A l'instar de la révocation, il s'agit de l'une des sanctions les plus lourdes que l'administration peut infliger à un agent public dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

En effet, il s’agit d'une sanction de 4e catégorie qui sanctionne les fautes les plus lourdes commises par un agent public (L 533-1 du CFP)

Il s'agit donc comme la révocation d'une sanction heureusement très rarement appliquée puisqu’elle met fin à sa carrière : c’est la radiation des cadres et donc la perte de la qualité de fonctionnaire.

De même que pour agent physiquement inapte, cette sanction ne prend pas en compte la limite d’âge de l’emploi de l’intéressé (CE 25 septembre 2009, ministère de la Santé, n°300781).

Nous allons donc examiner le contexte légale et jurisprudentiel de cette sanction.

  1. Le contexte légale de cette sanction disciplinaire :

 

Les articles L 530-1 à L 533-6 du code de la fonction publique, constituent le cadre légal de cette sanction

Elle est soumise à la procédure disciplinaire applicable aux différentes fonctions publiques désormais codifiée dans le code de la fonction publique.

Dés lors, l’agent doit être informé de son droit à communication de son dossier et de la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix et que par conséquent, il doit prendre effectivement connaissance de son dossier (L 532-4 CFP).

Ainsi, dans un arrêt récent, la haute juridiction a réaffirmé que le fonctionnaire

« A droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes ». (CE 28 janvier 2021 N°435946)

Dans un deuxième temps, l’agent est convoqué devant le Conseil de discipline qui formule et notifie ensuite à l’agent un avis sur la sanction proposée par l’autorité investie du pouvoir disciplinaire en l’occurrence la mise à la retraite d’office

A la lumière de cet avis, l’autorité ; qui n’est pas lié par cet avis, peut prendre trois positions

Soit la sanction proposée par le Conseil de Discipline sanctionne comme il convient les faits reprochés

Soit la sanction proposée par le Conseil de Discipline ne sanctionne pas assez sévèrement en raison des faits qui lui sont reprochés,

Dans le cas où l’autorité disciplinaire maintient sa position, cette ultime décision est alors matérialisée par un arrêté radiant l’agent des cadres

Pour ce qui concerne le droit à pension, les agents justifiant de deux années de services effectifs valables pour l’ouverture des droits à pension CNRACL ;

A ce titre, le fait que l’agent n’ai pas atteint l’âge minimal pour pouvoir prétendre à la retraite n’empêche pas l’autorité de prendre cette sanction (CE 31 mai 1968 n°72114)

Néanmoins, il peut prétendre aux allocations pour perte d’emploi si le fonctionnaire n’a pas atteint l’âge pour être admis au bénéfice de sa pension de retraite et s’il remplit les conditions exigées

Notons que la procédure disciplinaire doit être engagée dans les 3 ans suivant le jour où l'administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits passibles de sanction.

Précisons, a toutes fins utiles, que l’autorité peut décider, concomitamment à la procédure disciplinaire, de prendre une mesure de suspension

2 ) les principales jurisprudences : la suspension de l’agent et la contestaion de cette sanction

 Cette mesure provisoire et conservatoire, qui n’est pas une sanction, est destinée à éloigner l’agent de son service le temps de la procédure.

Elle reste très encadrée sur le fond par la jurisprudence.

Tout d’abord, la suspension est limitée à une durée de quatre mois et la jurisprudence a délimité les conditions de recours à cette mesure :

- Lorsque l’agent est suspecté d’avoir commis une ou des fautes disciplinaires particulièrement grave (CAA de bordeaux 12 décembre 2023 - n° 21BX01111)

À ce titre, n'oublions pas que la faute disciplinaire peut découler de comportement de l’agent dans sa vie privée qui ont des conséquences sur la dignité de ses fonctions et plus généralement sur l’honorabilité du service public (par exemple voir notre précédent article : la vie personnelle des agents public et le respect des obligations déontologiques)

- Suspecté d’avoir commis une infraction pénale (ex : CAA de Marseille 28 mars 2023 - n° 21MA03678)

En revanche, cette procédure n’est pas soumise à une procédure préalable contradictoire et de surcroit l’administration n’est pas dans l’obligation de motiver sa décision.

Pour ce qui concerne la contestation de cette sanction devant le tribunal administratif, le juge de l'excès de pouvoir sera amené examiner la matérialité des faits (CE 14 janvier 1916 ARRET CAMINO) ainsi que la qualification juridique des faits et enfin la proportionnalité de la sanction.

En effet, depuis arrêt DAHAN, le juge assure un contrôle normal sur la légalité de sanctions disciplinaires infligées (CE Ass 13 novembre 2013 n°347704)

 

Désormais, selon la formule consacrée  

Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes (Cour administrative d'appel de Toulouse - 2ème chambre - 12 décembre 2023 - n° 21TL04445, CE 30 nov. 2011 N°337617 CH St Dizpier)

 

parachevons notre propos sur une note d'espoir.

En effet, en cas d’annulation de la sanction, par le je administratif, l’agent doit être réintégré de droit dans ses fonctions.

De plus, l’annulation de l’acte emporte, de droit, des effets rétroactifs, en matière de rémunération et de carrière, avec reconstitution de celle-ci.

Enfin, il peut prétendre à une indemnisation du préjudice subi (CE 6 décembre 2013, Commune d’Ajaccio, n°365155),

« (…..) Considérant qu'en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre ; que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé (…)

C’est aussi le cas où éviction résulterait d’une sanction disciplinaire disproportionnée (CE 28 mars 2018, Ecole des Mines de Nantes, n°398851).