Par un arrêt du 4 mai 1987, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que :

 

 

 « L’indemnisation d'une victime d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ne peut être fondée que sur les dispositions de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 à l'exclusion de celles des articles 1382 et suivants du Code civil ». [1]

 

 

L’article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 dispose que :

 

 

« Les dispositions du présent chapitre s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres ».

 

 

L’article 6 de ladite loi ouvre également le droit aux victimes par ricochet d’obtenir la réparation du préjudice qu’elles ont subi du fait des dommages causés à la victime directe d’un accident de la circulation.

 

 

  • Sur la notion d’implication de plusieurs véhicules en cas d’accidents complexes

 

 

Selon une jurisprudence constante, un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation « dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa réalisation ». [2]

 

 

Il est également admis que : « est impliqué, au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, tout véhicule qui est intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la survenance de l'accident ». [3]

 

 

L’accident complexe est quant à lui défini comme des « collisions successives intervenus dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu ». [4]

Dans le cadre d’accidents complexes, il est constant que la victime (ou ses ayants-droit) peut demander l’indemnisation des préjudices subis à l’assureur de l’un quelconque des véhicules impliqués.

 

 

A ce titre, la jurisprudence retient une acception très étendue de la notion d’implication.

 

 

A titre d’illustration, la Cour de cassation considère qu’un véhicule à l’arrêt, heurté par une victime elle-même projetée par un autre véhicule, est impliqué dans l’accident. [5]

 

 

Il a également été jugé que trois véhicules, qui étaient venus s’encastrer dans une dépanneuse à l’arrêt, étaient tous impliqués dans l’accident subis par la dépanneuse, quand bien même le dernier des ces trois véhicules n’avait causé que de légers dégâts matériels. [6]

 

 

Toujours dans le cadre d’un accident complexe, la jurisprudence a déjà estimé qu’un véhicule était impliqué alors même qu’il n’avait pas été en contact avec la victime [7]ou quand bien même il n’avait joué aucun rôle perturbateur. [8]

 

 

De même, la Cour de cassation retient que : « dans un accident complexe, la victime est en droit de demander l'indemnisation de son préjudice à l'assureur de l'un quelconque des véhicules impliqués, même si elle n'a pas été en contact avec celui-ci ». [9]

 

 

La Cour d’Appel de Paris a encore récemment jugé que :

 

 

« Sur ce, au sens de l'article 1er de la loi nº 85-677 du 5 juillet 1985, un véhicule terrestre est impliqué dans un accident de la circulation dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa réalisation.

 

Une telle implication dans l'accident, qui n'est pas subordonnée à une implication dans le dommage, est nécessairement établie lorsque le véhicule a été heurté, qu'il soit à l'arrêt ou en mouvement.

 

Enfin, en cas d'accident complexe, caractérisé par l'existence de collisions successives survenues dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu, tous les véhicules sont impliqués dans le processus accidentel envisagé de manière globale.

 

Dans une telle occurrence, la victime ou ses ayants droit ont le droit de demander l'indemnisation de leur préjudice à l'assureur de l'un quelconque des véhicules impliqués (…).

 

Au vu des données qui précèdent, il est établi que les collisions successives entre la victime et les véhicules qui l'ont percutée sont survenues dans un même laps de temps, de quelques minutes tout au plus, et dans un enchaînement continu, ce dont il résulte qu'il s'agit d'un accident complexe et unique dans lequel étaient impliqués le véhicule Peugeot 5008 assuré auprès de la société Gan et le véhicule Citroën C3 assuré après de la société Carma, peu important que les lésions ayant entraîné le décès de [A] [J], médicalement constaté après le processus accidentel le [Date décès 13] 2017 à 1h55, aient été provoquées par le premier véhicule, par le second, ou par l'action conjuguée des deux ». [10]

 


[1] Cour de Cassation, Chambre civile 2, du 4 mai 1987, 85-17.051

[2] Civ. 2e, 15 mai 1992, n°90-20.322. ; Civ. 2e, 16 janv. 2020 n° 18-23.787 ; Civ. 2e, 2 mars 2017, 16-15.562

[3] Cass.2e Civ. 6 janvier 2000 n° 97-21.360

[4] Cass. Crim. 3 mai 2017 n°16-84.485 ; Cass. 2e Civ. 17 janvier 2019 n°18-11.320 et 18-11.440 ; Cass. 2e Civ. 15 déc. 2022 n°21-11.423

[5] Cass.2e Civ. 6 janvier 2000 n° 97-21.360 et 24 février 2000 n° 98-18.448

[6] Cass. 2e Civ. 24 juin 1998 n° 96-20.575

[7] Cass. 2e Civ. 11 septembre 2014 / n° 13-22.104

[8] Cass. 2e Civ. 29 mars 2018 n° 17-10.976 et n° 17-11.198

[9] Cass. 2e Civ. 15 décembre 2022 n°21-11.423

[10] CA Paris 29 février 2024 n°22/00824