Ici la lettre du Président du CNB.
Nous pouvons également nous servir de nos blogs pour relayer le besoin de justice exprimé par nos clients.
Lettre à tous les avocats de France
Paris, le 11 janvier 2008
En ce début d'année 2008, j'aurais souhaité donner un autre contenu au premier courrier que je vous adresse.
Les attaques répétées dont notre profession fait l'objet me l'interdisent.
Si l'actuel gouvernement affirme sa volonté de réformer la justice, la logique à laquelle obéissent les lois et les projets qui se succèdent montre que ses ambitions ne tendent en réalité que vers un seul but : faire faire des économies à l'État sans considération des coût sociétaux engendrés.
Le souci essentiel est donc de réduire l'activité judiciaire, de "déjudiciariser" par tous moyens, pour réduire les dépenses.
Dans cette stratégie, l'avocat paraît être conçu comme un adversaire, soupçonné d'encourager la "consommation" de droit, et générateur des dépenses de l'aide juridictionnelle.
Le juge, dont l'impartialité est garantie, se voit écarté de son rôle d'arbitre social.
Le projet de confier aux notaires le soin de prononcer le divorce par consentement mutuel ne doit donc pas être analysé seulement comme la volonté de favoriser une profession voisine, mais comme le signe annonciateur de bouleversements de plus grande ampleur.
Toutes nos activités sont concernées (droit civil et de la famille, droit pénal, droit social et droit des affaires).
La "demande de justice" ayant, dit-on, crû dans des proportions considérables entre 2000 et 2004, il apparaîtrait :
« nécessaire de réduire la demande adressée aux tribunaux dès que c'est possible, c'est-à-dire dès que des moyens moins traumatisants, moins coûteux, plus rapides peuvent légitimement apporter une réponse. »
La commission mise en place par le ministère de la justice autour du Professeur GUINCHARD aura pour rôle de formuler des « propositions ».
Ce n'est pas lui faire un procès d'intention que de constater que dans sa composition (17 magistrats, 9 greffiers, 3 professeurs, 3 avocats, 1 notaire, 1 huissier) le gouvernement n'a guère pris de risques quant au sens des conclusions attendues.
J'ai désigné, pour nous y représenter trois confrères, qui feront valoir les arguments de notre profession.
Cependant la stratégie gouvernementale repose également sur la prise à témoin récurrente de l'opinion.
Or cette dernière, sensibilisée aux dysfonctionnements judiciaires depuis l'affaire Outreau, que le politique est parvenu à exploiter contre le monde judiciaire lui-même, est prompte à ne voir dans les protestations des avocats que l'expression d'un corporatisme exacerbé.
Cette méthode lui a permis de faire accepter facilement des lois portant de graves atteintes à des principes fondamentaux sur lesquels repose notre "civilisation".
Rétablir la vérité aux yeux de l'opinion publique et la convaincre du bien fondé de nos positions est donc une condition nécessaire au succès...
Dès l'annonce du projet, nous avons réagi en communiquant fortement et en ayant recours aux moyens d'action classiques que constituent la grève d'avertissement, et la menace d'actions plus dures.
Mais il nous faut désormais structurer notre action et faire preuve d'imagination.
C'est pourquoi la profession a décidé de s'adjoindre des compétences particulières en matière de gestion de crise afin d'ouvrir les champs d'action et de rééquilibrer le dialogue public.
Ce combat ne pourra toutefois être gagné que si ces efforts sont relayés dans l'unité par l'ensemble des avocats et des composantes de la profession.
C'est dans cet esprit que vous ont été adressés dès le 24 décembre les premiers outils conçus pour permettre la diffusion de nos argumentaires, et qu'un forum a été ouvert sur le site du Conseil National.
La très forte mobilisation des avocats a encore été constatée à l'occasion de la réunion du Conseil National de ce jour.
Il est indispensable que des groupes d'action soient constitués au sein de chaque barreau.
Leur rôle sera de démultiplier l'action nationale, et de formuler des propositions.
Je souhaite qu'ils se manifestent auprès du Conseil National pour être rendus destinataires de toutes informations.
L'importance des enjeux est telle que chacun d'entre nous doit se préparer à affronter une crise d'une gravité inédite.
Je vous prie de me croire votre très confraternellement dévoué.
Bâtonnier Paul-Albert IWEINS
Président du Conseil National des Barreaux
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