VICES CACHES / DROIT CIVIL / RESPONSABILITE DU VENDEUR
Le vendeur est responsable des vices cachés du véhicule qu'il a cédé, qu'il s'agisse d'un vendeur professionnel ou particulier, et d'un véhicule neuf ou d'occasion.
Notre Code Civil a posé un principe selon lequel le vendeur est responsable des défauts du véhicule qu’il a cédé ( article 1641) :
- Si ces défauts ont été cachés par lui au moment de la vente,
- Si ces défauts rendent le véhicule impropre à l’usage qui lui était destiné ou diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquis ou en aurait donné un moindre prix
Qu’il s’agisse d’un véhicule neuf ou d’occasion, et d’un vendeur professionnel ou particulier, le vendeur est responsable des vices cachés de votre voiture ou de votre moto.
Si vous décelez un vice sur votre véhicule, il ne faut pas tarder à agir.
Vous avez 2 ans pour agir en justice à compter de la découverte du vice, et en tous les cas 5 ans maximum à compter de l’achat de votre véhicule.
Avant toute chose, il vous appartient de réunir tous les éléments qui seront utiles pour prouver l’existence de ce vice, à savoir : le contrat de vente, le contrôle technique passé, un ou plusieurs devis ou factures de réparation, voir un rapport d’expertise établi par un professionnel, des éventuels témoignages de personnes ayant constaté les problèmes que vous avez rencontré avec votre véhicule.
Vous pourrez ensuite mettre en demeure votre vendeur par courrier recommandé avec accusé de réception pour :
- L’informer des défauts que vous avez constaté
- L’informer de votre intention de saisir la juridiction de ce litige
- Lui demander soit de reprendre le véhicule et de vous rembourser le prix payé ainsi que les éventuels frais occasionnés, soit de garder le véhicule et de percevoir de sa part un remboursement partiel ( une réduction du prix)
Si la réponse du vendeur n’est pas satisfaisante, vous pourrez alors saisir la juridiction compétente d’une action en garantie des vices cachés.
Comme dans la plupart des actions judiciaires, il appartient au demandeur d’avancer ses propres frais de procédure ( frais d’huissier de justice, frais d’avocat), excepté dans le cas où il bénéficie de l’aide juridictionnelle ou d’une assurance de protection juridique.
Pour savoir si vous bénéficiez d’une protection juridique, rapprochez-vous de votre ou de vos assurances pour vérifier si vous avez opté, dans le cadre des nombreuses options d’assurance, pour l’option protection juridique.
Il appartiendra à l’acheteur de convaincre la juridiction de l’existence d’un vice caché, autrement dit d’en rapporter la preuve.
Il faut donc s’attacher à démontrer :
- Que le défaut était antérieur à la vente
Il peut par exemple s’agir d’un défaut de fabrication, d’une usure anormale, ou d’un kilométrage beaucoup plus élevé qu’annoncé au compteur.
La qualité de professionnel du vendeur peut par exemple permettre de démontrer aisément que ce dernier ne pouvait pas ignorer la fausseté du kilométrage annoncé.
- Que le défaut n’était pas visible aux yeux de l’acheteur
On fera ici la différence entre un acheteur profane et un acheteur professionnel considéré comme averti pour lequel certains vices peuvent être considérés comme parfaitement apparents.
- Que le défaut est suffisamment grave
Le défaut doit avant tout diminuer la valeur du véhicule acquis.
Le Tribunal appréciera si un tel défaut est suffisamment grave, en prenant en compte l’usage auquel l’acheteur destinait son véhicule, usage qui se trouve soit diminué soit même impossible.
Les défauts légers ou qui sont simplement dus à l’usage normal du véhicule ne sont pas considérés comme des vices cachés.
C’est ainsi que la gravité du vice va être appréciée en fonction de l’ancienneté du véhicule.
Pour un véhicule récent, de petits désordres pourront constituer un vice.
Pour un véhicule plus ancien, le vice devra représenter une défaillance sérieuse.
De nombreux exemples jurisprudentiels viennent préciser quel type de défaut est jugé comme assez grave :
- Un défaut de freinage et de tenue de route rendant le véhicule dangereux
- Un moteur ou un châssis non conforme avec les conditions administratives d’homologation, un tel véhicule devant être retiré de la circulation
- Un défaut des disques de freins sur un véhicule d’occasion récent
- Un défaut d’étanchéité du toit amovible d’une voiture récente
- Un moteur défectueux
- Une fuite des injecteurs
- Une défaillance de fixation des soupapes
- Des anomalies de la direction et du régulateur de vitesse
En cas d’existence d’un vice caché, il est possible de demander à la juridiction :
- Soit la résolution de la vente : c’est-à-dire rendre le véhicule et obtenir le remboursement du prix payé ainsi que des frais occasionnés
- Soit la diminution du prix de vente : c’est-à-dire garder le véhicule et obtenir un remboursement partiel du prix de vente
En tous les cas, il est possible d’obtenir l’indemnisation de l’ensemble des préjudices que vous avez subi, qu’il s’agisse de frais de réparations, de transport ou de gardiennage, ou encore du préjudice subi du fait de la résistance abusive du vendeur, c’est-à-dire sa mauvaise foi et son acharnement à ne pas reconnaître ses torts.
Il est également aisé, en cas de victoire, d’obtenir le remboursement des frais de procédure que vous aurez du avancer pour votre procès.
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
Anaïs TARONE
Avocat à Nice
10, rue Tonduti de l'Escarène
06000 NICE
Tel : 04 93 82 87 60
Email: anaistarone.avocat@gmail.com
Thierry RUCKEBUSCH Rédacteur en chef de Lexis Veille
[21.07.2023]
La Cour de cassation, par quatre arrêts rendus le 21 juillet 2023 en chambre mixte, « consacre (…) l’existence d’un délai butoir de 20 ans qui encadre l’action en garantie des vices cachés ». Ainsi, si une personne qui découvre le défaut du bien lui ayant été vendu dispose de 2 ans pour engager une action en garantie des vices cachées, ce délai peut être suspendu lorsqu’une mesure d’expertise a été ordonnée. Cette action en garantie devant aussi être engagée et ce, dans un délai de 20 ans à compter de la vente du bien.
La garantie des vices cachés protège les acquéreurs, en imposant au vendeur professionnel ou occasionnel de livrer un bien sans défaut (dit « vice ») susceptible de compromettre l'utilisation que l'acheteur souhaite en faire. Cette garantie s’applique à un vice caché lors de la vente, l’action devant être engagée dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du défaut. Voilà ce que prévoit la législation (C. civ., art. 1641 et s.).
Mais elle ne règle pas toutes les questions qui peuvent se poser en pratique. Reste la jurisprudence, qui peut venir au secours des justiciables. Une illustration de cela a été apportée par la Cour de cassation à l’occasion de 4 décisions rendues le 21 juillet, « au centre de nombreux enjeux économiques », et qui, précise-t-elle dans un communiqué commun les accompagnant, « répondent tant aux interrogations des consommateurs, particuliers ou commerçants, qui ont découvert un défaut de fabrication et doivent connaître le temps dont ils disposent pour engager une action en réparation, qu’à celles des fabricants sur lesquels pèse une obligation de garantie ».
Pour trancher ces quatre affaires, « dans un souci d’unification de la jurisprudence », il a été décidé de réunir une chambre mixte, présidée par le premier président, et au sein de laquelle les 3 chambres de la Cour concernées par ces contentieux étaient représentées.
Deux questions était, en substance, posées au juge du droit :
- 1°) on l'a rappelé, une personne a 2 ans pour engager une action en garantie des vices cachés. Mais l’exécution d’une mesure d’expertise a-t-elle pour effet de suspendre ce délai ? Pour répondre à cette question, la Cour devait se prononcer sur la nature juridique de ce délai. S’agit-il d’un délai de « prescription », qui peut être suspendu ? ou d’un délai de « forclusion », qui lui ne le peut pas ? ;
- 2°) le délai de 2 ans dont dispose une personne pour exercer une action en garantie des vices cachés s’écoule à compter de la découverte du défaut par l’acquéreur. Mais, ce délai est-il encadré par un second délai dit « butoir » qui, lui, s’écoule à compter de la vente du bien ? De la réponse apportée à cette question découle d’autres interrogations : si ce « délai butoir » existe, quelle en est la durée ? S’agit-il du délai de 20 ans prévu à l’article 2232 du Code civil ou du délai de 5 ans prévu à l’article L. 110-4 du Code de commerce ? Par ailleurs, la vente initiale du bien est-elle toujours le point de départ de ce « délai butoir » ?
À la première question, la Cour répond que le délai de 2 ans prévu pour intenter une action en garantie à raison des vices cachés d’un bien vendu est un délai de prescription qui peut donc être suspendu, en particulier lorsqu’une mesure d’expertise a été ordonnée.
S’agissant de la seconde question, le juge de cassation précise que pour engager une action en garantie des vices cachés, l’acheteur doit saisir la justice dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du défaut affectant le bien qui lui a été vendu mais aussi dans un délai de 20 ans à compter de la vente du bien.
La Cour de Cassation explique dans son communiqué qu’elle « consacre (...) l’existence d’un délai butoir de 20 ans qui encadre l’action en garantie des vices cachés ».
Établissant ainsi « un équilibre entre la protection des droits des consommateurs, qui ne doivent pas perdre leur droit d’agir lorsqu’il découvre tardivement un vice caché » et « les impératifs de la vie économique, qui imposent que l’on ne puisse rechercher indéfiniment la garantie d’un vendeur ou d’un fabricant », la Cour apporte la même solution qu’il s’agisse d’une vente simple ou intégrée dans une chaîne de contrats, et quelle que soit la nature du bien.
Une « solution unique appliquée à différents cas de figure », donc, qui vise à « renforcer la sécurité juridique », explique-t-elle.