Par un arrêt en date du 29 septembre 2021, le Conseil d'Etat s'est prononcé sur les conditions exigées pour aboutir ou non à une condamnation de l'Etat en cas d'effets secondaires graves développés après une vaccination obligatoire.
Le Conseil d'Etat a été saisi pour annuler une décision dans laquelle une personne vaccinée contre l'hépatite B, qui a déclenché une myofasciite à macrophages diagnostiquée après la vaccination, s'est vue déboutée de sa demande de réparation contre l'Etat. Il s'agissait d'une vaccination obligatoire en l'espèce puisque la victime est un militaire et que ce vaccin est obligatoire pour les militaires.
Le Conseil d'Etat annule la décision déférée et, partant, fait droit à demande du requérant.
Cet arrêt modifie le raisonnement qui présidait jusqu'ici dans ce type de contentieux post-vaccinal, selon lequel il fallait établir le lien de causalité entre les symptômes et le vaccin. Désormais, le Conseil d'Etat exige la preuve qu'il n'y a aucune probabilité d'un lien de causalité : "il appartenait à la cour, non pas de rechercher si le lien de causalité entre l'administration d'adjuvants aluminiques et les différents symptômes attribués à la myofasciite à macrophages était ou non établi, mais de s'assurer, au vu du dernier état des connaissances scientifiques en débat devant elle, qu'il n'y avait aucune probabilité qu'un tel lien existe".
A partir de là, le Conseil d'Etat estime que l'absence de cette simple probabilité de lien de causalité peut permettre d'aboutir à une absence de condamnation de l'Etat en cas de vaccination obligatoire. S'il existe un doute ou une quelconque probabilité d'un lien de causalité, le Conseil d'Etat estime que les juridictions doivent alors retenir un lien de causalité lorsqu'on ne peut pas démontrer que les symptômes peuvent résulter d'une autre cause que le vaccin (comme par exemple les antécédents médicaux du patient) : "Il appartenait ensuite à la cour (...) de procéder à l'examen des circonstances de l'espèce et ne retenir alors l'existence d'un lien de causalité entre les vaccinations obligatoires subies par l'intéressé et les symptômes qu'il avait ressentis que si ceux-ci étaient apparus, postérieurement à la vaccination, dans un délai normal pour ce type d'affection, ou s'étaient aggravés à un rythme et une ampleur qui n'étaient pas prévisibles au vu de son état de santé antérieur ou de ses antécédents et, par ailleurs, qu'il ne ressortait pas du dossier qu'ils pouvaient être regardés comme résultant d'une autre cause que ces vaccinations".
Dans un contexte où le vaccin contre la Covid-19 est rendu obligatoire pour certains professionnels, notamment les professionnels de santé, ces derniers pourront se prévaloir utilement de cette récente jurisprudence en cas d'effets secondaires graves et anormaux postérieurs à la vaccination pour solliciter la réparation de leur préjudice découlant de ces effets. Pour échapper à une condamnation, l'Etat devra prouver qu'il n'existe aucune probabilité que ce soit le vaccin, et prouver également qu'il existait d'autres causes que le vaccin (notamment antécédents médicaux ou génétiques).
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