Le forfait-jours consiste à décompter le temps de travail en jours ou en demi-journées à l'année, et non plus en heures. Ces conventions séduisent de plus en plus d'entreprises car elles présentent l'avantage d'exonérer l'employeur de la plupart des dispositions relatives à la durée de travail et notamment celles qui concernent les heures supplémentaires.

 

Pour autant, la liberté n'est pas totale en la matière et des règles très précises ont été posées par la Cour de Cassation compte tenu de l'influence du droit européen.

 

Rappelons d'abord que le forfait-jours concerne les cadres dits autonomes, ainsi que les salariés cadre et non cadre dont la durée du temps de travail ne peut être pré déterminée et qui disposent d'une réelle autonomie. Cette notion d'autonomie est essentielle puisqu'il vient d'être jugé que lorsque l'emploi du temps du salarié est déterminé par son supérieur hiérarchique, lequel définit le planning de ses interventions auprès des clients, alors l'intéressé qui ne dispose d'aucune liberté dans l'organisation de son travail n'est pas susceptible de relever du régime du forfait en jours (Cour de cassation, Soc. 31 octobre 2012).

 

Pour être valable, la convention de forfait doit respecter plusieurs conditions. Tout d'abord, être autorisée par un accord collectif contenant des mesures de nature à assurer le respect des règles impératives relatives à la durée du travail, notamment les durées maximales de travail, les repos journaliers et hebdomadaires (11 heures par nuit et 35 heures par semaine). Ensuite, le salarié doit donner son accord écrit, et le seul renvoi général dans le contrat de travail (ou un avenant) à un accord collectif autorisant le recours au forfait-jours est insuffisant.

 

Par ailleurs, depuis la loi du 20 août 2008, doit être organisé, chaque année avec le salarié en forfait-jours, un entretien annuel portant sur la charge et l'organisation de son travail, l'articulation entre activité professionnelle et vie personnelle et familiale, ainsi que sur sa rémunération (article L.3121-46 du Code du Travail). Ces 4 sujets doivent être abordés durant l'entretien d'évaluation ou séparément, et un compte-rendu doit être établi.

 

Mais cela n'est pas tout puisque l'employeur doit en outre avoir mis en place des mesures garantissant que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du travail de l'intéressé (arrêt Cour de cassation, Soc. 26 septembre 2012). En pratique, il faut pouvoir justifier d'un formulaire auto déclaratif mensuel du salarié et dans lequel il recense ses journées ou demi-journées de congé (congés payés, RTT...).

 

Ces règles sont impératives car si l'employeur ne formalise pas correctement les entretiens annuels obligatoires ou ne s'assure pas de ce que le salarié bénéficie de ses repos journaliers et hebdomadaires, il prend le risque que la convention de forfait soit privée d'effet, cela même si l'accord collectif sur la réduction du temps de travail (de branche ou d'entreprise) et la convention de forfait signée avec le salarié sont conformes à la jurisprudence de la Cour de Cassation.

 

Bien sûr, c'est au salarié de produire tous éléments permettant de convaincre le Juge de l'existence des heures supplémentaires, mais la charge de la preuve est partagée et l'employeur doit être en mesure de démontrer le contraire. Néanmoins, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a récemment jugé que la charge de la preuve du respect des seuils et plafonds incombe au seul employeur, ce qui s'applique donc aux jours de repos (Soc. 17 octobre 2012 n° 10-17370).

 

Lorsque la convention de forfait est annulée, les conséquences financières peuvent être importantes puisque le salarié serait en droit de réclamer le paiement de l'intégralité de ses heures supplémentaires (sur la base de 35 heures ou de l'horaire collectif), sous réserve de la prescription qui est en l'état actuel du droit de 5 ans, ainsi que l'indemnisation pour perte des repos compensateurs afférents, ce qui aurait pour effet de modifier rétroactivement toutes les sommes assises sur le salaire de base versé durant la période (variable, bonus, primes...).

 

Jean-philippe SCHMITT
Avocat à DIJON (21)
Spécialiste en droit du travail
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