L’article L.8251-1 du Code du travail pose le principe selon lequel il n’est pas possible pour un employeur d’embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France.
Le non-respect de cette interdiction peut entraîner des sanctions administratives et pénales pour l’employeur, notamment, de la part de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) qui sollicitera alors le recouvrement d’une contribution spéciale.
La jurisprudence administrative étant venue préciser que dès qu’est employé un ressortissant étranger sans titre de séjour, la contribution spéciale dû à l’OFII est automatique et peut seulement être amoindrie par le juge administratif sans être annulée peu importe les circonstances de faits (CAA de PARIS, 7ème chambre, 31 décembre 2018, 17PA03875, Inédit au recueil Lebon).
Cependant, la pratique est tout autre : un grand nombre de ressortissants étrangers non munis de titre de séjour sont salariés et bon nombre d’embauche est réalisé en faisant abstraction de cette interdiction.
La réalité de la pratique : le travail des salariés en situation irrégulière
Ce constat est admis par les institutions administratives ainsi que le pouvoir réglementaire, lesquels, dans le cadre d’une admission exceptionnelle au séjour telle que prévue par l’article L.431-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et droit d’asile, font de l’exercice d’une activité salariée même non déclarée un motif exceptionnel pouvant justifier une régularisation administrative.
La question centrale demeure de déterminer si un salarié étranger non détenteur d’un titre de séjour en cours de validité dispose des mêmes droits qu’un salarié en situation régulière.
L’article L.8252-1 du Code de travail précisant d’ailleurs que :
« Le salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 est assimilé, à compter de la date de son embauche, à un salarié régulièrement engagé au regard des obligations de l'employeur définies par le présent code ».
Ainsi, le salarié étranger en situation irrégulière est donc considéré comme un salarié régulièrement engagé.
Il est donc censé bénéficier de presque tous les droits du salarié dit « ordinaire » mais il convient de préciser quels sont ces droits, notamment, durant ladite période de travail et en cas de licenciement.
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Comme le précise l’article L.8252-2 du Code du travail, le salarié étranger a le droit durant la période d’emploi illicite au paiement de l’intégralité de son salaire et des accessoires.
Dès lors, le salarié étranger fusse-t-il sans papier dispose d’un droit au versement de son salaire et sa situation irrégulière ne l’empêche pas de saisir le Conseil des prud’hommes afin de solliciter le respect par son employeur de ses obligations légales et contractuelles.
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Il est important de noter que dans le cadre d’un licenciement, conformément à l’article L.8252-2 du Code du travail, les sommes dues au salarié, à défaut de preuve contraire de la part de l’employeur, correspondent à une relation de travail présumée d’une durée de trois mois à moins que l'application des règles relatives aux indemnisations compensatrices ou des stipulations contractuelles correspondantes ne conduisent à une solution plus favorable.
Le juge va lui-même déterminer quelle solution est la plus avantageuse pour le salarié sans titre de séjour.
Il a ainsi été jugé :
« Après avoir exactement retenu que lorsque l'étranger employé sans titre de travail l'a été dans le cadre d'un travail dissimulé, il bénéficie soit des dispositions de l'article L. 8223-1 du code du travail, soit des dispositions des articles L. 8252-1 à L. 8252-4 du même code si celles-ci lui sont plus favorables, la cour d'appel a estimé que le cumul des sommes allouées par elle à titre de rappel de salaire et d'indemnité forfaitaire de rupture en application de l'article L. 8252-2 du code du travail était plus favorable au travailleur étranger que l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé prévue à l'article L. 8223-1 du même code. » (Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2020, 18-24.982, Publié au bulletin).
De plus, l’article L.8252-2 du Code du travail est catégorique : outre le droit à une indemnité de licenciement, le salarié étranger peut demander en justice une indemnisation supplémentaire s'il est en mesure d'établir l'existence d'un préjudice non réparé au titre de ces dispositions.
Il est de jurisprudence constante et établie que :
« le fait pour un travailleur étranger de fournir un faux titre de séjour lors de son embauche ne constitue pas une faute grave de nature à le priver des indemnités de licenciement et de préavis prévues par l'article L. 8252-2 du code du travail ; qu'à supposer qu'elle se soit fondée sur la faute grave du salarié résultant de la production d'un faux titre de séjour pour rejeter les demandes d'indemnités de licenciement et de préavis formées sur le fondement de l'article L. 8252-2 du code du travail, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, et, par refus d'application, l'article L. 8252-2 du code du travail dans sa version applicable » (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 février 2014, 12-19.214, Publié au bulletin).
Dès lors, un étranger ayant fourni un faux titre de séjour lors de son embauche bénéficie du droit aux indemnités de licenciement.
Plus généralement, le fait de ne pas avoir mentionné le caractère irrégulier de son séjour n’est pas constitutif d’une faute grave.
D’un point de vue procédural, dès lors que le salarié étranger est en situation irrégulière, les règles relatives à la procédure de licenciement ne lui sont pas applicables. L’employeur peut donc mettre fin au contrat sans, au préalable, convoquer le salarié à un entretien afin de recueillir ses éventuelles observations.
Il peut donc simplement, pour acter la rupture, adresser au salarié une simple lettre de licenciement dans laquelle il invoque la situation irrégulière de l’étranger comme la cause de la fin des relations contractuelles (Cour de Cassation, Chambre sociale, 29 janvier 2008, 06-44983).
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Me Grégoire HERVET – EXILAE Avocats
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