Vente immobilière et obligation de délivrance
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 23 février 2017
N° de pourvoi: 15-26.974
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Chauvin (président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Marc Lévis, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Icade promotion logement du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé à l'encontre de M. X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 juillet 2015), que la société Coprim régions, aux droits de laquelle se trouve la société Icade promotion logement (la société Icade), assurée par la société Axa corporate solutions (la société Axa), a vendu, en l'état futur d'achèvement, à M. Y... un « appartement-villa » dans un groupe d'immeubles construit par elle sous la maîtrise d'oeuvre de la société AB architecture ; que la société CEPI a été chargée d'une mission d'assistance au maître d'ouvrage, la société ARD d'une mission de pilotage-coordination, la société Bureau Véritas d'une mission de contrôle technique, la société ESMG et la société Euro Isola, toutes deux assurées auprès de la société MMA, respectivement du lot menuiseries extérieures et du lot faux plafonds, cloisons doublages ; que, se plaignant de non-conformités et de malfaçons, M. Y... a, après expertise, assigné en indemnisation la société Icade qui a appelé en garantie les constructeurs et leurs assureurs ;
Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, réunis et ci-après annexés :
Attendu que la société Icade fait grief à l'arrêt de la condamner à payer certaines sommes à M. Y... au titre de l'absence d'électricité dans le garage et de l'absence de robinet d'arrêt d'alimentation en eau ;
Mais attendu qu'ayant retenu, au vu du rapport d'expertise, que l'usage normal du garage nécessitait une alimentation électrique et que l'absence de robinet d'arrêt de l'alimentation en eau du lot de M. Y... à partir des parties communes constituait un manquement à l'obligation de délivrance, la cour d'appel en a exactement déduit que l'absence de ces deux éléments essentiels pour l'utilisation du lot constituait une non-conformité à sa destination dont le vendeur devait réparation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu que la société Icade fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. Y... une certaine somme au titre des pénalités de retard ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'acte de vente prenait comme point de départ de l'indemnisation du retard la date d'achèvement de l'immeuble et retenu que l'appartement livré à M. Y... le 13 novembre 2002 était affecté de désordres de nature décennale, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que le retard de paiement de certaines fractions du prix par l'acquéreur avait interrompu les travaux et qui, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a déduit que la demande était fondée, a légalement justifié sa décision ;
Mais sur les cinquième et sixième moyens du pourvoi principal et le deuxième moyen du pourvoi incident de la société Axa, réunis :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 455 du code de procédure civile et le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Attendu que, pour condamner la société Icade à payer à M. Y... certaines sommes au titre du trouble de jouissance subi en raison du défaut d'isolation phonique de l'appartement et au titre de la perte de chance de donner en location le bien acheté, l'arrêt retient que les défauts d'isolation généraient un préjudice de jouissance et que la villa étant atteinte de désordres devrait d'abord faire l'objet de travaux avant de pouvoir être louée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. Y... ne pouvait prétendre à la fois subir un trouble de jouissance personnel en résidant dans son immeuble et un préjudice faute de pouvoir le louer, la cour d'appel, qui n'a pas répondu au moyen de la société Icade soutenant que M. Y..., qui résidait dans l'immeuble, ne le destinait pas à la location, a violé les textes et le principe susvisés ;
Et Sur le huitième moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour rejeter les appels en garantie de la société Icade à l'encontre des sociétés AB architecture, SECTP, CEPI et ARD pour les désordres affectant le mur de soutènement du jardin, l'arrêt retient que le maître d'ouvrage n'établit pas que ce désordre est imputable à ces sociétés ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Icade qui soutenait que les appelés en garantie avaient manqué à leur devoir de conseil en ne prévoyant pas le drainage et les aménagements des espaces verts nécessaires de sorte qu'elle n'avait pu les commander, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le neuvième moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter l'appel en garantie de la société Icade pour le désordre des volets roulants, l'arrêt retient que le vendeur ne prouve pas le bien-fondé de sa demande générale aux fins d'être garanti « in solidum, en celui ou ceux contre qui l'action le mieux compétera » ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions, la société Icade avait demandé à être garantie par la société AB Architecture, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne, in solidum, la société Icade promotion logement et la société Axa corporate solutions à payer à M. Y... une somme de 12 000 euros au titre du trouble de jouissance lié au défaut d'isolation phonique des menuiseries, la société Icade promotion logement à payer la somme de 50 000 euros au titre de la perte de chance de louer le bien acheté, en ce qu'il rejette l'appel en garantie de la société Icade promotion logement à l'encontre des sociétés AB architecture, SECTP, CEPI et ARD pour les désordres du mur de soutènement et en ce qu'il rejette l'appel en garantie de la société Icade promotion logement à l'encontre de la société AB Architecture pour le désordre affectant les volets roulants, l'arrêt rendu le 9 juillet 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Met hors de cause la société Bureau Véritas et la société MMA ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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