A l’occasion d’une affectation dans un territoire ou un département d’outre-mer, les citoyens originaires d’outre-mer qui ont embrassé la carrière de fonctionnaire peuvent se voir opposer une « erreur de jeunesse » dont les citoyens métropolitains dotés de la même vocation n’ont rien à craindre.

En effet, d’un côté, selon le Décret  n°  2013-314  du  15  avril  2013  portant  création  d'une  indemnité  de  sujétion géographique : « Une indemnité de sujétion géographique est attribuée, dans les conditions prévues par le présent décret, aux fonctionnaires de l'Etat et aux magistrats, titulaires et stagiaires, affectés en Guyane, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, s'ils y accomplissent une durée minimale de deux années consécutives de services ».

L’ISG est une indemnité objective visant à compenser les contraintes financières liées à une affectation dans l’un des départements ou territoires listés et favoriser la stabilisation des parcours professionnels dans ces départements.

De l’autre côté, aux termes de l’article 1er du décret du 20 décembre 2001 portant création d’une prime spécifique d’installation : « Il est institué une prime spécifique d’installation pour les fonctionnaires de l’Etat et les magistrats, titulaires ou stagiaires, affectés dans un département d’outre-mer ou à Mayotte, qui reçoivent une première affectation en métropole à la suite d’une mutation ou d’une promotion, s’ils y accomplissent une durée minimale de quatre années consécutives de services. Cette prime spécifique d’installation est également versée aux fonctionnaires dont la résidence familiale se situe dans un département d’outre-mer ou à Mayotte et qui sont affectés en métropole à la suite de leur entrée dans l’administration, s’ils y accomplissent une durée minimale de quatre années consécutives de services ».

La PSI quant à elle, est versée dans deux cas. D’une part, en cas de première affectation en métropole d’un fonctionnaire affecté initialement en outre-mer, visant ainsi à compenser les charges d’un déménagement et du changement de vie qu’une telle décision implique pour le fonctionnaire et sa famille. Elle peut, dans ce cas être assimilée à une indemnité « symétrique » à l’ISG qui, rappelons-le, est uniquement applicable en cas de déplacement vers l'outre-mer.

D’autre part, cette prime spécifique d’installation est également versée aux fonctionnaires dont la résidence familiale se situe dans un département d’outre-mer ou à Mayotte et qui sont affectés en métropole à la suite de leur entrée dans l’administration. Dans ce cas, alors, interviens un critère « personnel » qui vise spécifiquement les fonctionnaires originaires des départements d’outre-mer ».

Faut-il y voir une discrimination positive ? Peut-être, dans la mesure où cette prime présente plus un caractère incitatif qu'indemnitaire et vise certainement à compenser le fait que l’attribution des premières affectations de fonctionnaire de l’Etat aboutit très fréquemment, en pratique, à des déménagements, ce qui a objectivement des conséquences plus grandes lorsque l’on vient d'outre-mer. Mais, il ne peut en aucun cas en être déduit une rupture dans le principe d’égalité de traitement dans la mesure où les critères de versement restent parfaitement objectifs et fondés sur localisation du domicile familial lors de la première affectation.

Les deux indemnités ne sont pas cumulables.

Dans un souci, non seulement budgétaire mais aussi de cohérence des carrières, chacun de ces décrets instaure des règles de non-redondance et de non-cumul. La non-redondance a pour vocation de fixer des délais et des conditions de nature à éviter qu’un fonctionnaire touche trop « fréquemment » ces indemnités. Ainsi, l’ISG ne peut être perçu par un fonctionnaire qui en a bénéficié au titre d’une affectation remontant à moins de deux ans, et la PSI ne peut être perçue qu’une seule fois.

Le non-cumul est prévu par l’article 9 du décret relatif à l’ISG : « Un agent mentionné à l'article 1er ayant perçu l'indemnité particulière de sujétion et d'installation ou l'indemnité de sujétion géographique ne peut prétendre, dans la suite de sa carrière, au versement de la prime spécifique d'installation instituée par le décret du 20 décembre 2001 susvisé. » et par l’article 7 du second décret, relatif à l’IPSI, dans sa rédaction issue de l’article 10 du décret précité du 15 avril 2013, qui dispose : « Un fonctionnaire de l’Etat ayant perçu la prime spécifique d’installation ne peut prétendre, dans la suite de sa carrière, au versement de l’indemnité de sujétion géographique instituée par le décret n° 2013-314 du 15 avril 2013 ».

L’application combinée des deux articles rend impossible le cumul des deux indemnités. En effet, si un fonctionnaire a perçu l’ISG ou la PSI, alors il ne peut, dans la suite de sa carrière, bénéficier de l’IPSI. Et vice et versa, si un agent a perçu la PSI, il ne peut, dans la suite de sa carrière bénéficier de l’ISG.

L’ « erreur de jeunesse », si l’on peut l’appeler comme cela, c’est donc d’avoir bénéficié de l’IPSI, puisqu’étant une indemnité versée une seule et unique fois, elle prive le fonctionnaire de tout espoir non seulement de la toucher de nouveau mais aussi de toucher l’ISG en cas d’affectation en outre-mer. Au contraire, le fait d’avoir perçu l’ISG, ne prive pas de fonctionnaire d’une chance de percevoir de nouveau cette indemnité dès lors qu’il serait affecté dans un autre département d’outre-mer après un délai de deux ans.

Nous verrons dans un prochain article, les applications jurisprudentielles et la question du caractère discriminatoire de cette règlementation.