La maladie professionnelle constitue un mécanisme protecteur fondamental en droit de la sécurité sociale. Sa reconnaissance suppose la réunion de conditions strictement définies par les tableaux réglementaires. Le contentieux de l'opposabilité de la décision de prise en charge à l'employeur soulève des questions délicates tenant à la preuve de la désignation de la maladie et au respect du secret médical.

La Cour d'appel de Versailles, par un arrêt du 11 septembre 2025, apporte des précisions significatives sur ces questions. Un salarié employé en qualité de carrossier-peintre a souscrit, le 15 mars 2017, une déclaration de maladie professionnelle au titre d'une « occlusion cubitale distale droite avec hypovascularisation et opacification retardée des artères. Syndrome du marteau hypothénar ». La caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge cette affection sur le fondement du tableau n° 69 des maladies professionnelles, par décision du 10 octobre 2017.

L'employeur a saisi la commission de recours amiable puis le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles aux fins d'inopposabilité de cette décision. Par jugement du 7 avril 2022, les premiers juges ont déclaré la décision inopposable, considérant que la caisse ne rapportait pas la preuve que l'affection déclarée correspondait à la pathologie du tableau n° 69. La caisse a relevé appel de cette décision.

Devant la cour, l'employeur soutenait que le certificat médical initial ne précisait pas que l'artériographie avait permis d'objectiver un anévrisme ou une thrombose de l'artère cubitale ou de l'arcade palmaire superficielle, comme l'exige le tableau. La caisse faisait valoir que le médecin conseil avait, dans le colloque médico-administratif, confirmé que les conditions réglementaires étaient remplies et que l'artériographie, élément du diagnostic couvert par le secret médical, n'avait pas à figurer dans le dossier administratif.

La question posée à la cour était double : le constat du médecin conseil, mentionnant la réalisation d'une artériographie sans en communiquer le contenu, suffit-il à établir que la maladie déclarée correspond à celle visée au tableau ? L'employeur peut-il exiger la communication d'un élément diagnostique couvert par le secret médical ?

La Cour d'appel de Versailles infirme le jugement et déclare la décision de prise en charge opposable à l'employeur. Elle retient que « le médecin conseil de la caisse, qui a eu accès au dossier médical de la victime, a précisé dans le colloque médico-administratif le libellé de la maladie (...) en mentionnant la réalisation d'une artériographie le 27 janvier 2017, qui implique nécessairement la constatation d'un anévrisme ou d'une thrombose ». Elle ajoute que « la teneur de l'artériographie constitue un élément du diagnostic, couvert par le secret médical, de sorte qu'elle n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse ».

L'arrêt mérite attention en ce qu'il précise la valeur probatoire du colloque médico-administratif dans l'établissement de la désignation de la maladie (I) et clarifie l'articulation entre le droit à l'information de l'employeur et le secret médical (II).

 

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