Une ordonnance d'un conseiller de la mise en état statuant sur une fin de non-recevoir est revêtue de l'autorité de la chose jugée et devient irrévocable en l'absence de déféré
3 octobre 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-20.787
Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA
Publié au Bulletin
ECLI:FR:CCASS:2024:C200867
Titres et sommaires
CHOSE JUGEE
Texte de la décision
Entête
CIV. 2
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 3 octobre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 867 F-B
Pourvoi n° Z 22-20.787
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 OCTOBRE 2024
1°/ M. [J] [H], domicilié [Adresse 1],
2°/ Mme [B] [M] épouse [H], domiciliée [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° Z 22-20.787 contre l'arrêt rendu le 30 juin 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 1 - section 1), dans le litige les opposant à M. [Z] [E], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [H] et Mme [M], épouse [H], de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [E], et après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Exposé du litige
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 juin 2022), par jugement du 30 juin 2020, un tribunal judiciaire a dit que M. [E] était tenu de la garantie des vices cachés et l'a condamné à payer diverses sommes à M. et Mme [H].
2. M. [E], qui n'a pas constitué avocat en première instance, a relevé appel de ce jugement puis saisi un conseiller de la mise en état de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de M. et Mme [H].
3. Par ordonnance du 20 avril 2021, qui n'a pas été déférée à la cour d'appel, un conseiller de la mise en état s'est déclaré compétent pour statuer sur la fin de non-recevoir et a dit que l'action des acquéreurs n'était pas prescrite.
Moyens
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. et Mme [H] font grief à l'arrêt de les déclarer prescrits en leur action en garantie des vices cachés, alors « que le moyen tiré de la chose jugée est d'ordre public quand, au cours de la même instance, il est statué sur les suites d'une précédente décision passée en force de chose jugée ; que par ordonnance du 20 avril 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel a jugé que l'action en garantie des vices cachés engagée par M. et Mme [H] à l'encontre de M. [E] n'était pas prescrite ; qu'en ne relevant pas d'office le moyen tiré de l'autorité de chose jugée attachée à cette décision et en jugeant au contraire que l'action en garantie des vices cachés intentée par M. et Mme [H] à l'encontre de M. [E] était irrecevable comme prescrite, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil. »
Motivation
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
5. M. [E] conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que le moyen est nouveau et contraire aux écritures de M. et Mme [H] devant la cour d'appel.
6. Cependant, le moyen invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation est recevable lorsqu'il est d'ordre public et qu'il résulte d'un fait dont la cour d'appel avait été mise à même d'avoir connaissance. Or, le moyen tiré de la violation de l'autorité de chose jugée est d'ordre public quand, au cours de la même instance, il est statué dans la suite d'une précédente décision. En outre, en application de l'article 727 du code de procédure civile, sont versées au dossier de la cour d'appel les copies des décisions auxquelles l'affaire donne lieu.
7. Par ailleurs, le fait que M. et Mme [H] aient contesté devant la cour d'appel la compétence du conseiller de la mise en état pour statuer sur la prescription de leur action, n'apparaît pas être contraire au moyen tiré de l'autorité de la chose jugée des décisions du conseiller de la mise en état.
8. Le moyen est, dès lors, recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 1355 du code civil :
9. Une ordonnance d'un conseiller de la mise en état statuant sur une fin de non-recevoir est revêtue de l'autorité de la chose jugée et devient irrévocable en l'absence de déféré. La cour d'appel saisie au fond ne peut, dès lors, statuer à nouveau sur cette fin de non-recevoir.
10. L'arrêt déclare irrecevable l'action en garantie des vices cachés intentée par M. et Mme [H] à l'encontre de M. [E], comme prescrite.
11. En statuant ainsi, alors que l'ordonnance du conseiller de la mise en état avait, dans son dispositif, déclaré l'action recevable comme non prescrite, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Dispositif
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne M. [E] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure, rejette la demande formée par M. [E] et le condamne à payer à M. et Mme [H] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille vingt-quatre, et signé par lui et Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile, et par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
Publié par ALBERT CASTON à 16:12
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Libellés : appel , chose jugée , conseiller de la mise en état , Procédure
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