La compétence du juge répressif français par indivisibilité avec une infraction fondée sur la compétence personnelle de la loi pénale française. Une première ?

Réflexions sur Crim 22 août 2018, numéro 18-80848, Bulletin.

 

I.- L’espèce

Un individu de nationalité française, basé en Afrique du Nord, avait imité l’en-tête et les coordonnées d’un conseiller d’une banque française afin de donner accroire à la pretendue exécution d’un virement de 200.000,00 € à une société exploitant un casino au Maroc.

Par ce faux message électronique, le français cherchait à tromper les responsables du Casino pour les laisser croire à la régularisation d’une dette de jeu antérieure de ce même montant. 

Les faits ayant été realisés à l’étranger, il convenait d’apprecier la compétence des tribunaux représsifs afin d’en juger.

Une insutrction fut ouverte ; plainte fut déposée par la Banque française auprès de l’office central pour la repression de al grande délinquance financière (OCRGDF) relatant le faux e-mail attestant du prétendu transfert de sommes.

Les infractions de faux, usage de faux et escroquerie constituaient la prévention.

 

II.-L’intérêt de la solution en droit pénal international

Outre ces aspects procéduraux cette espèce permet de s’intérroger sur le fondement idoine permettant d’ouvrir compétence à la loi pénale française.

S’agissant des faits de faux et d’usage de faux, les conditions de recevabilité préalables à la compétence de la loi pénale franaçsie fondée sur la personnalité active (113-6 du C.P) ou passive (113-7 du C.P) doivent satisfaire à l’article 113-8 du CP (plainte de la victime et requête du ministère public).

Tel était le cas s’agissant de cette infraction. 

En revanche, s’agissant de la prévention d’escroquerie, il ressortait des faits que celle-ci n’avait pas fait l’objet d’une plainte préalable de sorte que la loi française ne pouvait reposer sur la compétence personnelle passive (113-7 C.P) pour cette infraction.

Mais la chambre d’instruction avait trouvé une parade.

Pour l’escroquerie, celle-ci avait jugé qu’il importait peu qu’il existât une absence de plainte préalable dans la mesure où la loi pénale pouvait être rattachée au terrtitoire car le prévenu avait, avant même son départ de la France, tenté de faire croire « qu’il allait disposer d’un virement de 200.000 € sur son compte lui permettant ainsi, non seulement d’apurer la dette d’un précédent séjour, mais aussi bénéficier d’une ligne de crédit supplémentaire ».

Ainsi, au vu de ces éléments, la chambre d’instruction invalidait les juges d’instruction en retenant que « le dossier de l’instruction révèle qu’il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable le fait que M.X a pu participer comme auteur à la commission, en France, de faits constitutifs d’escroquerie ».

 

En un mot, la chambre de l’instruction retenait la compétence de la loi pénale française sur le fondement de la territoritalité au sens de l’article 113-2 du Code pénal.

Poutant, la Cour de cassation ne partagea pas une telle analyse. S’en tenant strictement aux éléments constitutifs et l’e-mail frauduleux (faux et usage de faux destiné à réaliser l’escroquerie), la Cour régulatrice retint que les motifs de la chambre d’instruction étaient « impropres à établir que certains faits constitutifs du délit d’escroquerie poursuivi ont eu lieu sur le territoire de la République. ».

 

Pourtant l’arrêt déféré n’encourut pas la censure.

En effet, par substitution de motifs, la Cour régulatrice retint que la loi pénale française permettait de juger cette esroquerie realisée au Maroc car elle était indivisible de l’infraction de faux et d’usage susceptibles d’avoir été commis au préjudice de la Banque française, laquelle, de nationalité française, avait rempli les formalités de dépôt de plainte préalable relativement à l’infraction de faux.

 

Ainsi, la compétence personnelle passive (victime étant une Banque française) de la loi pénale française s’agissant des faits de faux permet d’attraire les faits d’escroquerie commis hors territoire (pour lesquelles les conditions de 113-8 n’étaient pas satisfaites) en raison de son indivisibilité avec le faux.

 

III.- Les enseignements

D’une part, l’infraction moyen et l’infraction fin sont indivisibles. Il n’y a là guère de nouveauté.

D’autre part, La loi pénale française peut étendre sa compétence d’une infraction à une autre au regard de la doctrine de l’indivisbilité. Là encore, il n’y a guère de nouveauté car une jurisprudence séculaire le permet depuis la III République (Crim 24 août 1876, Bull. crim. N°193).

Enfin et surtout, il semble que ce soit la première fois que l’indivisibilité entre une infraction A et B soit justifiée dès lors que l’infraction A permet la compétence de la loi pénale française sur le fondement non de la territorialité mais bien de la personnalité.

En effet, les faits de faux et usage se fondent sur la compétence personnelle passive de la loi pénale française de sorte qu’il fallut satisfaire les éxigences de l’article 113-8 du Code pénal.

Par lien d’indivisbilité, ils permettent de donner compétence à la loi pénale française pour juger de l’escroquerie effectuée hors du territoire en raison du lien mutuel de dépendance avec le faux et usage pour lesquelles les conditions d’application de la loi pénale française étaient satisfaites.

C’est en cela que cet arrêt importe.

 

Il semble en outre, sauf erreur, que cette solution soit novatrice de la part de la Cour de cassation.

Il convient de rester prudent en ce qu’il s’agit ici d’un arrêt de rejet. Mais à bien le lire, il semble d’une portée significative par cette nouvelle possibilité qu’il ménage.

C’est peut-être pour cela qu’il reçut les honneurs de la publication au Bulletin.

L’impérialisme de la loi pénale française a de l’avenir.

 https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000037362710&fastReqId=914430693&fastPos=1