Deux mois, voila le délai laissé par l’article 909 du code de procédure civile à l’intimé devant la Cour d’Appel dans les matières avec représentation obligatoire pour répliquer aux conclusions de l’appelant et, le cas échéant, former appel incident, sauf à ce que cet intimé puisse bénéficier de l’allongement de ce délai du fait de son éloignement du territoire métropolitain.
Ce délai pose un certain nombre de questions auxquelles les Cours d’Appel ont actuellement à répondre, notamment depuis le début de l’année 2013. Les arrêts dont les attendus significatifs sont reproduits ci-après apportent un éclaircissement tant sur le point de départ du délai en cas de demande d’aide juridictionnelle présentée par l’appelant (CA Caen 21 février 2013), que sur la compétence unique du Conseiller de la mise en état pour apprécier ce délai (Bordeaux 28 février 2013), le pouvoir d’appréciation de ce dernier (Bordeaux, 6e chambre civile, 26 Février 2013), enfin, sur l’étendue de la sanction dans les procès multi parties (Cour d'appel, Poitiers, 3e chambre civile, 27 Février 2013).
Le principe très strict dégagé par la Cour d’Appel de BORDEAUX le 26 février dernier mérite tout de même peut être la prise en considération d’éléments extérieurs à la partie elle-même qui l’auraient paralysés dans l’expression de son appel incident. Les éléments constitutifs de la force majeure pourraient être la seule planche de salut pour l’intimé dont le délai de l’article 909 du code de procédure civile serait dépassé et qui lui permettraient tout de même d’exprimer celui-ci sans risquer l’irrecevabilité de cet appel incident. La cause étrangère déjà évoquée dans d’autres articles ne peut non plus être ignorée.
La Cour d’Appel de POITIERS confirme le morcellement des conclusions qui peuvent conserver toute leur efficacité à l’égard d’une partie auxquelles elles ont été valablement dénoncées et la perdre à l’égard d’une autre. Cet arrêt, de façon induite, appelle les auxiliaires de Justice en cause d’appel à une grande vigilance tandis que toutes les parties n’auraient pas comparu. Dans ce cas, il appartient à l’intimé de dénoncer son appel incident à la partie défaillante contre laquelle il l’émet dans le délai de l’article 911 du code de procédure civile, sous peine d’irrecevabilité. Il ne peut se contenter de le dénoncer aux seules parties dûment représentées.
Le principe de l’irrecevabilité des conclusions : Cour d'appel, Pau, 1re chambre, 27 Février 2013 – n° 12/00261
«En l'espèce, les appelants ont bien conclu dans le délai de l'article 908 susvisé qui expirait le lundi 19 avril 2012 et notifié leurs conclusions par le RPVA à cette même date à l'avocat de M. H qui ne conteste pas que ces conclusions lui ont été régulièrement notifiées puisqu'il n'a fait parvenir aucune observation écrite.
L'intimé disposait donc d'un délai jusqu'au 19 juin 2012 conformément à l'article 909 pour déposer ses conclusions au greffe.
Or, il les a déposées le 16 janvier 2013 soit postérieurement au délai qui lui était imparti et dès lors ces conclusions doivent être déclarées irrecevables.»
AJ et point de départ du délai : Cour d'appel, Caen, 3e chambre civile, 21 Février 2013 – n° 12/02371
«3) le dépôt de ses conclusions par monsieur C. n'a nullement fait courir pour madame H. le délai de deux mois prévu à l'article 909 du code de procédure civile pour le dépôt, à peine d'irrecevabilité, de ses conclusions par l'intimé.
En effet ce texte, faisant référence au dépôt par l'appelant de ses conclusions, tel que prévu à l'article 908 du code de procédure civile , il résulte des dispositions de l'article 38 - 1 du décret n° 91-266 du 19 décembre 1991 qu'en présence d'une demande d'aide juridictionnelle de l'appelant, elles se substituent à celles de l'article 908 du code de procédure civile , le point de départ du délai pour conclure de l'intimé étant repoussé à la date de dépôt de ses premières conclusions par l'appelant, avant l'expiration du délai prévu à l'article 908 du code de procédure civile , dont le point de départ est fixé suivant les règles énoncées à l'article 38-1 du décret n° 91-266 du 19 décembre 1991.»
La compétence du CME & le renvoi à la mise en état : Cour d'appel, Bordeaux, 1re chambre civile, section B, 28 Février 2013 – n° 11/01659
«Aux termes de l'article 911-1 alinéa 2 du code de procédure civile , la caducité de la déclaration d'appel en application des articles 902 et 908 du code de procédure civile ou l'irrecevabilité des conclusions en application des articles 909 et 910 sont prononcées par ordonnance du conseiller de la mise en état qui statue après avoir sollicité les observations écrites des parties.
L'article 914 du même code précise que le conseiller de la mise en état est, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, seul compétent pour prononcer la caducité de l'appel, pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel ou pour déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910 ;
que les parties ne sont plus recevables à invoquer la caducité ou l'irrecevabilité après son dessaisissement, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement.
Dans le cadre de la procédure de déféré ne peuvent être dévolus à la cour que des points sur lesquels le magistrat de la mise en état a statué.
En l'espèce l'ordonnance du magistrat de la mise en état déférée à la cour ne s'est prononcée que sur la recevabilité des conclusions de l'intimée, après avoir écarté dans ses motifs une exception de nullité de l'acte de signification des conclusions d'appelant en date du 22 juin 2011.
La décision de la cour prononçant la nullité de cet acte de signification et infirmant l'ordonnance qui a déclaré irrecevables les conclusions de l'intimée, n'a pas dessaisi le magistrat de la mise en état, qui demeure en conséquence seul compétent, en application des textes susvisés, pour se prononcer sur la caducité de la déclaration d'appel.
Il convient donc de faire droit à la demande de renvoi de l'affaire devant le magistrat chargé de la mise en état.»
L’absence de pouvoir d’appréciation du CME : Cour d'appel, Bordeaux, 6e chambre civile, 26 Février 2013 – n° 12/03892
«Attendu que l'article 909 du code de procédure civile indique que l'intimé dispose à peine d'irrecevabilité relevée d'office d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour conclure et former le cas échéant appel incident' ;
Attendu que le juge ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation, et ne peut que constater l'irrecevabilité ;»
Irrecevabilité partielle des conclusions : Cour d'appel, Poitiers, 3e chambre civile, 27 Février 2013 – n° 11/04395
«Attendu que la société B fait valoir que l'appel incident de la compagnie d'assurances M lui ayant été signifié le 25 avril 2012, un nouveau délai de deux mois lui était imparti en application de l'article 910 alinéa 1du code de procédure civile
Attendu que les conclusions notifiées par la société B le 1er juin 2012 soit plus de deux mois après la notification des conclusions de l'appelante principal, sont irrecevables à l'encontre de la société L en application de l'article 909 du code de procédure civile , mais que les mêmes écritures, notifiées moins de deux mois après les conclusions de la compagnie sont recevables, mais seulement à l'encontre de l'auteur de l'appel incident ; qu'en conséquence l'ordonnance déférée sera partiellement réformée.»
Maître Alexis Devauchelle
Avocat à la Cour, Ancien Avoué
16 rue de la République
45000 ORLEANS
tel. 02 38 53 55 77
fax 02 38 53 57 27
mail : scp.desplanques.devauchelle@wanadoo.fr
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