Obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qu'il est soumis
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 22-20.487
- ECLI:FR:CCASS:2023:C300814
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 14 décembre 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, du 12 mai 2022
Président
Mme Teiller (président)
Avocat(s)
SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Piwnica et Molinié
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 décembre 2023
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 814 F-D
Pourvoi n° Y 22-20.487
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 DÉCEMBRE 2023
1°/ M. [F] [M],
2°/ Mme [S] [P], épouse [M],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° Y 22-20.487 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2022 par la cour d'appel de Douai (3e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Le Cercle, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Grandjean, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme [M], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Le Cercle, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grandjean, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 12 mai 2022), M. et Mme [M] sont propriétaires d'un immeuble, voisin de celui dans lequel la société Le Cercle exerce une activité de restauration.
2. Dénonçant des odeurs et des fumées provenant de la cheminée de la cuisine de ce restaurant, ils ont obtenu la désignation d'un expert judiciaire, puis ont assigné la société Le Cercle aux fins d'exécution des travaux par lui préconisés et en indemnisation de leur préjudice.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. et Mme [M] font grief à l'arrêt de condamner la société Le Cercle à leur payer une certaine somme en réparation d'un préjudice de jouissance subi jusqu'au 10 janvier 2016, et de rejeter le surplus de leur demande indemnitaire et leur demande d'injonction de faire des travaux, alors « que le document daté du 10 janvier 2016 et comportant la signature du représentant de la société Le Cercle du 10 janvier 2017 était intitulé « devis » et la facture attestant de l'achèvement des travaux portait la date du 3 mars 2017, ces pièces étant annexées au rapport de l'expert qui les avait bien distinguées ; qu'en considérant qu'aucune faute n'était prouvée postérieurement au 10 janvier 2016 au motif que la mise en conformité de l'installation d'évacuation d'air par la cheminée résultait d'une « facture » datée du 10 janvier 2016, de sorte que les attestations concernant les faits postérieurs à janvier 2016 ne concernaient qu'un préjudice olfactif sans lien causal avec la faute de la société Le Cercle, la cour d'appel a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause. »
Réponse de la Cour
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qu'il est soumis :
5. Pour rejeter la demande d'indemnisation d'un préjudice de jouissance pour la période postérieure au 10 janvier 2016, l'arrêt retient que la société Le Cercle justifie de la réalisation de travaux de mise en conformité de l'installation litigieuse par la production d'une facture acquittée, datée du 10 janvier 2016.
6. En statuant ainsi, alors que la pièce en date du 10 janvier 2016, régulièrement versée aux débats et visée par la cour d'appel, est un devis signé par la société Le Cercle le 10 janvier 2016, et que la facture acquittée correspondante est datée du 3 mars 2017, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ces documents.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Le Cercle à payer à M. et Mme [M] la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi jusqu'au 10 janvier 2016 et rejette le surplus de cette demande indemnitaire, l'arrêt rendu le 12 mai 2022 par la cour d'appel de Douai ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société Le Cercle aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Le Cercle et la condamne à payer à M. et Mme [M] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C300814
Publié par ALBERT CASTON à 10:21
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Libellés : dénaturation , document , office du juge , Procédure
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