Rappels juridiques sur la représentativité syndicale au niveau de l’entreprise et de l’établissement et les listes communes :
1./ Article L.2122-1 du code du travail : « Dans l'entreprise ou l'établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l'article L.2121-1 et qui ont recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants » ;
2./ Article L.2122-3 du code du travail : « Lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition entre elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste. A défaut d'indication, la répartition des suffrages se fait à part égale entre les organisations concernées » ;
3./ Circulaire DGT n°2008/20 du 13/11/2008 – fiche n°1 : « Lorsqu’une liste commune est établie, à défaut de répartition des suffrages entre les organisations lors de son dépôt, la répartition se fait à parts égales. Cette répartition ne peut ensuite changer qu’à compter du nouveau dépôt de liste, c’est-à-dire lors de la nouvelle élection » ;
4./ Il résulte de l’article L.2122-3 du code du travail que la répartition des suffrages, lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu'elle ne soit pas à parts égales, doit être portée tant à la connaissance de l'employeur qu'à celle des électeurs de l'entreprise ou de l'établissement concerné avant le déroulement des élections et qu'à défaut, la répartition s'opère à parts égales (Cass. soc. 13/01/2010 n°09-60208) ;
5./ Une liste de candidats présentée par 2 syndicats affiliés à la même confédération ne constitue pas une liste commune au sens de l'article L.2122-3 du code du travail et ne peut, par suite, donner lieu à une répartition entre eux des suffrages qu'elle a recueillis en vue de les faire bénéficier, chacun, d'une représentativité propre (Cass. soc. 10/05/2012 n°11-21356) ;
6./ Il résulte de l'article L.2122-3 du code du travail que lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, il doit être procédé à la répartition entre elles des suffrages exprimés permettant de déterminer leur audience électorale et leur représentativité, sur la base indiquée lors du dépôt de leur liste portée à la connaissance tant de l'employeur qu'à celle des électeurs et à défaut à parts égales entre les organisations concernées (Cass. soc. 14/01/2014 n°12-28929) ;
7./ La liste commune, formée entre un syndicat catégoriel et un syndicat intercatégoriel est valable dès lors que cette liste ne comprend de candidats que dans les collèges dans lesquels les statuts des deux organisations syndicales leur donnent vocation à en présenter. Lorsqu'une liste commune est établie, la répartition des suffrages exprimés est librement déterminée par les organisations syndicales pourvu qu'elle soit portée à la connaissance de l'employeur et des électeurs de l'entreprise ou de l'établissement concerné avant le déroulement des élections, peu important que cette répartition aboutisse à faire bénéficier l'une des organisations syndicales de l'intégralité des suffrages exprimés (Cass. soc. 05/11/2014 n°14-11634).
Dans une affaire du 10 mars 2016, en vue des élections des membres du comité d'établissement et des délégués du personnel d’une société, un protocole d'accord préélectoral avait été signé le 12 janvier 2015, fixant la date de dépôt des listes de candidatures au 4 février 2015, et le 1er tour des élections au 19 mars suivant.
Les syndicats FO et CFTC avaient déposé une liste commune, et étaient convenu de répartir les voix, selon un article 2, à hauteur de 85% pour la liste FO et 15% pour la liste CFTC, mais un article 3 précisait qu'au delà de cette règle de répartition, une clause de réserve garantirait la représentativité minimum de 10% des suffrages valablement exprimés à chacun des syndicats de la liste commune.
Ainsi, au cas où l’un des 2 syndicats FO et CFTC ne fût reconnu représentatif (car ayant obtenu moins de 10% des suffrages valablement exprimés) malgré la répartition convenue 85%-15% des suffrages recueillis, la clause de réserve permettait de modifier, après le scrutin, la clé de répartition de façon à attribuer à ce syndicat le nombre de voix nécessaires pour atteindre les 10% minimum requis.
Le syndicat CFDT saisit le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de l’article 3 (la clause de réserve).
Pour la Cour de cassation, cette clause de réserve devait être écartée :
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Il résulte de l'article L.2122-3 du code du travail que lorsqu'une liste commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par elles lors du dépôt de leur liste, portée à la connaissance de l'employeur et des électeurs et à défaut, à parts égales entre les organisations concernées ;
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La base choisie, permettant de déterminer l'audience électorale et la représentativité, ne peut être modifiée a posteriori en fonction des résultats de l'élection ;
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Le dispositif de la clause de réserve n'étant applicable que de manière aléatoire après la connaissance du résultat des élections, il devait être écarté, et la répartition des suffrages devait se faire selon la base indiquée aux électeurs par l'article 2 (ici 85%-15%).
En conclusion : Puisque chaque électeur doit avoir connaissance de la destination de son vote avant le scrutin, des modalités de répartition des suffrages d’une liste commune, qui seraient modifiables après le scrutin, doivent être écartées.
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