SUSPENSION DES LOYERS COVID 19

(en l’état des textes en vigueur au 26 mars 2020)

Depuis le 14 mars 2020 à minuit et par plusieurs arrêtés (NOR : SSAZ2007749A, SSAS2007753A, SSAZ2007862A, SSAZ2007919A, SSAZ2008066A), l’Etat français a ordonné la fermeture de l’ensemble des commerces non essentiels à la vie de la Nation jusqu’au 15 avril 2020 afin de lutter contre la propagation du virus Covid-19, classé officiellement comme pandémie par l’OMS depuis le 11 mars dernier.

A ces premières mesures sont venues s’ajouter des restrictions sur les déplacements, adoptées par décret du 16 mars 2020 et en vigueur depuis le 17 mars à 12h00 (NOR : PRMX2007858D, PRMX2007932D).

Suite à la promulgation de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 (NOR: PRMX2007883L), le gouvernement a abrogé l’ensemble des prescriptions précédentes par un arrêté du 23 mars (NOR: SSAX2007864A) et les a réinstaurées dans le cadre du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire (NOR: SSAZ2008253D). Ce décret n’a pas modifié les échéances précédemment fixées :

  • Jusqu’au 15 avril pour la fermeture des commerces,
  • Jusqu’au 31 mars pour les restrictions portant sur les déplacements.

En l’état des textes en vigueur, Etablissement Recevant du Public (ERP) de type W (Administrations, banques, bureaux), ne sont, à priori, pas visées par les mesures de fermetures.

La combinaison des dispositions interdisant l’ouverture de la plupart des commerces et de celles restreignant fortement les déplacements produit cependant un effet « cocktail » qui affecte l’ensemble des commerces.

Afin de tirer les conséquences de cette situation, le Président de la République a annoncé dès le 16 mars 2020 que des mesures seraient adoptées afin d’assurer la « suspension des factures d'eau, de gaz ou d'électricité ainsi que des loyers. » pour les petites entreprises.

Une ordonnance n° 2020-316 relative au paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie de covid-19 a été rendue le 25 mars 2020 (NOR: ECOI2008040R).

Le gouvernement a prévu qu’à compter du 12 mars 2020 et jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cession de l’état d’urgence sanitaire, « Les personnes mentionnées à l'article 1er [les personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique qui sont susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité mentionné à l'article 1er de l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020] ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d'astreinte, d'exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d'activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce. ».

Les conditions pour bénéficier de ces dispositions devront être déterminées dans le cadre d’un décret à venir.

En l’absence de toute disposition quant au devenir des loyers dont il est seulement prévu que le non-paiement ne pourra donner lieu à des pénalités, il est nécessaire de s’en référer aux mécanismes prévus par le droit commun. Il s’agit notamment de la force majeure (article 1218 du Code civil), de l’exception d’inexécution (article 1220 du Code civil) et de l’imprévision (article 1195 du Code civil).

Face à une situation qui revêt les caractéristiques de la force majeure et sur le fondement de l’exception d’inexécution, les commerces dont l’activité, attachée aux locaux exploités, est directement visée par les mesures de fermetures peuvent notifier à leurs bailleurs la suspension des loyers jusqu’à la fin des mesures de fermeture.

Pour les autres commerces, il est nécessaire d’apprécier la situation, cas par cas, au regard des clauses et conditions du contrat de bail ainsi que de l’impact de la situation sanitaire sur leur activité.

Dans l’attente de la publication des décrets prévus par les textes, il est important pour les locataires professionnels et commerciaux ne pouvant faire face aux prochaines échéances de loyers, s’ils ne disposent pas de la trésorerie nécessaire, de notifier à leur bailleur qu’ils sont contraints de suspendre le règlement de leurs loyers compte tenu de la situation de crise.

Cette notification doit intervenir dans les meilleurs délais afin, dans un souci de bonne foi contractuelle, de permettre aux bailleurs de prendre leurs dispositions pour faire face à leurs propres échéances et engagements.

Peu important les textes à intervenir, il est important de ne pas hésiter à demander à son bailleur un échelonnement amiable des échéances suspendues voir même des franchises exceptionnelles de loyers (gratuité des loyers).

L’intérêt du bailleur est de conserver un locataire solvable.