Au terme d'une jurisprudence constante, la seule différence de statut juridique ne permet pas de fonder une différence de rémunération entre des salariés qui effectuent un même travail ou un travail de valeur égale (lire ICI un commentaire précédent sur mon blog).

Dans l'affaire qui a conduit la Cour de cassation à rendre son arrêt du 16 février 2012, il s'agissait une chambre de commerce et d'industrie (CCI) qui employait des agents de droit public et des contractuels, recrutés en CDD, dont les conditions de rémunération étaient fixées par un « statut ». La CCI avait aussi recours à des intérimaires qui, en l'occurrence, ont obtenu la requalification de leur mission d'intérim en CDI.

Devenue l'employeur de ces intérimaires, la chambre de commerce refusait néanmoins de leur appliquer le statut de la CCI, réservé selon elle aux agents de droit public et aux contractuels. Cette interprétation avait notamment pour conséquence de priver les ex-intérimaires d'un 13ème mois.

La thèse de l'employeur pouvait être tenable puisque dans le cas particulier d'une entreprise qui emploie à la fois des fonctionnaires et des agents de droit privé, l'application des règles de droit public peut éventuellement justifier des différences de rémunération entre ces deux catégories de salariés. Mais dans de tels cas, le juge conserve la faculté d'apprécier la pertinence d'une telle justification (Ass. plén. 27 février 2009, n° 08-40059).

Toutefois, dans son arrêt du 16 février 2012, la Cour de cassation estime que le statut de la CCI devait s'appliquer aussi bien aux salariés en CDI qu'aux contractuels en CDD. Selon la haute juridiction, il n'y avait en effet aucune raison objective à la différence de traitement pratiquée par l'employeur.

Elle rappelle précisément que "au regard du principe d'égalité de traitement, la seule différence de statut juridique ne permet pas de fonder une différence de rémunération entre des salariés qui effectuent un même travail ou un travail de valeur égale, sauf s'il est démontré, par des justifications dont le juge contrôle la réalité et la pertinence, que la différence de rémunération résulte de l'application de règles de droit public ; en l'absence de toute justification des différences de traitement par l'employeur, qui se bornait à affirmer que les dispositions du statut de la chambre de commerce et d'industrie n'étaient pas applicables aux salariés, la cour d'appel a pu décider que les salariés sous contrat à durée indéterminée devaient bénéficier, comme les personnels contractuels qu'elle employait, de la rémunération résultant de ce statut".

Jean-philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

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Soc. 16 février 2012, n° 10-21864