Le 2 décembre 2025, une proposition de loi relative à l’extension de la fiducie aux transmissions de patrimoine a été déposée à l’Assemblée nationale. Ce texte ambitieux marque une étape décisive dans l’évolution du droit patrimonial français.
AGAFI, cabinet d’avocat spécialisé en fiducie patrimoniale, se félicite de cette initiative qui répond à une demande croissante des familles, des entrepreneurs et des acteurs de la philanthropie.
1. La fiducie : un mécanisme français encore trop limité
Introduite en droit français par la loi n° 2007-211 du 19 février 2007, la fiducie est définie à l’article 2011 du Code civil comme :
« l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés (…) à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires ».
Malgré son potentiel considérable, la fiducie demeure aujourd’hui confinée à des usages professionnels (gestion d’actifs, fiducie sûreté). Elle reste inaccessible aux transmissions patrimoniales ou familiales, alors même que les évolutions sociétales appellent un encadrement plus souple, contractuel et sécurisé.
La pratique comme la doctrine réclament depuis plusieurs années l’ouverture de la fiducie au domaine successoral, familial et philanthropique, conformément aux standards internationaux.
2. Pourquoi une fiducie patrimoniale ? Trois enjeux majeurs de société
a. Protéger les personnes vulnérables
La fiducie constitue un instrument idéal pour assurer la gestion sécurisée des biens appartenant à des personnes fragiles : mineurs, majeurs protégés, héritiers dépourvus de compétences financières…
En 2023, plus de 100 000 mesures de protection juridique ont été ouvertes, soit une hausse de près de 40 % en quinze ans. Une fiducie patrimoniale offrirait une alternative contractuelle, plus légère qu’un dispositif judiciaire, tout en assurant une protection au plus près de la volonté des familles.
Cette solution est particulièrement attendue par les Français familiarisés avec le trust ou par les familles confrontées à la dépendance d’un proche. Le vieillissement de la population rend cet outil indispensable.
b. Assurer la continuité des entreprises familiales
Selon la BPI, 65 % des dirigeants de PME et ETI familiales souhaitent transmettre leur entreprise à un membre de leur famille, mais près de la moitié des dirigeants de plus de 60 ans n’ont pas formalisé de plan de succession.
Ce constat est inquiétant : 600 000 entreprises devront trouver un repreneur dans les dix prochaines années.
La fiducie permettrait :
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de confier temporairement la gestion ou la cession d’une entreprise à un fiduciaire,
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d’éviter une paralysie en cas de décès ou d’incapacité du dirigeant,
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d’assurer la pérennité économique et sociale des entreprises familiales.
c. Renforcer la philanthropie et la gestion d’actifs à but non lucratif
La fiducie patrimoniale pourrait devenir un véritable moteur philanthropique :
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transmission de biens à un fiduciaire chargé de les gérer au profit d’organismes d’intérêt général,
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respect scrupuleux de la volonté du donateur,
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transparence et traçabilité des fonds.
Chaque année, la générosité privée mobilise plusieurs milliards d’euros en France : offrir un cadre de fiducie philanthropique renforcerait la confiance des donateurs et l’efficacité des fondations et associations.
3. Une fiducie patrimoniale neutre fiscalement
La proposition de loi rappelle expressément que cette fiducie n’aurait aucune vocation d’optimisation fiscale.
Elle serait neutre et soumise au régime applicable aux transmissions traditionnelles, garantissant équité, sécurité juridique et absence de contournement fiscal.
Cette précision était indispensable pour assurer l’acceptabilité politique du dispositif.
4. Contenu de la proposition de loi
La réforme s’articule autour de quatre articles.
Article 1 – Aménagement du droit des majeurs protégés et des mineurs
Objectif : permettre la création de fiducies pour gérer le patrimoine des personnes vulnérables, dans un cadre strict, transparent et contrôlé.
Article 2 – Introduction de la fiducie-libéralité
Cet article révolutionne le droit des libéralités en autorisant une donation ou un legs en fiducie.
Il ouvre ainsi la voie à la fiducie successorale ou philanthropique.
Article 3 – Adaptation du droit commun de la fiducie
Il s’agit notamment de sécuriser, par acte authentique, la transmission du patrimoine d’une personne faisant l’objet d’une mesure de protection juridique.
Article 4 – Modifications du Code général des impôts
Objectif : sécuriser la neutralité fiscale du mécanisme et l’articuler avec les droits de mutation et l'impôt sur le revenu.
Conclusion : une réforme attendue
La proposition de loi du 2 décembre 2025 répond à des besoins sociaux, économiques et familiaux majeurs. Elle place enfin la fiducie au cœur du droit patrimonial français, dans un cadre moderne et sécurisé.
AGAFI se tient à la disposition des familles, dirigeants et investisseurs pour :
-
anticiper la mise en place de fiducies patrimoniales,
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analyser les impacts juridiques et fiscaux,
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concevoir des structures sur mesure,
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accompagner les transmissions complexes ou sensibles.

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