Il est entendu qu’une partie mécontente d’un jugement rendu en premier ressort à son égard peut en interjeter appel dans les délais légaux, afin de saisir la Cour d’Appel de ses arguments, voire de développer de nouveaux moyens et produire de nouvelles pièces.

L’article 546 du code de procédure civile énonce que le droit d’appel appartient à toute partie, si elle n’a pas renoncé.

Mais la partie adverse peut alors également, si le Tribunal n’a pas fait intégralement droit à ses prétentions, à son tour former un appel incident et tenter de faire le plein de ses demandes initiales.

A cet égard, l’article 548 du même code édicte que l’appel peut être incidemment relevé tant contre l’appelant que contre les autres intimés et qu’il peut également émaner, aux termes de l’articles 549, de toute personne même intimée, ayant été partie en première instance.

 

Ce qui paraît simple a été considérablement complexifié par le décret du 9 décembre 2009 et la jurisprudence récente de la Cour de Cassation.

 

Tout particulièrement, par un arrêt du mois de mai 2013, la Cour de cassation a notablement affaibli les possibilités d’introduire et de maintenir un appel incident (Civ. 2ème 13 mai 2015 pourvoi n°14-13.801).

En vertu de cet arrêt, la Cour de cassation a paralysé l’appel incident, pourtant valablement formé par la partie intimée, dès lors que l’appel principal avait été jugé caduc.

Pour faire simple, le tronc principal que constituait l’appel, une fois coupée, ne pouvait pas laisser survivre la branche que constituait l’appel incident qui s’y était greffé. Sans l’écrire aussi explicitement, la Cour de cassation retient ainsi que la caducité de l’appel principal s’étend à la procédure d’appel toute entière, nonobstant l’appel incident correctement formé antérieurement.

 

La réponse peut paraître simple et comme allant de soi, mais ce faisant la Cour de cassation rejette totalement l’appel incident qui pourtant, dès lors qu’il est formé dans le délai d’appel, vaut à son tour appel principal.

 

La Cour de cassation estime en effet que « lappel incident, peu importe quil ait été interjeté dans le délai pour agir à titre principal, ne peut être reçu en cas de caducité de lappel principal ». Elle valide la position de la Cour d’Appel qui avait considéré qu’elle ne pouvait pas être saisie de l’appel incident alors que la caducité de l’appel principal avait été prononcée.

 

La seconde chambre de la Cour de cassation apparaît là mettre un sérieux bémol à son interprétation extensive de l’alinéa premier de l’article 550 du code de procédure civile en vertu de laquelle l’appel incident est recevable s’il a été formé dans le délai qu’avait l’intimé pour agir à titre principal (cf. notamment Civ. 2ème 26 nov. 1980 pourvoi n°79-14149, 7 décembre 1994 pourvoi n°92-22110, Com. 11 juin 2002 pourvoi n°99-12854).

Cet appel incident est pourtant validé par la doctrine comme valant appel principal et se suffisant à lui-même, n’étant incident que par sa forme.

 

Il sera relevé par l’auteur que la position adoptée le 13 mai dernier est curieusement en opposition avec celles exprimées dans le cadre de l’avis n°15003 du 9 mars 2015 tant par le rapporteur que par l’avocat général.

 

En conséquence, au vu de cette jurisprudence, le plaideur sera bien avisé de s’interroger sur son choix initial de former uniquement un appel incident, celui-ci dépendant de l’absence de caducité de l’appel principal.

Un second appel principal, formé par la partie intimée, sera de nature à éviter de voir la procédure d’appel se dérober sous ses pieds.

Mais que de lourdeurs procédurales alors qu’il suffisait seulement, pour les éviter, de retenir comme valide l’appel incident formé dans le délai pour agir à titre principal.

 

 

Maître Alexis Devauchelle

Avocat au Barreau d’Orléans

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