Un arrêt de la Cour de Cassation du 26 novembre 2020 ( Cass 2ème civ 26 novembre 2020 n°18-22563 RGDA Janvier 2021 p.68 , Dictionnaire permanent aAssurances Bulletin rapide n°310 fév 2021 p.8) vient souligner l’importance de la forme dans la modification de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie.

En application de l’article L132-8 du code des assurances, la désignation du bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie ou la modification de la clause bénéficiaire peuvent être réalisées soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités prévues par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Si cet article semble limiter les formes que peut utiliser le souscripteur d’un contrat d’assurance pour désigner un bénéficiaire, la jurisprudence autorise les désignations ou modifications informelles faites par courrier adressé à l’assureur, dès lors qu’elles traduisent la volonté certaine et non équivoque de l’assuré.

Dans l’arrêt commenté, M. X  a désigné par avenant du 27/11/2008 ses quatre sœurs comme bénéficiaires de ses trois contrats d’assurance vie.

Par testament olographe du 30/11/2010, il a institué ses deux enfants légataires universels, leur  léguant tous ses biens et notamment les produits de ses contrats d’assurance vie.

Le 21/01/2011, il a écrit aux assureurs de ses contrats pour modifier, en faveur de ses enfants, les clauses bénéficiaires.

M.X est décédé le 30 janvier 2011.

Après dépôt d’un rapport d’expertise médical  se prononçant sur l’état de santé mentale de M. X à l’époque de la rédaction du testament, ses sœurs assignent les enfants afin de voir prononcer l’annulation du testament  et de les voir condamnés à leur verser les sommes reçues au titre dudit testament.

La Cour d’appel prononce l’annulation du testament qui, contrairement aux exigences de l’article 970 du code civil, n’avait pas été intégralement rédigé de la main du testateur.

La modification bénéficiaire faite dans le testament au profit des enfants est donc également annulée.

La validité de la désignation bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie faite dans le cadre d’un testament dépend en effet de la validité du testament lui-même.

Si le testament est annulé, la désignation bénéficiaire qu’il contenait ne sera également plus valable.

Mais outre le testament, M.X avait également désigné ses enfants comme bénéficiaires de ses contrats par des courriers adressés aux assureurs.

La Cour d’appel considère toutefois que M. X n’avait pas manifesté la volonté de désigner ses deux enfants comme bénéficiaires aux lieu et place de ses sœurs, les courriers adressés aux assureurs étant des lettres types, qui n’étaient de surcroît pas revêtues sa signature.

Les enfants de M. X ont formé un pourvoi contre l’arrêt de la Cour d’appel en faisant valoir que le changement de bénéficiaires n’est soumis à aucune condition de forme et qu’en retenant que les lettres types adressées aux assureurs ne traduisaient pas la volonté de M. X, la Cour d’Appel avait violé l’article L132-8 des assurances.

Leur pourvoi est rejeté.

La Cour de Cassation considère que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la Cour d’Appel a estimé que les lettres types à en tête de M.X  et non revêtues de la signature de l’intéressé ne pouvaient être considérées comme la manifestation de la volonté du souscripteur de désigner comme bénéficiaires ses deux enfants aux lieu et place de ses quatre sœurs.

En effet, si la modification de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie peut être effectuée sans forme, encore faut il qu’elle traduise de manière certaine et non équivoque la volonté de l’assuré

En l’espèce, l’utilisation de courrier types, de surcroît non signés, est considérée comme ne traduisant pas une manifestation suffisante de la volonté de M. X de désigner ses enfants comme bénéficiaires.

Les courriers types, qui sont par nature standardisés, sont en effet  peu aptes à traduire une volonté certaine et non équivoque.

Un assuré souhaitant modifier la clause bénéficiaire de son contrat par un courrier adressé à l’assureur aura donc tout intérêt, afin de limiter les risques de contestation,  à privilégier un courrier personnalisé.