OUI : cet article s’adresse plus particulièrement aux militaires ou aux fonctionnaires de l’Etat, des collectivités territoriales et des hôpitaux qui exercent à titre accessoire une activité autorisée en qualité de non titulaire auprès d’une autre collectivité ou établissement public. (Professeurs de conservatoires de musique municipaux, musiciens d’orchestres, etc.). Dans un arrêt en date du 23 avril 2012, la Cour administrative d’appel de Nancy  a jugé qu’ en retenant qu’un agent public non-titulaire que l’administration employeur avait oublié d’affilier au régime général de retraite (CNAV) et au régime de retraite complémentaire IRCANTEC avait droit au remboursement des cotisations patronales et salariales qu'il aura à acquitter en lieu et place de l'Etat, son employeur, pour la période allant du 10 juin 1971 au 31 décembre 1989, tant auprès du régime général de retraite que de l'IRCANTEC, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, qui a suffisamment motivé son jugement, n'a pas commis d'erreur de droit. De plus, si l’agent contractuel est déjà parti à la retraite, il pourra être indemnisé du préjudice constitué par le manque  à gagner sur sa retraite résultant du défaut d’affiliation à la retraite complémentaire IRCANTEC.

Voir aussi : Décision du Défenseur des  droits n° MSP-2013-122 du 21 juin 2013.

En l’espèce, il résulte de l'instruction du dossier que du 10 juin 1971, date de l'arrêté par lequel le préfet des Ardennes a nommé M. A… vétérinaire sanitaire dans le ressort de sa clientèle, au 31 décembre 1989, M. A, vétérinaire a accompli des actes de prophylaxie collective des maladies des animaux en vertu d'un mandat sanitaire dont il a été investi en application de l'article L. 215-8 du code rural, devenu depuis l'article L. 221-11 du code rural et de la pêche maritime ; que, par lettre en date du 1er mars 2007 adressée au directeur des services vétérinaires des Ardennes, il a demandé à l'Etat, d'une part, de procéder au versement des cotisations de retraite à l'URSSAF et à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) afférentes à cette activité et, d'autre part, de l'indemniser du préjudice subi du fait de l'absence de déclaration de son activité aux services sociaux et aux régimes de retraite ; qu'après le rejet implicite de sa demande, M. A a saisi le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité d'un montant total de 131 411,89 euros correspondant au préjudice qu'il estimait avoir subi du fait de ce refus de versement et d'affiliation ; que, par un jugement du 14 octobre 2010, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à M. A, dans la limite de 70 298,86 euros, une indemnité représentant les sommes qu'il aurait perçues depuis sa mise à la retraite s'il avait été régulièrement affilié au régime général de sécurité sociale et au régime de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat ; que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE, DE LA RURALITE ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE fait appel de ce jugement et demande à être déchargé de toute condamnation.   1 - En ce qui concerne le principe la responsabilité  de l’administration.

M. A, vétérinaire titulaire d'un mandat sanitaire, devait être regardé comme un agent non titulaire de l'Etat relevant du régime général de la sécurité sociale en application de l'article L.311-2 du code de la sécurité sociale ainsi que du régime de retraite complémentaire des agents publics non titulaires de l'Etat jusqu'au 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989, aujourd'hui codifiée à l'article L.221-11 du code rural et de la pêche maritime, qui assimile les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale.   Article L.311-2 du code de la sécurité sociale :

« Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient l

Il résulte de l'article R.351-11 du code de la sécurité sociale qu'il est tenu compte, pour l'ouverture du droit et le calcul des pensions de vieillesse, de toutes les cotisations d'assurance vieillesse versées pour les périodes antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, quelle que soit la date de leur versement, que le versement des cotisations afférentes à une période d'activité de plus de trois ans doit porter sur l'intégralité de la période d'activité pendant laquelle les cotisations dues n'ont pas été versées et que l'assuré est admis à procéder lui-même au versement des cotisations patronales et salariales qui auraient dû être versées par l'employeur. Il est constant que le silence gardé par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE, DE LA RURALITE ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE sur la demande dont il a été saisi par M. A en ce qui concerne le versement des cotisations de retraite dues par l'employeur au titre de l'exercice de son mandat sanitaire, a fait naître une décision de refus.

Ce refus implique que M. A procède lui-même au versement de ces cotisations, comme l'y habilitent les dispositions précitées, afin d'obtenir ses droits à la retraite.

Si le versement des cotisations n'a pas encore été effectué, le préjudice subi par M. A présente néanmoins un caractère certain. 

2 - La responsabilité de l’employeur public défaillant eu égard à son obligation d’affiliation, ne peut être partagée avec l’agent au motif qu’il n’aurait pas fait de demande d’affiliation.

Si M. A n'a pas effectué de démarches en vue de son affiliation à ces différents régimes, comme l'article R.351-11 du code de la sécurité sociale lui en donnait la faculté du fait de la carence de son employeur, il résulte de l'instruction qu'eu égard aux obligations de déclaration pesant sur l'administration, au caractère accessoire de l'activité de prophylaxie collective des animaux pour un vétérinaire comme M. A et aux modalités de versement aux intéressés des rémunérations afférentes à cette activité, qui ne permettaient pas de déceler l'absence de paiement des cotisations de retraite, le défaut de déclaration auprès des organismes de sécurité sociale ne peut lui être imputé. Par suite, le MINISTRE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a retenu l'entière responsabilité de l'Etat des conséquences dommageables qui résultent du défaut d'affiliations et de paiement des cotisations patronales relatives à son agent.

3- La prescription quadriennale de la demande d’affiliation ne commence pas à courir l’année au titre de laquelle les cotisations sont dues, mais à l'année au cours de laquelle le préjudice est connu dans toute son étendue, c'est-à-dire celle au cours de laquelle l'intéressé cesse son activité et fait valoir ses droits à la retraite.

Aux termes du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : « Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes (...) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis »

Contrairement à ce que soutient l'administration, une créance, telle que celle dont se prévaut M. A, ne se rattache pas à chaque année au titre de laquelle les cotisations de sécurité sociale sont dues mais à l'année au cours de laquelle le préjudice est connu dans toute son étendue, c'est-à-dire celle au cours de laquelle l'intéressé cesse son activité et fait valoir ses droits à la retraite.   M. A a cessé l'exercice de cette activité le 31 décembre 1989 et a obtenu la liquidation de sa retraite afférente à son activité libérale à compter du 1er mai 2006.   Ainsi, il n'a pu être à même de se rendre compte que les sommes perçues au titre du « mandat sanitaire » n'entraient pas dans les bases de liquidation qu'à cette dernière date.   Dès lors, le MINISTRE n'est pas fondé à soutenir que la créance de M. A était éteinte à la date du 1er mars 2007 à laquelle il a formé sa demande et à lui opposer la prescription quadriennale des créances. 

4 - L’employeur public défaillant peut être condamné par le juge à rembourser les cotisations que l’agent aura à acquitter pour la période rétroactivement régularisée.

Dans son arrêt en date du 23 avril 2012, la Cour administrative d’appel de Nancy  a jugé qu’ en retenant qu’un agent public non-titulaire que l’administration employeur avait oublié d’affilier au régime général de retraite (CNAV) et au régime de retraite complémentaire IRCANTEC avait droit au remboursement des cotisations patronales et salariales qu'il aura à acquitter au lieu et place de l'Etat, son employeur, pour la période allant du 10 juin 1971 au 31 décembre 1989, tant auprès du régime général de retraite que de l'IRCANTEC, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, qui a suffisamment motivé son jugement, n'a pas commis d'erreur de droit.

5 - L’agent public déjà parti à la retraite peut être indemnisé du préjudice constitué par le manque  à gagner sur sa retraite généré par le défaut d’affiliation à l’IRCANTEC.

Il résulte de ce qui précède qu'aucune faute ne peut être imputée à M. A du fait de l'absence de déclaration de son activité de prophylaxie collective des animaux durant les années 1971 à 1989.   Par suite, ce dernier a droit à la réparation de l'intégralité de son préjudice.   En l'absence de production par les parties, tant en première instance qu'en appel, des éléments nécessaires à la liquidation de la somme due à M. A, le MINISTRE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à M. A, dans la limite de 70 298,86 euros, une indemnité représentant les sommes qu'il aurait perçues depuis sa mise à la retraite s'il avait été régulièrement affilié au régime général de sécurité sociale et au régime de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat, et a renvoyé l'intéressé devant lui aux fins de liquidation de cette indemnité.   SOURCE : Cour Administrative d'Appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 23/04/2012, 10NC01933, Inédit au recueil Lebon