La Cour de Cassation a rendu en 2006 une décision particulièrement intéressante en matière d'autorité de la chose jugée, notamment lorsque un nouveau moyen est invoqué par le demandeur. Elle vient de nouveau de réaffirmer sa jurisprudence le 25 octobre 2007.

En effet, dans un arrêt du 7 juillet 2006, la Cour de Cassation réunie en assemblée plénière avait rendu la décision suivante :

« Mais attendu qu'il incombe au demandeur de présenter, dès l'instance relative à la première demande, l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci qu'ayant constaté que, comme la demande originaire, la demande dont elle était saisie, formée entre les mêmes parties, tendait à obtenir paiement d'une somme d'argent au titre des rémunérations d'un travail prétendument effectué sans contre partie financière, la Cour d'Appel en a exactement déduit que Gilbert X ne pouvait être admis à contester l'identité de cause des deux demandes en invoquant un fondement juridique qu'il s'était abstenu de soulever en temps utiles, de sorte que la demande se heurtait à la chose précédemment jugée relativement à la même contestation d'où il sait que le moyen n'est pas fondé ».

Le cas d'espèce :

Dans cette affaire, Monsieur Gilbert X se prétendant titulaire d'une créance de salaire différée sur la succession de son père, pour avoir travaillé sans rémunération au service de celui-ci, avait, sur ce fondement, assigné son frère, Monsieur René X, pris en sa qualité de seul autre co-héritier du défunt en paiement d'une somme d'argent. Un jugement avait rejeté sa demande aux motifs que l'activité professionnelle litigieuse n'avait pas été exercée au sein d'une exploitation agricole.

Monsieur Gilbert X avait de nouveau assigné son frère en paiement de la même somme d'argent, sur le fondement de l'enrichissement sans cause et faisait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la fin de non recevoir tiré de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rejetant la première demande alors, selon le moyen, « que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'en cas d'identité de cause, c'est-à-dire si les demandes successives sont fondées sur le même texte ou le même principe que la cour d'appel a constaté que la première demande de Gilbert X avait été fondée sur le salaire différé défini par le code rural tandis que la demande dont elle était saisie était fondée sur l'enrichissement sans cause, qu'en estimant que ces deux demandes avaient une cause identique, la cour n'avait pas tiré les conséquences légales de ces propres constatations et avait violé les articles 1351 du code civil et 480 du nouveau code de procédure civile.

La Cour de cassation réunie en assemblée plénière a balayé cette argumentation, en rappelant, comme cela vient d'être précisé ci-dessus que le demandeur ne pouvait être admis à contester l'identité de cause de deux demandes, en invoquant un fondement juridique qu'il s'était abstenu de soulever en temps utiles, compte tenu de ce que la demande se heurtait à la chose précédemment jugée, relativement à la même contestation.

Non seulement la cour de Cassation rappelle le principe de l'autorité de la chose jugée mais elle précise le principe qui s'applique également aux demandes identiques mais fondées sur un fondement juridique différents que les parties se seraient abstenus de soulever de part leur négligence. Elle assimile alors le fondement juridique à la cause.

Cette position vient d'être réaffirmée par la Deuxième chambre civile dans un arrêt rendu le 25 octobre 2007, (n° 06-19.524). La Cour rappelle qu "il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci ".

Récemment encore, la troisième chambre de la Cour de cassation a réaffirmé sa jurisprudence le 13 février 2008 (06-22.093).

Il faudra alors être particulièrement vigilant et soulever l'ensemble des moyens dès la première demande, sous peine de tomber sous le coup de l'autorité de la chose jugée.