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Observations sous Cour de cassation, chambre criminelle du 7 août 2019 (18-84.182) quant à convention d’extradition franco-européenne du 13 décembre 1957.  

 

Quid ?

 

Un citoyen moldave avait été remis à la France par la Roumanie dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen en raison d’une information judiciaire ayant cours à Metz. Apprenant cette remise, les autorités Russes sollicitèrent l’extradition du mis en cause en vertu d’un mandat d’arrêt émis mi-2017 pour des faits de « réception illégale et divulgation constituant un secret bancaire » selon la prévention Russe.

 

La chambre de l’instruction y ayant fait droit, l’exposant entreprit d’attaquer l’arrêt par plusieurs moyens, dont le second pris en sa première et seconde branche mérite l’analyse.

 

Quels moyens, quelles solutions ?

 

Sur la 1ere branche, le pourvoi arguait d’un défaut des conditions essentielles de l’existence légales de l’arrêt de la chambre d’instruction pour n’avoir pas vérifié que le quantum des peines dans l’État requis (la Russie) était supérieur à un an.    

 

La Cour régulatrice approuve l’argumentation ; elle fait ainsi obligation à la chambre d’instruction de vérifier que les conditions de l’extradition selon la convention applicable sont bien réunies. Cela implique alors de vérifier le quantum des peines même en droit étranger.

 

Il en résulte que concrètement, après réception, si cela n’a pas été fait dans sa demande par l’État requérant, il appartient à l’État requis de solliciter davantage de renseignement sur la peine encourue dans l’État demandeur. La Cour régulatrice invite donc la chambre de l’instruction a une rigueur particulière dans la motivation de son avis.

 

Sur la 2nd branche, l’exposant invoquait encore une justification insuffisante de l’avis favorable d’extradition : si l’absence de prescription avait été vérifiée en droit de l’État requérant (la Russie), au regard des qualifications fournies, tel n’avait pas été le cas s’agissant du droit de l’État requis (la France).

 

Or, la convention d’extradition européenne subordonne la régularité de l’extradition à l’absence de toute prescription dans les deux États. Dès lors, il incombait aux juges du second degré de vérifier si entre la demande Russe (21 juin 2017) et la commission des faits (7 décembre 2013), la prescription était acquise au regard du droit français ? Tel contrôle n’avait pas été effectué bien qu’il apparaissait que sous l’empire de la loi française alors applicable, la prescription délictuelle de 3 ans était acquise.

 

Partant, l’arrêt de la chambre d’instruction est doublement censuré par la Cour régulatrice en raison de cette absence de vérification pourtant imposée par la convention européenne d’extradition.

 

Il importe de noter qu’il y a là une obligation qui s’impose d’office à la chambre d’instruction, ce qui donne à penser qu’il s’agit d’une obligation de pur droit.

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Ainsi, le quai de l’horloge invite les chambres d’instruction dans le cadre de la convention européenne d’extradition à vérifier, outre la réciprocité d’incrimination, la satisfaction du quantum de la peine au regard des deux législations ainsi que l’absence d’acquisition d’aucune prescription dans les des deux pays au sens de leur propre droit national.

 

Le contrôle est exigeant : il conduit les chambres d’instructions, après s’être assuré de la régularité de la situation Russe au regard de la convention, à opérer le raisonnement suivant : si les faits s’étaient déroulés en France, qu’elle eût été la qualification, partant quel délai de prescription au regard de la loi applicable lors commission des faits, y-avait-il des actes suspensifs ou interruptifs de prescription ?

 

Cet arrêt a les honneurs d’une publication au Bulletin des arrêts de la chambre criminelle, d’information de la Cour de cassation et d’une diffusion sur son site internet.

 

Il est en conséquence promis à une large diffusion afin d’informer tant les chambres de l’instruction que les praticiens de l’extradition sur la rigueur du contrôle à effectuer.  

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