Pourquoi dois-je envisager une expertise judiciaire ?
Il est souvent difficile pour l'avocat de faire comprendre à celui qui vient le consulter en lui expliquant :
- que la maison qu'il a acquise/fait construire subit des désordres,
- qu'il les a fait constater par son expert d'assurance / expert technique / huissier,
- qu'il en connaît désormais les causes et qu'il a obtenu des devis chiffrant le coût des travaux de reprise,
que, pour engager la responsabilité du constructeur/vendeur/ ou toute autre personne, il est indispensable de solliciter au préalable la désignation d'un expert judiciaire qui aura pour mission de constater les désordres, de les décrire, d'en définir les causes et de chiffrer les travaux de reprise.
C'est d'autant plus difficile que les frais de l'expertise judiciaire, qui restent importants, sont à la charge du demandeur et que ce n'est qu'à l'issue de l'expertise, et si une action en responsabilité est envisageable, qu'il sera possible d'en solliciter le remboursement.
Pourtant l'expertise judiciaire est en effet indispensable.
C'est parce qu'elle sera contradictoire aux personnes contre qui l'action au fond sera envisagée par la suite.
En effet, il existe en droit le principe du contradictoire qui signifie que les éléments à l'appui des prétentions des parties doivent être communiqués et discutés.
C'est ainsi que tout rapport, même non contradictoire, peut valoir à titre de preuve dès lors qu'il est soumis à la libre discussion des parties.( Cass. Civ 3ème, 24 février 1988, 86-18.426)
Toutefois, la Cour de cassation affirme sans discontinuité désormais qu'aucune condamnation ne peut intervenir sur la base exclusive d'un rapport non contradictoire. Cass. Civ 24 février 1988, 86-18.426 / Cass. Civ 3ème, 27 mai 2010, 09-12.693
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"Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui s’est fondée exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée unilatéralement à la demande de l’une des parties et qui n’est corroborée par aucun autre élément de preuve, a violé les textes susvisés.
Cass. Civ 3ème, 2 mars 2017, 16-13.337"
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Pour appuyer une demande de condamnation au titre de la réparation de désordres, il faut donc pouvoir démontrer que ces désordres ont été constatés par les parties et que les modalités et le coût des réparations ont été discutés entre elles.
L'expertise contradictoire peut résulter d'une réunion qui a eu lieu, à l'amiable, en présence d'un expert d'assurance ou d'un huissier.
Dans la grande majorité des cas, les défendeurs ne se présentent pas aux réunions organisées par des experts d'assurance. Ils n'en ont d'ailleurs aucune obligation.
L'expertise judiciaire a ainsi cet avantage d'être contradictoire du seul fait de son existence. Ainsi, même si les parties ne se présentent pas aux réunions de l'expert judiciaire, étant donné qu'elles y sont convoquées officiellement et que l'ensemble des documents leur sont adressés, les conclusions de l'expert leur sont opposables.
Ce n'est bien sûr pas évident à comprendre pour les personnes victimes dont la volonté est de pouvoir réparer rapidement les désordres qu'ils subissent.
C'est toutefois indispensable pour toutes ces raisons.
En cas d'urgence, de péril imminent, il existe toutefois des solutions qui peuvent être mises en oeuvre pour accélérer le dénouement du litige :
- l'expert judiciaire peut autoriser les parties à mettre en oeuvre les travaux de reprise en cours d'expertise et aux frais avancés de qui il appartiendra
- l'octroi d'une provision peut être sollicitée en cours d'expertise ou au dépot du rapport d'expertise judiciaire en cas d'abscence de contestations sérieuses
- l'assignation au fond peut être délivrée selon une procédure dite à bref délai après en avoir été autorisé, en cas d'urgence, par le Président du Tribunal.
Il convient donc d'être prudents et de veiller à réunir les preuves suffisantes avant d'engager une action au fond.
Il est donc nécessaire de consulter un avocat avant d'engager des travaux de reprise de désordres afin de vérifier si les éléments existants permettent d'engager une action en responsabilité contre les responsables de ce désordre.
Vous indiquez "l'expert judiciaire peut autoriser les parties à mettre en oeuvre les travaux de reprise en cours d'expertise et aux frais avancés de qui il appartiendra".
J'imagine que cette autorisation doit se faire par écrit , avec accord des parties, que l'expert doit également vérifier le bien fondé du devis et du métrage. et qu'il doit y en avoir une trace dans la note d'étape.
L'expert doit elle en informer le juge?
Trouvez vous régulier alors que la note d'étape ne signalait aucune urgence ou dangerosité, la note d'étape n'abordant tout simplement pas le trouble, que celui ci ait disparu avant son expertise; l'expert indiquant avoir donné son accord a travaux réparatoires alors qu'il n'y en aucune trace nul part...?
Merci pour votre retour.
Cordialement.