L’exécution provisoire serait selon certains pleine de vertus. A tel point qu’elle est désormais devenue la règle. Ainsi, aujourd’hui et sauf exception, lorsqu’un juge rend une décision, celle-ci est exécutoire, même en cas d’appel…

Pourtant il arrive (régulièrement) que la cour d’appel réforme un jugement.

Qui devra alors réparer les conséquences (souvent dommageables) de l’exécution provisoire?

Qui devra restituer la somme (avec ses intérêts, les frais de saisies etc) ?, qui devra remettre en état le terrain ? qui devra assumer les conséquences de cette exécution provisoire qui sont parfois très lourdes ?

Nul doute que l’idée de la responsabilité de l’état fera son chemin chez de nombreux confrères.

Mais en l’état de la jurisprudence, la réponse est très claire et la Cour de Cassation l’a rappelé dans un arrêt du 30 janvier 2020 :

« l’exécution d’une décision de justice exécutoire à titre provisoire n’a lieu qu’aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge par lui, si le titre est ultérieurement modifié, d’en réparer, même en l’absence de faute, les conséquences dommageables  »

Dans le cas d’espèce, la Cour de Cassation casse l’arrêt d’appel pour avoir rejeté la demande au motif de l’absence de faute de celui qui avait poursuivi l’exécution…

« Qu’en statuant ainsi, alors que l’existence d’une faute n’était pas une condition de l’indemnisation sollicitée, la cour d’appel a violé le texte susvisé »

Le cadeau est donc trop beau…et la sanction terrible… une responsabilité sans faute pour celui qui poursuit l’exécution provisoire.

Ainsi l’état n’est pas responsable des décisions rendues…puisqu’il existe une voie de recours.

Seul celui qui poursuit l’exécution provisoire est responsable…et ce même en l’absence de faute de sa part.

Ce principe plusieurs fois répété par la Cour de Cassation doit inviter à la plus grande prudence dans l’utilisation de l’exécution provisoire dont la généralisation générera sans nul doute une augmentation sensible des contentieux sur le sujet, ainsi que l’allongement des affaires, puisqu’après avoir fait réformer la décision, il faudra poursuivre pour la réparation des préjudices liés à l’exécution provisoire…

La décision rendue par la Cour de Cassation en ce début 2020 en est un bel exemple puisque l’ordonnance de référé dont l’exécution a été poursuivie remonte à 2010…

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 30 janvier 2020, 18-25.305, Inédit

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000041551248&fastReqId=1279888449&fastPos=1