REFORME DU DROIT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE : ENTREE EN VIGUEUR DES NOUVELLES DISPOSITIONS LE 1ER OCTOBRE 2021

 

La loi dite « PACTE » (Plan d'Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises) du 22 mai 2019, modifie d’une part, le régime des mesures préventives et de l’insolvabilité des entreprises, et d’autres part, le régime des sûretés en cas de procédure collective du débiteur.

Les nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 1er octobre 2021(Ordonnance n° 2021-1193 du 15 sept. 2021 et le Décret d’application n° 2021-1218 du 23 sept. 2021). Toutefois, les procédures en cours à cette date n’y sont pas soumises.

Etant rappelé que le Gouvernement avait adapté temporairement, certaines règles relatives aux procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises (Ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020), dont l’application a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2021 pour les procédures d’ores et déjà ouvertes à la date d’entrée en vigueur de la nouvelle réforme.

Quant aux procédures non ouvertes à la date du 1er octobre 2021, ce sont les dispositions de la nouvelle réforme qui auront vocation à s’appliquer.

 

I. PERIODE DE PREVENTION

I-1 AVANT TOUTE PROCEDURE

La réforme accroît les pouvoirs d’enquête du Président du tribunal compétent pour ouvrir la procédure collective (Tribunal Judiciaire pour les sociétés civiles et Tribunal de Commerce pour les sociétés commerciales) et ce, en amant d’une procédure ou mesure préventive.

En effet, jusqu’alors, le Président du Tribunal pouvait, après avoir convoqué, vainement, le dirigeant d’une société traversant des difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, solliciter des renseignements sur la situation de l’entreprise en question, auprès de certaines personnes et institutions (ex : membres du comité social et économique, commissaires aux comptes, etc.).

Désormais, il peut interroger ces personnes dès l’envoi de la convocation au dirigeant - en parallèle -, et dans les 3 mois qui suivent l’envoi de cette convocation.

 

I-2 ALERTE PAR LE COMMISSAIRE AUX COMPTES

Désormais, le commissaire aux comptes peut - lorsque l’urgence commande l’adoption de mesures immédiates et que le dirigeant s’y refuse ou envisage des mesures insuffisantes -, en référer au Président du tribunal et ce, sans devoir attendre l’expiration du délai de réponse de 15 jours dont dispose le dirigeant pour répondre à l’information qui lui a été faite par le commissaire aux comptes.

 

I-3 CONCILIATION

3.1. Possibilité pour le débiteur de solliciter des délais de paiement pendant la procédure de conciliation, et ce, qu’il soit poursuivi en paiement ou pas

*Une entreprise qui fait l’objet d’une procédure de conciliation et est, en même temps, mise en demeure ou poursuivie par un créancier durant les négociations, peut demander au juge qui a ouvert la procédure de conciliation, de lui octroyer des délais de paiement (dans la limite de 2 ans).

La nouveauté de la réforme réside dans le fait que désormais, l’entreprise peut solliciter des délais de paiement, et ce, avant toute mise en demeure ou poursuite, à l’égard d’un créancier qui n’aurait pas accepté, dans le temps imparti par le conciliateur, la demande faite par ce dernier, de suspendre l’exigibilité de la créance.

Toutefois, les délais ainsi accordés par le juge dans ces conditions, ne pourront dépasser la durée de la mission du conciliateur (5 mois maximum), laquelle prend fin :

  • à l’expiration de la durée fixée par le tribunal,
  • à l’initiative du conciliateur (en cas d’impossibilité de parvenir à un accord),
  • lorsque le débiteur en fait la demande au Président du tribunal,
  • par la constatation ou l’homologation de l’accord,
  • à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.

*Etant précisé que les personnes coobligées ou garants peuvent se prévaloir des délais de paiement accordés au débiteur pendant la phase de conciliation, et ce, même si la créance pour laquelle ils sont coobligés ou se sont portés garants, n’a pas fait l’objet d’un accord dans le cadre de la conciliation.

 

3.2. Les frais exposés par le débiteur pendant la conciliation

Désormais, le débiteur a l’obligation de dresser, un état de tous les frais mis à sa charge dans le cadre de la procédure de conciliation, mentionnant notamment les rémunérations des différents intervenants à la procédure (ex : conciliateur, mandataire ad hoc, expert, etc.) et les honoraires de ses propres conseils, ainsi que ceux des conseils de ses créanciers lorsqu’ils sont mis à sa charge.

Cet état de frais doit être signé et déposé au greffe par le débiteur.

Il est accessible aux seuls, conciliateur, Président du tribunal, tribunal qui ouvre la procédure collective, et ministère public.

 

II. SAUVEGARDE, SAUVEGARDE ACCELEREE ET REDRESSEMENT JUDICIAIRE

II-1 REDUCTION DE LA DUREE DE LA PERIODE D’OBSERVATION DE LA SAUVEGARDE

Avant la réforme, dans le cadre d’une sauvegarde ou de redressement judiciaire, la durée de la période d’observation était de 6 mois, renouvelable une fois pour la même durée, et exceptionnellement prolongée de 6 mois supplémentaires à la demande du procureur de la République (soit une durée maximale de 18 mois).

La réforme supprime cette prolongation exceptionnelle de 6 mois pour la sauvegarde et la limite donc à 12 mois.

 

II-2 PASSIF PRIS EN COMPTE POUR L’ELABORATION DU PLAN

Lorsque les engagements pour le règlement du passif peuvent être établis sur la base d’une attestation de l’expert-comptable ou du commissaire aux comptes, ils portent sur les créances déclarées admises ou non contestées, ainsi que sur les créances identifiables, notamment celles dont le délai de déclaration n’est pas expiré.

 

II-3 FUSION DE LA SAUVEGARDE ACCELEREE ET DE LA SAUVEGARDE FINANCIERE ACCELEREE

Désormais, aux côtés de la sauvegarde classique, il existe la sauvegarde accélérée, dont les conditions d’ouverture sont :

  • l’existence d’une cessation de paiements ne datant pas de plus de 45 jours,
  • l’obligation d’avoir des comptes certifiés par le commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable,
  • l’existence d’un projet de plan établi dans le cadre d’une conciliation préalable et susceptible d’être adopté par les parties affectées par ce projet et ce, dans un délais de 4 mois maximum.

La sauvegarde accélérée n’a d’effets qu’à l’égard des parties affectées par le projet de plan établi lors de la conciliation.

Comme avant la réforme, il est mis fin à la procédure si l’entreprise était en cessation des paiements depuis plus de 45 jours lors de la demande ou si aucun plan n’est arrêté dans le délai requis.

 

II-4 NOUVEAUX ACTES DE GESTION AUTORISES AU COURS DE LA PERIODE D’OBSERVATION : LES EXCEPTIONS AU PRINCIPE D’INTERDICTION POUR LE DEBITEUR DE PAYER CERTAINES CREANCES ET POUR LES CREANCIERS, D’INSCRIRE DE NOUVELLES SURETES APRES L’OUVERTURE DE LA PROCEDURE COLLECTIVE

Désormais, le débiteur (ou l’administrateur) peut, sous réserve d’obtenir l’autorisation du juge-commissaire :

  • payer le transporteur qui exerce contre l’expéditeur ou le destinataire des marchandises une action directe,
  • exercer le droit au retrait d’une créance litigieuse cédée en payant au cessionnaire le prix réel de la créance, les frais et intérêts afférents à celle-ci afin d’en être libéré,
  • constituer une sûreté réelle conventionnelle en garantie d’une créance postérieure à l’ouverture de la procédure collective.

 

II-5 DES PRIVILEGES EN CONTREPARTIE DES APPORTS « D’ARGENT FRAIS »

Les personnes qui consentent un nouvel apport de trésorerie au débiteur, peuvent bénéficier de privilège de sauvegarde ou de redressement :

  • ils sont payés, pour le montant de leur apport, par privilège après certaines créances salariales, les frais de justice de la procédure collective, les apports de trésorerie faits durant la procédure de conciliation et, en cas de liquidation judiciaire, par les créances garanties par une sûreté immobilière, mais avant toutes les autres créances,
  • par dérogation aux dispositions du code de commerce, les créances garanties par le privilège de sauvegarde ne peuvent faire l'objet de remises ou de délais qui n'auraient pas été acceptés par les créanciers.

Ces apports doivent avoir été consentis :

  • en vue d’assurer la poursuite de l’activité pour la durée de la procédure et être autorisés par le juge-commissaire dans la limite nécessaire à la poursuite de l’activité pendant la période d’observation,
  • pour l’exécution du plan de sauvegarde ou de redressement ou à l’occasion de la modification de ce plan.

Ces dispositions s’appliquent à la sauvegarde, y compris accélérée et, pour le premier de ces privilèges, à la liquidation judiciaire.

Toutefois, ce privilège ne profite pas aux :

  • apports consentis par les actionnaires et associés de la société débitrice dans le cadre d’une augmentation de capital,
  • créanciers pour des concours antérieurs à l’ouverture de la procédure collective.

 

II-6 REGIME DE LA CREANCE MAL DECLAREE

Jusque-là, le Juge commissaire qui était appelé à se prononcer sur le sort d’une créance irrégulièrement déclarée, devait prononcer le rejet de la créance ce qui conduisait à son extinction, tout comme de toutes les suretés qui la garantissaient.

Etant précisé qu’a contrario, une créance non déclarée, laquelle n’était pas opposable à la procédure, était néanmoins susceptible d’être recouvrée en cas de résolution du plan.

Désormais, à l’instar des créances non déclarées, les créances irrégulières sont inopposables à la procédure et non plus rejetées.

 

II-7 ADOPTION DU PLAN

7.1 « Parties affectées »

Désormais, dans le cadre d’une sauvegarde (même accélérée), ou d’un redressement judiciaire, le plan sera voté par les seules « parties affectées » par celui-ci, qui seront, à cet effet, regroupées par classes selon des communautés d’intérêt distinctes.

Il s’agit de :

  • créanciers dont les droits sont directement affectés par le projet de plan,
  • détenteurs de capital.

Etant précisé que L’AGS, subrogée dans les droits des salariés auxquels elle a consenti une avance pour leurs créances, n’est pas considérée comme une partie affectée.

 

7.2 Constitution des classes

*Les parties affectées sont obligatoirement divisées en classes dans les cas suivants :

  • en cas de sauvegarde accélérée,
  • si à la date d’ouverture de la procédure, l’entreprise emploie 250 salariés et réalise une chiffre d’affaires de 20 millions d’euros net (ou si elle réalise au moins 40 millions de chiffre d’affaires net),
  • lorsque l’entreprise débitrice est une société qui détient ou contrôle une autre, et que l’ensemble des sociétés concernées atteignent les seuils ci-dessus mentionnés.

En dehors des cas susmentionnés, le débiteur (ou l’administrateur), peut demander au Juge commissaire, l’autorisation de constituer des classes de parties affectées, alors même que leur constitution ne serait pas obligatoire.

*La composition des classes de parties affectées est déterminée au vu des créances et droits nés avant la date du jugement d’ouverture de la procédure.

L’administrateur judiciaire répartit, sur la base de critères objectifs vérifiables, les parties affectées en classes représentatives d’une communauté d’intérêt économique suffisante en respectant les conditions suivantes :

  • les créanciers titulaires de sûretés réelles portant sur les biens du débiteur, pour leurs créances garanties, et les autres créanciers, sont répartis en classes distinctes,
  • la répartition en classes respecte les accords de subordination conclus avant l’ouverture de la procédure,
  • les détenteurs de capital forment une ou plusieurs classes.

 

7.3 Adoption du plan

La proposition du projet de plan de sauvegarde reste à l’initiative du débiteur, les parties affectées ne pouvant proposer un plan qu’en cas de redressement judiciaire.

Les classes sont convoquées par l’administrateur pour voter le projet de plan.

Celui-ci est adopté par chaque classe à la majorité des 2/3 des voix détenues par les membres ayant exprimé un vote.

Toutefois, le vote sur l’adoption du plan peut être remplacé par un accord ayant recueilli l’approbation des 2/3 des voix détenues par des membres d’une classe.

 

7.4 Contrôle par le tribunal du plan voté par les classes

Avant d’arrêter le plan voté par les classes de parties affectées, le tribunal contrôle que :

  • les parties affectées partageant une communauté d’intérêt suffisante au sein de la même classe, bénéficient d’une égalité de traitement dans ce plan et sont traitées de manière proportionnelle à leur créance ou à leur droit,
  • le plan respecte le critère du « meilleur intérêt des créanciers » (que les parties affectées qui ont voté contre le plan ne soient pas dans une situation moins favorable, du fait du plan, que celle qui leur serait réservée soit en cas de liquidation judiciaire ou de plan de cession, soit par application d’une meilleure solution alternative si le plan n’était pas validé),
  • tout nouveau financement soit nécessaire pour mettre en œuvre le plan et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts des parties affectées.

Le tribunal peut refuser d’arrêter le plan s’il estime que celui-ci n’offre pas une perspective raisonnable d’éviter la cessation des paiements du débiteur ou de garantir la viabilité́ de l’entreprise.

 

7.5 Application forcée interclasses du plan

Désormais, le tribunal peut, sous certaines conditions, imposer un plan à des classes de parties affectées qui ont voté contre celui-ci, notamment lorsque :

  • le plan respecte les conditions d’égalité de traitement au sein des classes, du «meilleur intérêt », et de l’utilité des financements nouveaux,
  • le plan a été approuvé par une majorité de classes de parties affectées (dont au moins une est d’un rang supérieur à celui de la classe des créanciers chirographaires) ou, à défaut, il a été approuvé par au moins une classe de parties affectées (autre qu’une classe de détenteurs de capital ou toute classe dont on peut raisonnablement supposer, après détermination de la valeur du débiteur en tant qu’entreprise en activité́, qu’elle n’aurait droit à aucun paiement en cas de liquidation judiciaire ou de plan de cession),
  • les créanciers d’une classe qui a voté contre le plan sont intégralement désintéressés par des moyens identiques ou équivalents lorsqu’une classe de rang inferieur a droit à un paiement ou conserve un intéressement dans le cadre du plan,
  • aucune classe de parties affectées ne peut, dans le cadre du plan, recevoir ou conserver plus que le montant total de ses créances ou intérêts,

 

III. LIQUIDATION JUDICIAIRE

III-1 ACCES A LA LIQUIDATION JUDICIAIRE SIMPLIFIEE

La LJS s’impose lorsque les conditions suivantes sont remplies :

  • l’actif ne comprend aucun bien immobilier,
  • l’entreprise ne comprenait que 5 salariés au plus au cours des 6 mois précédant l’ouverture de la procédure,
  • le chiffre d’affaires HT était égal ou inférieur à 75 0000 € à la date de clôture du dernier exercice comptable, précédant la procédure collective.

S’agissant des débiteurs personnes physiques (tels que, les entrepreneurs individuels), la réforme prévoit désormais que la seule condition à l’ouverture d’une LJS à leur égard est, qu’ils ne possèdent pas de bien immobilier (sans prendre en compte, les seuils relatifs aux salariés ou au chiffre d’affaires).

 

III-2 ACCES AU RETABLISSEMENT PROFESSIONNEL

Le rétablissement professionnel est une procédure d’effacement des dettes du débiteur, sans liquidation de ses biens, lequel est ouvert au profit de :

  • tout débiteur, personne physique,
  • exerçant une activité commerciale, artisanale, agricole ou une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé,
  • qui est en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible,
  • lequel n’a pas cessé son activité depuis plus d’un an,
  • n’ayant employé aucun salarié au cours des 6 derniers mois,
  • dont l’actif déclaré soit inférieur à 15000 €.

Etant précisé que les biens que la loi déclare insaisissables de droit, ne sont pas pris en compte pour déterminer la valeur de l’actif (ex : résidence principale du débiteur).

 

III-3 ORDRE DES CREANCES EN LIQUIDATION JUDICIAIRE

La réforme prévoit 15 rangs de créances déterminant l’ordre dans lequel les créanciers sont payés, en fonction de la nature de leur créance et des privilèges qui y sont rattachés, qui sont les suivants :

  • les subsides dus au débiteur personne physique ou au dirigeant de la personne morale débitrice, au titre de leurs fonctions (en l’absence de rémunération spécifique),
  • les rémunérations des salariés et les indemnités de congés payés afférents,
  • les frais de justice nés régulièrement après le jugement d’ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure,
  • les sommes dues aux producteurs agricoles par leurs acheteurs,
  • les créances résultant des apports en trésorerie ou des biens ou services fournis au débiteur afin d’assurer la poursuite de son activité, dans le cadre d’une procédure de conciliation, ayant donné lieu à un accord homologué,
  • les créances garanties par des sûretés immobilières,
  • les créances de salaires dont le montant n’a pas été avancé,
  • les créances résultant d’apport en « argent frais », en vue d’assurer la poursuite de l’activité du débiteur (pendant la période d’observation ou au moment de l’exécution du plan de sauvegarde ou de redressement),
  • les créances résultant de l’exécution des contrats poursuivis et dont le cocontractant avait accepté de recevoir un paiement différé,
  • les sommes dues aux salariés dont le montant a été avancé en application des dispositions du Code du travail,
  • les autres créances, selon leur rang, lesquelles sont non soumises à l’interdiction de paiement prévue par le Code de commerce,
  • les créances de l’administration fiscale :
  • au titre des contributions directes et taxes assimilées,
  • au titre des taxes sur le chiffre d’affaires et taxes assimilées,
  • ses créances au titre des taxes départementales et communales assimilées aux contributions directes,
  • au titre des droits d’enregistrement, taxe de publicité foncière, droits de timbre et autres droits et taxes assimilés,
  • les créances garanties par un nantissement, par le privilège du bailleur et par le privilège du vendeur de fonds de commerce,
  • les créances de l’administration fiscale au titre des contributions indirectes et celles de l’administration des douanes au titre des droits, confiscation, amende et restitution,
  • les créances chirographaires, en proportion de leur montant.

 

IV. LE REGIME DES SURETES

IV-1 LA CONSECRATION DE NOUVELLES NULLITES PENDANT LA PERIODE SUSPECTE

La période dite « suspecte » est une période s’étendant de la date de la cessation des paiements et celle du jugement d’ouverture d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire.

Certains actes passés pendant cette période et portant sur les biens du débiteur pour des dettes antérieures à la procédure collective, sont nuls de plein droit. Il s’agit notamment :

  • des hypothèques (conventionnelles, judiciaires ou l’hypothèque légale des époux),
  • des gages ou nantissements.

Désormais, sont également nuls de plein droit :

  • toutes les sûretés réelles conventionnelles,
  • et tous les droits de rétention conventionnels, à moins qu’ils ne remplacent une sûreté antérieure d’une nature et d’une assiette au moins équivalentes.

Néanmoins, il sera possible de souscrire, pendant la période suspecte, une sureté par le biais d’une cession de créance professionnelle via le bordereau Dailly, si et seulement si, la cession est intervenue en exécution d’un contrat-cadre conclu et ce, antérieurement à l’ouverture de la procédure collective.

 

IV-2 INTERDICTION DE L’ACCROISSEMENT DE L’ASSIETTE D’UNE SURETE

Le jugement d’ouverture de la procédure collective interdit désormais de plein droit tout accroissement de l’assiette d’une sûreté réelle conventionnelle ou d’un droit de rétention conventionnel consenti par le débiteur, quelle qu’en soit les modalités :

  • par ajout ou complément de biens ou droits,
  • ou par transfert de biens ou droits du débiteur.

Toute disposition contraire, portant notamment sur un transfert de biens ou droits du débiteur non encore nés à la date du jugement d’ouverture, est inapplicable à compter du jour du prononcé de ce jugement.

L’exception de la possibilité de procéder à la cession d’une créance professionnelle via le bordereau Dally pendant la période suspecte, portant sur la cession intervenue en exécution d’un contre cadre conclu antérieurement à la cessation des paiements, s’applique également à cas d’accroissement de l’assistée des suretés pendant la période suspecte.

 

IV-3 AMELIORATION DU SORT DES GARANTS DU DEBITEUR

3.1. Protection des garants en cas de sauvegarde ou de redressement judiciaire

Jusque-là, les personnes physiques coobligées du débiteur ou ayant consenti une sûreté personnelle ou réelle en garantie d’une dette de ce dernier, ne pouvaient pas invoquer dans le cadre d’un redressement judiciaire :

  • l’inopposabilité des créances non régulièrement déclarées dans les délais requis et qui le restaient en cas d’exécution totale du plan par le débiteur,
  • l’arrêt du cours des intérêts pour les prêts de moins d’un an ou les contrats assortis d’un paiement différé de moins d’un an,
  • les dispositions du plan de redressement.

Ces restrictions sont désormais supprimées par la réforme à l’égard des garants susmentionnés dans le cadre d’un redressement judiciaire. Etant précisé qu’elles n’existaient pas en sauvegarde.

Le sort moins favorable des garants dans le cadre d’une liquidation judiciaire, reste toutefois inchangé.

 

3.2. Déclaration de créances par les garants

A l’instar de la caution, qui pouvait déclarer sa créance pour sauvegarder son recours personnel, les personnes physiques ou morales coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie, pourront désormais faire de même, et ce, même avant tout paiement.

 

3.3. Opposabilité de l’état des créances

Désormais, lorsqu’un coobligé ou garant du débiteur est poursuivi, l’état des créances ne lui est opposable qu’à compter de la signification de la décision d’admission de la créance par le créancier.

Etant précisé qu’il dispose d’un délai d’un mois pour former une réclamation contre cet état des créances, passé ce délai, l’état des créances a autorité de chose jugée à son égard quant à l’existence et au montant de la créance.

 

IV-4 CHARGE DES SURETES REELLES EN CAS DE PLAN DE CESSION

*En cas de plan de cession de l’entreprise, la charge des sûretés réelles spéciales, garantissant le remboursement d’un crédit consenti à l’entreprise pour lui permettre le financement d’un bien sur lequel portent ces sûretés, était transmise au cessionnaire lorsque le bien était compris dans le plan de cession, sauf convention contraire conclue entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés.

Dans ces conditions, le cessionnaire est alors tenu de régler au créancier les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de propriété ou, en cas de location-gérance, de la jouissance du bien sur lequel porte la garantie.

Etant précisé que l’obligation du cessionnaire ne vaut que si le créancier a régulièrement déclaré sa créance.

*Une fois opéré le transfert de la charge de la dette et des sûretés au cessionnaire, le débiteur et, en principe, une éventuelle caution qui s’était engagée à garantir les engagements du débiteur, sont libérés des futures échéances.

Jeudi 9 décembre 2021