Lors de l’acquisition d’une maison d’habitation, il est n’est pas rare que l’acquéreur découvre l’existence de travaux et aménagements réalisés par le vendeur sans autorisations d’urbanisme. Le point sur les actions civiles possibles.
Lors de l’acquisition d’une maison d’habitation, il est possible de découvrir que certains travaux et aménagements n’ont pas fait l’objet de déclaration préalable ou de permis de construire.
Ces travaux et aménagements doivent être déclarés par le vendeur et mentionnés dans l’acte authentique.
L’acquéreur doit alors s’assurer de l’expiration du délai de prescription des actions civiles qui pourraient être intentées à son encontre par des tiers ou la commune.
En effet, les tiers peuvent agir sur le fondement de la responsabilité délictuelle (article 1240 du code civil) dès lors qu’ils justifient d’un préjudice né de la violation d’une règle d’urbanisme.
Si la règle d'urbanisme, édictée au bénéfice de l'intérêt général, est généralement conçue comme une contrainte pour le propriétaire-constructeur en ce qu'elle encadre et donc restreint son droit de construire attaché à son droit de propriété, elle est également regardée par le juge civil comme un « droit » pour le voisin.
La jurisprudence civile a ainsi progressivement admis une responsabilité délictuelle du constructeur envers le tiers subissant un préjudice du fait de la méconnaissance de la règle d'urbanisme (Civ. 1re, 9 juin 1959 : Bull. civ. I, no 291).
Tout riverain du bien immobilier peut ensuite agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage (préjudice de perte d’intimité, création de vue, perte de la valeur vénale d’une maison, perte d’ensoleillement, etc.).
Si le bien est situé dans un lotissement, il faudra également s’assurer que l’action en méconnaissance du cahier des charges du lotissement est prescrite.
On rappellera à ce sujet que, s’il est prévu depuis la loi ALUR que les règles d’urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir dans le cas où, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, une telle primauté de la règle prévue dans les documents d'urbanisme ne vaut pas devant la juridiction civile.
En effet, le juge civil persiste à considérer que quelle que soit sa date, approuvé ou non, le cahier des charges constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues (Cass. 3e civ., 18 déc. 1991, n° 89-21.046).
Cette jurisprudence bien ancrée fait pour l’heure l’objet d’une application constante par les juridictions civiles (Cass. 3e civ., 8 juill. 2014, n° 13-20.031 ; Cass. 3e civ., 21 janv. 2016, n° 15-10.566 ; Cass. 3e civ., 9 mars 2017, n°16-13.085 ; CA Paris, 4 avril 2018, n°16-06782).
Et c’est au regard de cette jurisprudence civile qu’il convient de noter que tout coloti qui a la qualité de partie au contrat (Cass. 3e civ., 4 févr. 2004, n° 02-11.409 ; Cass. civ. 3, 09-03-2017, n° 16-13.085), même qui ne détiendrait qu'un droit de jouissance sur un lot (Cass. 3e civ., 17 nov. 2004), dispose de plein droit d’une action en violation du cahier des charges.
Sans oublier qu’une telle action est recevable, même si l'infraction a été commise par l'ancien propriétaire du lot (Cass. 3e civ., 14 mars 2006).
En vertu des dispositions de l’article 2224 du code civil, ces actions civiles sont toutes soumises à la prescription de droit commun pour les travaux réalisés avant l’entrée en vigueur de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008.
Pour les travaux antérieurs à cette loi, c’est l’ancienne prescription de 10 ans qui s’applique (ancien article 2270-1 du code civil).
Pour ce qui concerne les travaux, la jurisprudence retient traditionnellement la notion d’achèvement des travaux (Cass. 3e civ., 11 mai 2000 : RD imm. 2000, p. 329 ; CA Nancy, 24 janvier 2005, JurisData n°2005-286810).
Enfin, l’article L.480-14 du code de l’urbanisme prévoit que la commune peut saisir le tribunal de grande instance en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d'un ouvrage irrégulier au regard du code de l’urbanisme.
C’est le cas en présence de travaux de création de surfaces de plancher supplémentaire ou même de changement d’usage d’un sous-sol sans travaux, même si, dans ce dernier cas, les poursuites s’avèrent difficiles en pratique.
En présence de travaux ou de changement d’usage effectués sans autorisation, la commune peut exercer l’action civile prévue par l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme.
Cet article précise que cette action civile de la commune se prescrit par dix ans à compter de l'achèvement des travaux.