Les règles récentes imposées en matière de communication électronique via le « Réseau Privé Virtuel Avocat » (alias RPVA) dans les matières avec représentation obligatoire troublent quelque peu les pratiques en matière de dénonciation des conclusions entre avocats.
Or, les conséquences d’une irrégularité en la matière sont particulièrement graves au regard des sanctions prévues par le décret Magendie du 9 décembre 2009 tandis que c’est soit la caducité de la déclaration d’appel soit l’irrecevabilité des conclusions qui est encourue.
Il convient donc que les conclusions soient soigneusement dénoncées conformément aux règles applicables et qu’il puisse être justifié d’une telle dénonciation.
Il convient d’abord de rappeler les règles applicables telles qu’issues du code de procédure civile.
Selon l'article 672 du code de procédure civile relatif à la notification entre avocats, la signification est constatée par l'apposition du cachet et de la signature de l'huissier de justice sur l'acte et sa copie avec l'indication de la date et du nom de l'avocat destinataire.
Selon l'article 673, également relatif à la notification entre avocats, la notification directe s'opère par la remise de l'acte en double exemplaire à l'avocat destinataire, lequel restitue aussitôt à son confrère l'un des exemplaires après l'avoir daté et visé.
En pratique, la dénonciation se faisait donc soit par voie d’acte du Palais par l’intermédiaire d’un Huissier de Justice soit directement à l’avocat constitué contre émargement.
Des arrêtés des 23 décembre 2010 (JORF du 29 décembre 2010), 30 mars 2011 (JORF 31 mars 2011) et 18 avril 2012 (JORF n°0109 du 10 mai 2012) sont venus compléter et complexifier le dispositif.
L’objectif du RPVA visé par ces arrêtés est de permettre des échanges dématérialisés d’actes de procédures, ainsi que l’énoncent d’ailleurs également les articles 748-1 et 930-1 du code de procédure.
Cependant, il faut se garder de croire que tout échange d’acte est désormais possible et autorisé par cette voie.
Devant les Cours d’Appel, et à compter du 1er septembre 2011, l’arrêté du 30 mars 2011 a précisé que seules les déclarations d’appel et les constitutions d’avocat devaient être effectués par voie électronique (articles 2 et 3).
A cet égard, les avoués ont fait les frais du processus de dématérialisation au second degré, devant s’équiper pour effectuer ces actes pour les quatre derniers mois de leur existence professionnelle pour certains (la Loi du 25 janvier 2011 portant modification des règles de représentation en cause d’appel – et suppression de la fonction d’avoué à la Cour- étant entrée en vigueur dès le 1er janvier 2012).
L’arrêté du 18 avril 2012 a ensuite expressément énuméré les Cours d’Appel devant lesquelles les conclusions des avocats devaient également être dénoncées par voie électronique via le RPVA.
Ainsi, s’il ressort des articles 2 et 4 de l'arrêté du 18 avril 2012 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel, qu'entre auxiliaires de justice, les conclusions peuvent être remises par voie électronique, que celles-ci sont communiquées en pièce jointe d'un message électronique, que la réception de ce message génère un avis de réception à destination de ses expéditeurs et que cet avis tient lieu de visa par la partie destinataire au sens de l'article 673 précité, il résulte de l'article 5 du même arrêté que ces dispositions ne sont applicables qu’à un nombre limité de Cours d'appel, expressément énumérées à savoir : Agen, Aix, Dijon, Douai, Grenoble, Lyon, Reims, Rennes, Toulouse et Versailles.
En l'état actuel des textes réglementaires, concernant les Cours d’Appel exclues de l’application de l’arrêté du 18 avril 2012, la notification des conclusions entre avocats ne peut s'opérer que par la signification de l'article 672 ou par la notification directe de l'article 673, à l'exclusion d'une communication par voie électronique.
La Cour d’Appel de PARIS a déjà entériné cette analyse (CA PARIS Chambre 1 pôle 3 Ordonnance du 19 juin 2012 de M. le Président CHAUVIN RG 11/19258).
Il semble que le Législateur, par la multiplicité des textes qu’il a édicté sur cette question, a laissé des différences d’application considérables des règles se perpétuer sur le territoire de la République au détriment non seulement du principe d’Egalité des citoyens devant la Loi, mais encore de la sécurité juridique minimale que ces mêmes citoyens sont en droit d’attendre de la part de l’institution judiciaire.
Il faudra attendre le 1er janvier 2013 pour que cette anomalie ne soit plus qu’un (mauvais) souvenir…
Mais d’ici là, il convient de bien vérifier les règles applicables, au risque sinon de connaître de graves déboires tandis que la juridiction d’appel devra se considérer non valablement saisie de conclusions n’ayant pas été valablement dénoncées et appliquer d’office les sanctions idoines précitées.
Maître Alexis Devauchelle
SCP DESPLANQUES & DEVAUCHELLE
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