L'envoi d'un mail épuise t-il le pouvoir disciplinaire de l'employeur ? C'est à cette question qu'a répondu la Cour de cassation dans son arrêt du 26 mai 2010.

Dans cette affaire, une salariée avait reçu un courrier électronique de son employeur qui faisait état d'un certain nombre de critiques et l'invitait à un changement radical. Alors qu'il était annoncé à la salariée qu'un point serait fait dans le mois suivant, elle fut destinataire le lendemain d'une lettre valant convocation à entretien préalable. A l'issue, elle fut licenciée.

Contestant son licenciement, la salariée s'est adressée au Conseil des prud'hommes en avançant différents arguments, notamment que son employeur avait épuisé son droit disciplinaire par l'envoi du mail et qu'ainsi, licenciée pour les mêmes faits, le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

En réponse, l'employeur expliquait qu'il était libre de recadrer son salarié par mail à l'occasion de son pouvoir de direction, recadrage qui ne devait pas se confondre avec l'exercice de son pouvoir disciplinaire qui impliquait quant à lui la notification d'une sanction à part entière.

La haute juridiction a considéré que l'e-mail sanctionnait un comportement fautif et constituait un avertissement dont l'écrit papier n'était pas nécessaire, ce qui signifie que l'employeur, qui n'est pas en droit de sanctionner deux fois un même fait, ne pouvait licencier la salariée pour les mêmes faits.

La Cour de cassation retient donc que :

- le juge peut considéder que les faits reprochés sanctionnaient un comportement fautif et constituaient un avertissement, peu importe que le mot avertissement n'y figure pas,

- l'employeur peut valablement adresser un avertissement par « écrit électronique », sans qu'un « écrit papier » ne soit nécessaire.

Il s'agit donc d'une décision importante puisque de nombreux mails sont dorénavant échangés à l'occasion du travail, certains étant indiscutablement des mails de « recadrage » et pouvant donc s'analyser en une sanction insusceptible d'être sanctionnée ultérieurement sans l'apparition de nouveaux faits fautifs.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à Dijon (21)

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Cass. soc. 26 mai 2010, n° 08-42893 D