OUI : le fonctionnaire faisant l'objet de poursuites disciplinaires ne peut être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire. Dans un arrêt en date du 02 avril 2024, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé que ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition.

Elles impliquent que le fonctionnaire faisant l'objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire.

Dès lors, le requérant  est fondé à soutenir que, du fait de la privation de cette garantie, la sanction disciplinaire litigieuse est intervenue au terme d'une procédure irrégulière et doit être annulée.


M. A..., aide médico-psychologique affecté à l'unité d'accueil spécialisé au sein du groupe public de santé de Perray-Vaucluse depuis 2010, devenu le groupe hospitalier universitaire Paris Psychiatrie et Neurosciences (GHU), a fait l'objet d'une décision de révocation pour motif disciplinaire le 20 juin 2016.

Cette décision ayant été annulée, pour erreur d'appréciation dans le choix de la sanction, par un jugement du tribunal administratif de Paris du 12 mars 2018 devenu définitif, l'administration a pris une nouvelle décision à l'encontre de M. A... le 27 mars 2018, prononçant la sanction d'exclusion temporaire des fonctions d'une durée de dix-huit mois dont six mois avec sursis, à compter du 16 avril 2018.

Par un jugement du 11 février 2020, confirmé en appel, le tribunal administratif de Paris a également annulé cette décision en retenant le même moyen.

Par une décision du 11 décembre 2020, le directeur du GHU lui a infligé la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire des fonctions d'une durée de dix mois, assortie d'un sursis de quatre mois.

M. A... a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision.

Par un jugement du 30 mai 2022, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Aux termes de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : «  Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».

Il en résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire.

Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition.

Elles impliquent que le fonctionnaire faisant l'objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire. En l'espèce, M. A... soutient sans être contredit par le groupe hospitalier universitaire Paris Psychiatrie et Neurosciences, lequel n'a d'ailleurs pas produit de mémoire en défense, qu'il n'a pas été informé du droit qu'il avait de se taire lors de la procédure disciplinaire.

Dès lors, M. A... est fondé à soutenir que, du fait de la privation de cette garantie, la sanction disciplinaire litigieuse est intervenue au terme d'une procédure irrégulière et doit être annulée. 4 Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

SOURCE : CAA de PARIS, 6ème chambre, 02/04/2024, 22PA03578, Inédit au recueil Lebon