L’ouverture d’une mesure de protection judiciaire doit rester exceptionnelle et adaptée à l’état de santé de la personne à protéger. Les juges ont l’obligation de motiver leur jugement au regard de ces principes.

Sur le principe de nécessité des mesures de protection

Par application des articles 425 et 428 du code civil, toute personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit des facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté peut bénéficier d'une mesure de protection juridique.

Cette mesure ne peut être ordonnée par le juge qu'en cas de nécessité et lorsqu'il ne peut être pourvu suffisamment aux intérêts de la personne par l'application des règles du droit commun de la représentation, de celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et des règles des régimes matrimoniaux, par une autre mesure judiciaire moins contraignante ou par le mandat de protection future conclu par l'intéressé.

Sur le principe de proportionnalité

Elle doit être proportionnée et individualisée en fonction du degré d'altération des facultés personnelles de l'intéressé.

Le juge a la possibilité soit d'aménager soit de renforcer la curatelle pour proportionner la protection à l'altération constatée.

Concernant les faits

Au vu des certificats médicaux circonstanciés, il est établi que, Mme X souffre d'une altération de ses facultés personnelles caractérisé par un fonctionnement sensitif et paralogique, la conduisant à gérer de manière inadaptée son patrimoine et à mettre en péril ses intérêts financiers. Deux médecins concluent à la nécessité d'une mesure de représentation, c’est-à-dire d’une tutelle.

L’un des médecins soulignant cependant le fait qu'elle ne relevait pas d'une mesure de tutelle à la personne.

Il résulte par ailleurs des débats, que Mme X. est obnubilée par un certain nombre d'idées, notamment par rapport à la succession de ses parents et grands-parents et par rapport à la copropriété, qui la conduisent à tenir un discours incohérent et à prendre des décisions contraires à ses intérêts sur le plan financier.

Au vu de ces constatations il est établi que l'intérêt de Mme X., nécessite qu'elle demeure sous mesure de protection, mais que cette mesure ne doit concerner que la gestion de ses biens.

Dans la mesure où elle demeure enfermée dans ses raisonnements incohérents de spoliation, elle n'est accessible à aucun dialogue et, la collaboration qui avait pu s'amorcer avec son tuteur, a finalement échoué. Cette attitude pathologique, démontre qu'en l'état seule une mesure de représentation permettra de rendre effective la protection de ses intérêts financiers.

Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une mesure de protection à la personne mais de confirmer la mesure de tutelle aux biens.

C’est en ce sens que les juges ont limité la mesure de tutelle à la seule mission de protection aux biens (Cour d'appel de PARIS -  05 juillet 2021, n° 20/07706), sous réserve d'un éventuel pourvoi en cassation.


Claudia CANINI

Avocat à la Cour - Droit des majeurs protégés

www.canini-avocat.com