Aux termes de l’article L. 211-1 du Code des procédures civiles d’exécution :

« tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent […]».

Toutefois, lorsqu’une telle mesure suppose l’exercice d’une contrainte sur le tiers saisi, il résulte du principe de l’indépendance et de la souveraineté des États, ainsi que du principe de territorialité des procédures civiles d’exécution, qu’elle ne peut produire effet que si le tiers saisi est établi en France.

En effet il est interdit aux agents d’exécution français d’intervenir matériellement sur le sol d’un État étranger.

Néanmoins, on peut considérer que le tiers saisi, personne morale, est établie en France et donc pratiquer une saisie-attribution entre ses mains, lorsque :

  • soit son siège social est situé en France,
  • soit il y dispose d’une entité (filiale, succursale, établissement secondaire, etc.), ayant le pouvoir de s’acquitter du paiement d’une créance du débiteur saisi à son encontre.

Dans ce cas, la saisie-attribution pourra donc être valablement pratiquée entre les mains de l’établissement situé en France, lequel est susceptible de déclarer l’étendue des obligations de la personne morale étrangère à l’égard du débiteur, sans qu’aucune intervention matérielle sur le territoire de l’État étranger ne soit nécessaire.

C’est le principe qui est rappelé par la Cour de cassation dans un arrêt en date du 10 décembre 2020 (Cass. Civ 2ème, 10 déc., 2020, n° 18-17.937).

En l’espèce, un Conseil de prud’hommes a condamné solidairement l’ambassadeur des États-Unis d’Amérique et les États-Unis d’Amérique à verser à plusieurs personnes ayant travaillé de 1989 à 2001 à l’ambassade des États-Unis en France, une somme de 136 000 euros à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du troisième mois suivant la notification du jugement.

Ladite astreinte a été liquidée à la somme de 734 000 euros par un second jugement du Conseil des prudhommes.

Sur le fondement de ces deux jugements, les demandeurs ont fait pratiquer une saisie-attribution des loyers dus aux États-Unis d’Amérique par la société de droit américain, dont le siège social est aux États-Unis, pour son établissement situé à Paris dans un immeuble dont les États-Unis sont propriétaires.

Les États-Unis d’Amérique ont contesté cette saisie-attribution, contestation que fut rejetée par le Juge de l’exécution, mais accueillie par les juges d’appel lesquels ont ordonné la mainlevée de la saisie-attribution.

Les juges d’appel ont estimé que le principe de territorialité des voies d’exécution faisait échec à ce qu’une saisie-attribution puisse appréhender une créance de loyers versés pour la location d’un immeuble en France au profit de l’établissement français d’une personne morale étrangère afin d’y exercer son activité professionnelle, créance qu’ils ont fictivement localisée aux États-Unis.

Cet arrêt fut cassé par la Cour de cassation.

Attention : encore faut-il que le tiers saisi établi en France, détienne effectivement des fonds appartenant au débiteur saisi situé à l’étranger.

En effet, par un arrêt du même jour (19-10.801), la Cour de cassation a rejeté un pourvoi contre un arrêt d’appel ordonnant la mainlevée d’une saisie-attribution laquelle avait été pratiquée en France par Monsieur X., entre les mains d’une banque dont le siège social est situé à Londres (tiers saisi), prise en sa succursale parisienne, pour une créance que ce dernier détenait à l’égard l’État du Panama et de l’Autorité du canal de Panama (débiteurs saisis), puisqu’aucun compte n’était ouvert dans ladite succursale parisienne au nom des débiteurs saisis susmentionnés.

Samedi 12 décembre 2020