Y a t-il vol et donc délit si un salarié photocopie des documents de l'entreprise qui l'emploie en vue de se défendre dans une instance prud'homale ?

Cette question a fait l'objet d'une jurisprudence abondante tant il est vrai que le fait de photocopier un document appartenant à autrui, sans son accord, constitue matériellement un vol.

Depuis plusieurs années, les chambres sociale et criminelle de la Cour de Cassation admettent toutefois de tels comportements mais y posent des conditions :

- le salarié doit avoir eu connaissance des documents litigieux à l'occasion de ses fonctions, et ce de manière régulière,

- ces documents doivent être indispensables ou strictement nécessaires à sa défense prud'homale.

Un arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 16 juin 2011 confirme cette jurisprudence.

Dans cette affaire, le salarié, informé que son employeur allait mettre fin à son contrat, s'était envoyé sur sa boite mail personnelle des documents de l'entreprise. Puis contestant le bien fondé de son licenciement, il a produit ces documents pour tenter d'établir l'absence de légitimité de la rupture de son contrat. En réplique, l'employeur a porté plainte pour vol et abus de confiance.

Aussi bien le juge d'instruction que la Cour d'appel puis la Cour de cassation ont jugé qu'il n'y avait pas vol ou abus de confiance du salarié. Les termes de la décision sont les suivants : "avisé du projet de son employeur de rompre son contrat de travail, le salarié a pu légitimement appréhender des documents dont il avait eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et dont la production était strictement nécessaire à l'exercice de sa défense dans la procédure prud'homale qu'il a engagée peu après ".

Ainsi dès lors que les documents de l'entreprise dont le salarié avait eu connaissance à l'occasion de ses fonctions et qu'il a appréhendés ou reproduits sans l'autorisation de son employeur sont strictement nécessaires à l'exercice des droits de sa défense dans le litige prud'homal l'opposant à son employeur, le salarié ne commet aucun délit.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à Dijon (21)

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Soc. 16 juin 2011