Le droit de la famille est un contentieux particulier.

Il fait entrer l'avocat au coeur de la famille, lequel s'immisce bien involontairement, mais contraint par les éléments de faits qui lui sont rapportés, au plus profond du conflit, approchant ce qui fait mal, ce qui a déstabilisé l'un, ce qui l'a rendu vulnérable. Oreille attentive, il est également là pour faire le tri entre ce qui doit être dit ou non, entre ce qui est nécessaire et ce qui ne servira qu'à envenimer un conflit déjà trop existant.

S'il faut s'en tenir à l'aspect juridique des choses, un avocat n'en est pas pour autant un être humain. Il y a des situations où le désarroi d'un parent est poignant, où l'attitude adverse incompréhensible, notamment lorsque les enfants sont associés au conflit parental.

Ils le sont trop souvent. Cela peut résulter d'une attitude involontaire des parents qui se battent pour la garde, l'étendue d'un droit de visite, le montant d'une contribution. Mais cela peut également être fait sciemment avec une véritable intention de nuire par l'un des deux parents qui prend l'enfant en otage, en monnaie d'échange pour obtenir ce qu'il veut de l'autre, ou simplement pour être sûr qu'il aura vraiment mal.

Il est particulièrement choquant de lire dans un conflit parental qu'un jeune enfant guidé par la main d'un parent reproche à son père ou à sa mère, de ne pas avoir un vêtement approprié, d'être la risée de ses camarades par sa faute, qui consiste à verser une pension peu élevée...bref autant de reproches qu'un enfant ne peut prononcer si un adulte n'a pas fait œuvre de manipulation psychologique en amont.

Je n'oublierai jamais les mots de ce regretté magistrat de Grasse, regretté parce qu'il a quitté notre Tribunal de Grande Instance pour un autre Palais, qui coupait court à toute polémique en s'adressant tour à tour au père et à la mère, en leur disant, que s'ils ne s'entendaient plus, ils resteraient toujours le père et la mère d'un enfant, dont l'intérêt devait être privilégié. Ceci semblait parfois être une révélation pour certains, de la philosophie pour d'autres. Pourtant c'est la simple réalité.

Il était celui ou celle qui nous a été révélé(e) pour la conception d'un enfant, celui ou celle dont il était évident qu'il était fait pour nous, fait pour partager l'amour d'un enfant, sa construction...alors pourquoi ne pas prendre conscience que l'enfant otage conduit à détruire ce qui a été construit, à affaiblir la base que l'on a voulu si solide. L'enfant ne peut sortir indemne d'un tel conflit lorsqu'il est ouvertement vécu à travers lui par les parents, ou par un des deux qui s'en sert comme une arme.

En cela le droit de la famille est un contentieux particulier parce que tout dossier ne laisse pas indemne ceux qui le traitent.