La clause de clientèle est l'application pure du devoir de loyauté contenu dans tout contrat de travail. Cette clause interdit à un salarié, suite à la rupture de son contrat, de démarcher ou de détourner la clientèle de son employeur. contractualisant ainsi le contenu du devoir de loyauté auquel tout ancien salarié est tenu. Mais attention, si celle clause fait peser sur le salarié des contraintes supplémentaires, le juge peut être amené à la requalifier en clause de non-concurrence avec les conséquences que cela implique en terme d'indemnités (contrepartie financière).
Dans l'affaire qui a conduit au prononcé de l'arrêt du 27 octobre 2009, la clause dite de clientèle était libellée de manière suivante : « En cas de cessation de votre contrat de travail, quelle qu'en soit la cause vous vous interdirez :
- d'entrer en contact directement ou indirectement, sous quelque forme et sous quelque mode que ce soit, avec les clients de la société F. et, de manière corollaire, de démarcher lesdits clients et ce, même si vous faîtes l'objet de leur part de sollicitations spontanées,
- d'exploiter directement ou indirectement la clientèle concernée, à titre personnel ou par l'intermédiaire de toute société, association ou entité juridique quelconque dont vous seriez l'associé, le membre, le salarié ou le collaborateur ou pour le compte de laquelle vous interviendriez ou seriez rémunérée, directement ou indirectement de quelque manière, à quelque titre, et sous quelque statut que ce soit. En cas de violation de la présente clause, la société F. se réserve le droit de demander réparation du préjudice subi et de faire ordonner, le cas échéant, sous astreinte, la cessation dudit trouble ».
Licenciée après 21 ans de service, et estimant que cette clause limitait ses possibilités de retrouver un travail, la salariée s'est adressée au Conseil des prud'hommes pour la voir requalifier en clause de non-concurrence et obtenir les indemnités consécutives.
La Cour de cassation valide l'analyse faite par la cour d'appel et confirme la requalification de la clause de clientèle en e unclause de non-concurrence. En effet, les magistrats ont estimé que la clause du contrat de travail, quelle que soit sa qualification, qui contient une interdiction, y compris dans le cas où des clients de l'employeur envisageraient spontanément, en dehors de toute sollicitation ou démarchage, de contracter directement ou indirectement avec l'ancienne salariée, fait peser sur l'intéressée une obligation de loyauté à l'égard de son ancien employeur qui va au-delà de ce qui est admis. Dès lors, cette clause doit s'analyser en une clause de non-concurrence, laquelle est illicite car dépourvue de contrepartie financière, non limitée dans le temps et dans l'espace, ce qui ouvre droit à indemnité (en l'espèce à hauteur de 13.000 euros compte tenu de l'ancienneté de la salariée).
Aussi, lorsqu'une clause de "clientèle" intégrée au contrat de travail prévoit une interdiction, vis-à-vis de l'ancien salarié, de contracter directement ou indirectement avec d'anciens clients, même si ceux-ci l'envisagent spontanément, en dehors de toute sollicitation ou démarche, les juges peuvent requalifier la clause en clause de non-concurrence.
Jean-Philippe SCHMITT
Avocat à Dijon (21)
Spécialiste en droit du travail
03.80.48.65.00
Cass. soc., 27 oct. 2009, n° 08-41.501 P+B
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