Dans le cadre de la crise sanitaire, les pouvoirs publics ont mis en place des mécanismes d’aides aux entrepreneurs.

L’un de ceux qui suscitent le plus d'intérêt est le fonds de solidarité (décret n°2020-371 du 30 mars 2020) plus connu sous le nom de « d’aide de 1500 € ».

Concernant le mois de mars 2020, cette aide est notamment conditionnée au fait :

- que l’entreprise a fait l'objet d'une interdiction d'accueil du public intervenue entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020 ;

- ou qu’elle a subi une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50 % durant la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020.

Rq : le dispositif a été reconduit pour le mois d’avril 2020 (décret n°2020-433 du 16 avril 2020).

Les professionnels libéraux peuvent bénéficier de ce dispositif. N’étant généralement pas inclus dans la catégorie des établissements recevant du public, c'est la condition liée à la perte subie sur le chiffre d'affaires qui les intéresse prioritairement.

Nous savons que les professionnels libéraux sont généralement fiscalisés sous le régime des bénéfices non commerciaux.

Pour apprécier le chiffre d'affaires qu'ils ont réalisé mensuellement, le décret a prévu une définition spécifique. Ainsi, selon le dernier alinéa de l'article 1er du décret du 30 mars 2020, « la notion de chiffre d'affaires s'entend comme le chiffre d'affaires hors taxes ou, lorsque l'entreprise relève de la catégorie des bénéfices non commerciaux, comme les recettes nettes hors taxes ».

Cette définition n'est pas toujours à l'avantage des professionnels libéraux en BNC. En effet, un professionnel libéral peut avoir facturé ses clients au cours des premiers mois de l'année 2020 et n'avoir reçu le paiement de ses factures qu’au mois de mars. Dans ce cas, il subit de plein fouet la baisse d'activité du mois de mars sans pouvoir bénéficier du fonds de solidarité car ces recettes ont été supérieurs au seuil de 50 % prévu.

Cette situation pourrait susciter un intérêt pour un autre dispositif, resté très discret depuis sa création : l'article 93 A du Code général des impôts. Ce dernier permet aux contribuables soumis au régime de la déclaration contrôlée d'opter pour la détermination de leur résultat à partir des créances acquises et des dépenses engagées au cours de l'année d'imposition (en restant à l’impôt sur le revenu).

Dans une FAQ mise à jour le 6 avril dernier, l'administration précise (paragraphe n°13) que le chiffre d'affaires est calculé en fonction des règles de comptabilité applicable aux entreprises. Pour les entreprises tenant une comptabilité commerciale, il s'agit du chiffre d'affaires facturé et comptabilisé au mois de mars selon le principe des créances acquises et des dépenses engagées. Pour les professionnels assujettis à la fiscalité sur les bénéfices non commerciaux et qui n'ont pas opté pour tenir une comptabilité en fonction des créances acquises et dépenses engagées, il s'agit des recettes encaissées diminuées des débours et des rétrocessions d'honoraires effectués en mars.

Ainsi, les professionnels libéraux au réel (déclaration contrôlée), qui ont opté pour une comptabilité en fonction des créances acquises et des dépenses engagées, peuvent faire valoir la baisse de leur facturation (créances acquises) pour bénéficier du fonds de solidarité. Pour ceux qui n'ont pas opté, et qui représentent l'immense majorité des professionnels libéraux sous le régime des BNC, la difficulté est que cette option aurait dû être exercée avant le 1er février 2020 pour prendre effet pour les revenus 2020.

Dans ces conditions, pour que les professionnels libéraux puissent avoir le choix entre le régime de l'encaissement et le régime de l'engagement, ce dernier étant, dans bien des cas, plus favorable pour l'obtention du fonds de solidarité, il conviendrait de convaincre les pouvoirs publics de l’utilité d’autoriser des options tardives pour l'article 93 A. Il s’agit peut-être d’un nouveau cheval de bataille pour nos instances représentatives ?