VEFA : l'action en garantie doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices et défauts de conformité apparents
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 21-10.022
- ECLI:FR:CCASS:2022:C300052
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 19 janvier 2022
Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, du 08 juin 2020
Président
Mme Teiller (président)
Avocat(s)
SCP Boulloche, SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 19 janvier 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 52 F-D
Pourvoi n° C 21-10.022
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 JANVIER 2022
La société Lila Blue, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-10.022 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Marignan résidences, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 5],
2°/ à la société MAAF, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6],
3°/ à la société Mutuelle des architectes français, dont le siège est [Adresse 3],
4°/ à la société Sarim, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
5°/ à la société TAE, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Greff-Bohnert, conseiller, les observations de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de la société Lila Blue, de la SCP Boulloche, avocat de la société Mutuelle des architectes français, de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Marignan résidences, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Greff-Bohnert, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 8 juin 2020), par acte du 21 décembre 2009, la société Marignan résidences (la société Marignan) a vendu en l'état futur d'achèvement à la société civile immobilière Lila Blue (la SCI) un immeuble, qu'elle a fait construire sous la maîtrise d'oeuvre de la société B-Archi, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF).
2. Le 13 octobre 2010, la construction a été réceptionnée avec des réserves et la SCI a pris possession du bien le 1er avril 2011.
3. Après expertise, la SCI a assigné, le 6 janvier 2015, la société Marignan en démolition-reconstruction de l'immeuble et en dommages-intérêts. Celle-ci a appelé en garantie la société B-Archi et la MAF.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen Enoncé du moyen
5. La SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes au titre des vices de construction et de non-conformité apparents, alors « que le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois, après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de constructions ou des défauts de conformité apparents ; que si l'acquéreur d'un immeuble édifié sous le régime de la vente à construire doit agir dans un délai d'un an à compter de la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformités apparents, ce délai ne peut s'appliquer en l'absence de réception ou en présence d'une réception avec réserves lorsque les réserves, objet du litige, n'ont pas été levées ; qu'en l'espèce, pour décider que l'action de la SCI Lila Blue était tardive pour avoir été introduite le 6 janvier 2015 quand la réception des travaux était intervenue le 13 octobre 2010 et la prise de possession de l'immeuble le 1er avril 2011, sans rechercher si les réserves ayant été émises à la réception et portant notamment sur la hauteur de plafond de l'habitation avaient été levées, cet événement seul étant de nature à rendre applicable le délai prévu à l'article 1648 alinéa 2 du code civil, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de ces dispositions et de celles combinées de l'article 1642-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte des articles 1642-1 et 1648, alinéa 2, du code civil que, si le vendeur d'un immeuble à construire ne s'oblige pas à réparer les vices de construction et les défauts de conformité apparents, l'action en garantie doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices et défauts de conformité apparents, c'est-à-dire le plus tardif des deux événements suivants : la réception des travaux avec ou sans réserves ou l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession.
7. La cour d'appel, qui a exactement retenu que l'existence de réserves à la réception n'était pas de nature à faire obstacle à l'écoulement du délai de forclusion, en a déduit, à bon droit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'action en garantie introduite le 6 janvier 2015 était irrecevable, la réception avec réserves étant intervenue le 13 octobre 2010 et la prise de possession le 1er avril 2011.
8. Elle a ainsi légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société civile immobilière Lila Blue aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour la société Lila Blue
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes, autres que celle relative à l'escalier, formées par la SCI Lila Blue à l'encontre de la SNC Marignan Résidences au titre des vices de construction et non-conformités apparentes,
ALORS QUE le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois, après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de constructions ou des défauts de conformité apparents ; que si l'acquéreur d'un immeuble édifié sous le régime de la vente à construire doit agir dans un délai d'un an à compter de la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformités apparents, ce délai ne peut s'appliquer en l'absence de réception ou en présence d'une réception avec réserves lorsque les réserves, objet du litige, n'ont pas été levées ; qu'en l'espèce, pour décider que l'action de la SCI Lila Blue était tardive pour avoir été introduite le 6 janvier 2015 quand la réception des travaux était intervenue le 13 octobre 2010 et la prise de possession de l'immeuble le 1er avril 2011, sans rechercher si les réserves ayant été émises à la réception et portant notamment sur la hauteur de plafond de l'habitation avaient été levées, cet événement seul étant de nature à rendre applicable le délai prévu à l'article 1648 alinéa 2 du code civil, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de ces dispositions et de celles combinées de l'article 1642-1 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI Lila Blue de son action dirigée contre la société B Architecte et son assureur la MAF,
ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel la SCI Lila Blue avait fait valoir que l'architecte avait commis une faute en acceptant de mettre en oeuvre la modification des hauteurs sous plafond par rapport au projet initial sans, d'une part, qu'elle soit couverte par un modificatif du permis de construire et sans, d'autre part, intégrer cette hauteur modifiée dans la notive descriptive de travaux dont la rédaction lui incombait ainsi qu'en convenait la SNC Marignan Résidences, ce qui avait laissé les acquéreurs dans l'ignorance de cette modification notable du permis de construire ; qu'en se bornant pour débouter la SCI Lila Blue de sa demande dirigée contre l'architecte et son assureur à retenir que le seul fait que la société B Archi ait accepté de mettre en oeuvre la modification des hauteurs sous plafond décidée par le maître de l'ouvrage n'était pas de nature à établir une faute de l'architecte, sans répondre à ce moyen pertinent des conclusions d'appel, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2022:C300052
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 19 janvier 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 52 F-D
Pourvoi n° C 21-10.022
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 JANVIER 2022
La société Lila Blue, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-10.022 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Marignan résidences, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 5],
2°/ à la société MAAF, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6],
3°/ à la société Mutuelle des architectes français, dont le siège est [Adresse 3],
4°/ à la société Sarim, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
5°/ à la société TAE, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Greff-Bohnert, conseiller, les observations de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de la société Lila Blue, de la SCP Boulloche, avocat de la société Mutuelle des architectes français, de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Marignan résidences, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Greff-Bohnert, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 8 juin 2020), par acte du 21 décembre 2009, la société Marignan résidences (la société Marignan) a vendu en l'état futur d'achèvement à la société civile immobilière Lila Blue (la SCI) un immeuble, qu'elle a fait construire sous la maîtrise d'oeuvre de la société B-Archi, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF).
2. Le 13 octobre 2010, la construction a été réceptionnée avec des réserves et la SCI a pris possession du bien le 1er avril 2011.
3. Après expertise, la SCI a assigné, le 6 janvier 2015, la société Marignan en démolition-reconstruction de l'immeuble et en dommages-intérêts. Celle-ci a appelé en garantie la société B-Archi et la MAF.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen Enoncé du moyen
5. La SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes au titre des vices de construction et de non-conformité apparents, alors « que le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois, après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de constructions ou des défauts de conformité apparents ; que si l'acquéreur d'un immeuble édifié sous le régime de la vente à construire doit agir dans un délai d'un an à compter de la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformités apparents, ce délai ne peut s'appliquer en l'absence de réception ou en présence d'une réception avec réserves lorsque les réserves, objet du litige, n'ont pas été levées ; qu'en l'espèce, pour décider que l'action de la SCI Lila Blue était tardive pour avoir été introduite le 6 janvier 2015 quand la réception des travaux était intervenue le 13 octobre 2010 et la prise de possession de l'immeuble le 1er avril 2011, sans rechercher si les réserves ayant été émises à la réception et portant notamment sur la hauteur de plafond de l'habitation avaient été levées, cet événement seul étant de nature à rendre applicable le délai prévu à l'article 1648 alinéa 2 du code civil, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de ces dispositions et de celles combinées de l'article 1642-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte des articles 1642-1 et 1648, alinéa 2, du code civil que, si le vendeur d'un immeuble à construire ne s'oblige pas à réparer les vices de construction et les défauts de conformité apparents, l'action en garantie doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices et défauts de conformité apparents, c'est-à-dire le plus tardif des deux événements suivants : la réception des travaux avec ou sans réserves ou l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession.
7. La cour d'appel, qui a exactement retenu que l'existence de réserves à la réception n'était pas de nature à faire obstacle à l'écoulement du délai de forclusion, en a déduit, à bon droit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'action en garantie introduite le 6 janvier 2015 était irrecevable, la réception avec réserves étant intervenue le 13 octobre 2010 et la prise de possession le 1er avril 2011.
8. Elle a ainsi légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société civile immobilière Lila Blue aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour la société Lila Blue
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes, autres que celle relative à l'escalier, formées par la SCI Lila Blue à l'encontre de la SNC Marignan Résidences au titre des vices de construction et non-conformités apparentes,
ALORS QUE le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois, après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de constructions ou des défauts de conformité apparents ; que si l'acquéreur d'un immeuble édifié sous le régime de la vente à construire doit agir dans un délai d'un an à compter de la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformités apparents, ce délai ne peut s'appliquer en l'absence de réception ou en présence d'une réception avec réserves lorsque les réserves, objet du litige, n'ont pas été levées ; qu'en l'espèce, pour décider que l'action de la SCI Lila Blue était tardive pour avoir été introduite le 6 janvier 2015 quand la réception des travaux était intervenue le 13 octobre 2010 et la prise de possession de l'immeuble le 1er avril 2011, sans rechercher si les réserves ayant été émises à la réception et portant notamment sur la hauteur de plafond de l'habitation avaient été levées, cet événement seul étant de nature à rendre applicable le délai prévu à l'article 1648 alinéa 2 du code civil, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de ces dispositions et de celles combinées de l'article 1642-1 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI Lila Blue de son action dirigée contre la société B Architecte et son assureur la MAF,
ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel la SCI Lila Blue avait fait valoir que l'architecte avait commis une faute en acceptant de mettre en oeuvre la modification des hauteurs sous plafond par rapport au projet initial sans, d'une part, qu'elle soit couverte par un modificatif du permis de construire et sans, d'autre part, intégrer cette hauteur modifiée dans la notive descriptive de travaux dont la rédaction lui incombait ainsi qu'en convenait la SNC Marignan Résidences, ce qui avait laissé les acquéreurs dans l'ignorance de cette modification notable du permis de construire ; qu'en se bornant pour débouter la SCI Lila Blue de sa demande dirigée contre l'architecte et son assureur à retenir que le seul fait que la société B Archi ait accepté de mettre en oeuvre la modification des hauteurs sous plafond décidée par le maître de l'ouvrage n'était pas de nature à établir une faute de l'architecte, sans répondre à ce moyen pertinent des conclusions d'appel, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2022:C300052
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