de cassation se prononce sur le cas d'une demande de résiliation judiciaire introduite avant la régularisation d'une rupture conventionnelle homologuée.

 

Dans cette affaire, le salarié avait d'abord saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire avant de signer quelques mois plus tard une rupture conventionnelle homologuée par l'autorité administrative. Ayant maintenu sa demande de résiliation judiciaire sans même solliciter l'annulation de la rupture conventionnelle, le salarié a été débouté de sa réclamation.

 

La Cour de cassation confirme l'analyse des 1ers juges. Elle considère en effet que l'argument du salarié - consistant à invoquer qu'il « ne peut renoncer pour l'avenir aux règles légales protectrices régissant la rupture du contrat de travail » - n'est pas fondé, au motif « qu'ayant constaté que l'annulation de la rupture conventionnelle n'avait pas été demandée dans le délai prévu par l'article L. 1237-14 du code du travail, la cour d'appel n'avait plus à statuer sur une demande, fût-elle antérieure à cette rupture, en résiliation judiciaire du contrat de travail devenue sans objet ».

 

La chronologie des faits est utile dans le règlement de ce type de litige. Elle permet ainsi au juge d'écarter la demande de résiliation judiciaire lorsque cette demande est intervenue postérieurement à la rupture du contrat de travail. Toutefois, lorsque la résiliation judiciaire a été demandée antérieurement à la rupture du contrat, il faut s'interroger sur l'initiateur de la rupture.

 

En effet, si la demande antérieure de résiliation judiciaire prime toujours sur la rupture ultérieure prononcée par l'employeur (cas de la résiliation judiciaire suivie d'un licenciement), sauf le cas de la mise à la retraite du salarié par l'employeur qui a pour effet de rendre sans objet la demande de résiliation judiciaire, il n'en est pas de même lorsque la demande de résiliation judiciaire est antérieure à une rupture initiée par le salarié, comme par exemple la prise d'acte dont la requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou démission dépendra des preuves apportées par le salarié relativement aux manquements de l'employeur.

 

Mais la particularité de la rupture conventionnelle est qu'elle émane des deux parties.

 

Le salarié ayant en partie initié la rupture, la haute juridiction suit sa logique et considère donc que la résiliation judiciaire n'a plus d'objet puisqu'un accord de volonté est intervenu.

 

Seul bémol apportée par la Cour de cassation, le cas de la demande d'annulation de la rupture conventionnelle par le salarié dans les 12 mois. En effet, en retenant "qu'ayant constaté que l'annulation de la rupture conventionnelle n'avait pas été demandée dans le délai prévu par l'article L. 1237-14 du code du travail, la cour d'appel n'avait plus à statuer sur une demande, fût-elle antérieure à cette rupture, en résiliation judiciaire du contrat de travail devenue sans objet », la haute juridiction estime que la demande de résiliation judiciaire survivrait. Cette solution reste toutefois paradoxale car dans l'hypothèse où le juge décide d'annuler la rupture conventionnelle, la rupture sera considérée comme licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte qu'aucune suite n'aurait à être donnée à la résiliation judiciaire.

 

Jean-philippe SCHMITT
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Soc. 10 avril 2013 n° 11-15651