Cour de cassation

chambre civile 3

Audience publique du mardi 28 janvier 2014

N° de pourvoi: 13-10.3479

Non publié au bulletin Rejet

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant souverainement retenu que l'analyse par la professionnelle spécialisée qu'était la société CCR de l'étude de sol réalisée le 18 avril 2008, ne pouvait que la convaincre que l'exécution des fondations spéciales était incontournable, qu'elle savait que les travaux réalisés par la communauté de commune s'avéraient dépourvus d'incidence sur la nécessité de prévoir un surcoût de 50 000 euros pour ces fondations, et que le 18 juillet 2008 elle avait soumis un contrat muet sur l'éventualité de ce surcoût, ce qui, en considération du soin apporté à viser l'étude de sol comme les travaux de la communauté de commune, était de nature à susciter la confiance de la société Home placard et de la déterminer à contracter sans avoir les moyens de déceler la réticence commise par la société CCR sous couvert d'une apparente exécution complète de son devoir d'information et que sans cette réticence la société Home placard n'aurait pas contracté, la cour d'appel a pu en déduire que le caractère dolosif de cette réticence étant suffisamment caractérisé il y avait lieu de prononcer la nullité du contrat ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Compagnie des contractants régionaux aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Compagnie des contractants régionaux à payer à la société Home placard la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Compagnie des contractants régionaux ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie des contractants régionaux

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du contrat conclu par l'exposante et la Société HOME PLACARD le 18 juillet pour cause de dol et débouté la Société CCR de toutes ses prétentions ;

AUX MOTIFS QUE « la Société CCR est fondée à relever une contradiction de motifs dans le jugement en ce que le premier juge d'une part pour exclure le dol a décrit les données contractuelles qui faisaient ressortit que celle-là avait loyalement fourni à sa cocontractante tous les conseils et informations utiles pour éclairer sa décision de s'engager, mais en ce que de deuxième part pour retenir que la résiliation était justifiée, il lui fait grief de ne pas avoir introduit dans le contrat des réserves ou une condition suspensive afférente à l'état du sol ; que cependant l'appelante en déduit à tort qu'elle devait prospérer en ses prétentions ; qu'en effet la SARL HOME PLACARD, appelante incidente, fait avec pertinence valoir qu'elle établit suffisamment que la professionnelle très spécialisée en matière de construction qu'était la SAS CCR ¿et cette dernière souligne elle-même sa compétence tant dans ses écritures en se présentant comme "le premier réseau national de contractant général" que dans les conditions générales de son contrat où elle présente "une équipe aux compétences multiples" ayant notamment un directeur technique et des partenaires dans toutes les spécialités de la construction¿ alors qu'elle-même était profane en ce domaine, a usé, en vue de la convaincre de contracter avec elle, de cette disparité de compétences et de manoeuvres dolosives, constituées par la fourniture d'informations très complètes mais en pratiquant simultanément une réticence dolosive afférente à la nécessité, qu'elle avait pu mesurer dès la première étude de sol, d'exécuter des fondations spéciales et donc de placer irréductiblement le maître d'ouvrage devant la contrainte de supporter un supplément de prix conséquent ; qu'ainsi que l'admet du reste la SARL HOME PLACARD, et comme l'a décrit le premier juge, il est exact que la question de la qualité du sol et de la nécessité éventuelle de devoir recourir à des fondations spéciales et coûteuses, avait été incluse dans la négociation contractuelle, le maître d'ouvrage qui connaissait les limites de financement que lui imposait son crédit-bailleur ALSABAIL s'étant à ce titre montré très prudent en ayant souligné dans ses courriers émis à destination de la SAS CCR -le 17 Décembre 2007 et le 3 Janvier 2008- qu'il ne souhaitait s'engager que sur un prix définitif et après réalisation d'une étude de sol ; que celle-ci sera exécutée le 18 avril 2008 ¿ et désormais il apparaît des éléments que la procédure a révélé à la SARL HOME PLACARD ¿ qu'ainsi que l'observe cette dernière, l'analyse de ce document, par la professionnelle spécialisée qu'était la SAS CCR ne pouvait d'ores et déjà que convaincre celle-ci que l'exécution des fondations spéciales, et donc le surcoût qui en résulterait s'avèreraient incontournables ; qu'en particulier la SARL HYDROGEOTECHNIQUE EST assoit ses conclusions sur les critères géologiques et hydrologiques, sans émettre une modification possible consécutivement aux travaux que devait réaliser la Communauté de Commune et du reste, le second rapport établi le 09 Février 2009 à nouveau par la SARL HYDROGEOTECHNIQUE, à la requête de la SAS CCR, avec une mission identique (G12) concluait exactement dans le même sens ;que s'il est toujours constant qu'avait été prise en compte dans la sphère contractuelle les travaux susvisés que devait exécuter la Communauté de Commune, en considération des motifs qui précèdent afférents à l'étude de sol, mais de plus fort, du fait que ceux-ci étaient achevés avant la signature du contrat et que cette collectivité territoriale avait communiqué des informations à la SAS CCR, cette dernière savait qu'ils s'avéraient dépourvus d'incidence sur la nécessité d'ores et déjà avérée de prévoir un surcoût d'environ 50.000 ¿ pour les fondations spéciales ; qu'ainsi le Tribunal s'est mépris en affirmant qu'au jour de la signature du contrat la Communauté de Commune n'avait pas achevé les travaux, alors qu'est produite aux débats la déclaration d'achèvement de ceux-ci datée du 15 Juillet 2008 mais avec effet au 10 Juillet 2008, les seuls travaux indiqués comme non encore réalisés n'étant que l'éclairage, l'enrobé sur les trottoirs et la couche de roulement sur les voiries, de sorte que rien ne permet d'affirmer comme croît pouvoir le faire l'appelante que demeuraient à effectuer des terrassements susceptibles d'avoir une incidence sur les caractéristiques géologiques et hydrologiques du sol devant supporter l'ouvrage ; que la SAS CCR, de plus fort en sa qualité de professionnelle ne peut sérieusement soutenir qu'elle aurait ignoré ces faits ¿ alors qu'il lui incombait en tout état de cause de se renseigner sur cette situation dès lors qu'elle entendait contractuellement mettre à la charge du maître d'ouvrage profane l'obligation de lui justifier des essais pratiqués par la Communauté de Commune, et que surtout dans un message électronique du 29 Avril 2009 M. X... Directeur Général de la Collectivité locale précitée expose que dès le début du projet de construction de la SARL HOME PLACARD ils ont eu des échanges constants avec celle-ci ainsi qu'avec les constructeurs, à savoir le maître d'oeuvre (qui était désigné par la SAS CCR), la Société HYDROGEOTECHNIQUE et la SAS CCR à laquelle ont été transmis les essais de portance ainsi que toutes informations techniques afférentes aux remblais ; que néanmoins dès le 18 Juillet 2008 la SAS CCR soumettait un contrat muet sur l'éventualité d'un surcoût que pourrait imposer la nécessité de fondations spéciales ¿en dehors d'une clause de style sur la possible adaptation du projet¿ qui en considération de tout ce qui avait précédé, dont l'analyse a été faite ciavant, ainsi que du soin apporté à viser l'étude de sol comme les travaux de la Communauté de Commune, était d'une part de nature à susciter la confiance de la SARL HOME PLACARD et donc de la déterminer à contracter sans avoir les moyens de déceler la réticence dolosive commise par la SAS CCR sous couvert d'une apparente exécution complète de son devoir d'information ; que cette réticence a perduré avec la présentation des demandes de permis de construire dès le 05 Août et 04 Septembre 2008, celui-ci ayant été accordé le 28 Janvier 2009 ; que ce n'est que le 19 Février 2009 ¿ alors que la SARL HOME PLACARD se trouvait définitivement engagée ¿ que la SAS CCR fera connaître à sa cocontractante profane, ce qu'elle-même savait avec certitude depuis la remise de la première étude de sol en sa qualité de professionnelle, que l'exécution de fondations spéciales pour un coût supplémentaire de 47.250,50 ¿ HT se trouvait indispensable ; que sans cette réticence dolosive, la SAS HOME PLACARD à laquelle ALSABAIL, ainsi que cela apparaît du contrat, n'aurait pas consenti de financement de ce chef, n'aurait pas contracté ; que le dol allégué par la SARL HOME PLACARD s'avère ainsi suffisamment caractérisé sans qu'il y ait même lieu de prendre en compte la prévision par contrat distinct de l'assurance Dommage-Ouvrage ; que consécutivement, en infirmant le jugement attaqué, il y a lieu de prononcer la nullité du contrat du 18 Juillet 2008 et de débouter la SAS CCR de l'ensemble de ses prétentions »

ALORS QUE 1°) la réticence dolosive suppose la démonstration de la dissimulation d'un fait par une partie dont il avait connaissance et qui aurait empêché l'autre partie, s'il l'avait connu, de contracter aux conditions prévues ; qu'il est constant que, d'une part, la Société CCR avait parfaitement informé la Société HOME PLACARD de la question posée tenant à la nécessité de fondations spéciales en l'absence de travaux de confortement du terrain (arrêt d'appel, p. 4, alinéa 1), que, d'autre part, le contrat lui-même donnait les informations suffisantes pour vérifier si des fondations spécifiques étaient ou non nécessaires en précisant les caractéristiques requises du terrain (art. 5) et en renvoyant expressément « à la demande du maître d'ouvrage » à la COMMUNAUTE DE COMMUNE la réalisation des essais de la plate-forme bâtiment (art. 1) ; que la Société HOME PLACARD se trouvait utilement renseignée avant la conclusion du contrat et disposait en toute hypothèse de l'ensemble des éléments pour se renseigner le cas échéant ; qu'il ne pouvait être reproché à la Société CCR une réticence dolosive ; qu'en statuant en sens contraire en disant que la Société HOME PLACARD a signé le contrat du 18 juillet 2008 « sans avoir les moyens de déceler la réticence dolosive commise par la SAS CCR sous couvert d'une apparente exécution complète de son devoir d'information », la Cour d'appel a violé ensemble les articles 1116 et 1134 du Code civil ;

ALORS QUE 2°) il appartient au maître d'ouvrage, lui-même professionnel, dûment informé de certains impératifs contractuels, de prendre les mesures nécessaires à la bonne exécution du contrat par le constructeur ; qu'en l'espèce il est constant que d'une part, la Société CCR avait parfaitement informé la Société HOME PLACARD de la question posée tenant à la nécessité de fondations spéciales en l'absence de travaux de confortement du terrain (arrêt d'appel, p. 4, alinéa 1), que, d'autre part, le contrat lui-même donnait les informations suffisantes pour vérifier si des fondations spécifiques étaient ou non nécessaires en précisant les caractéristiques requises du terrain (art. 5) et en renvoyant expressément « à la demande du maître d'ouvrage » à la COMMUNAUTE DE COMMUNE la réalisation des essais de la plate-forme bâtiment (art. 1) ; que la Société HOME PLACARD se trouvait utilement renseignée avant la conclusion du contrat et disposait en toute hypothèse de l'ensemble des éléments pour se renseigner le cas échéant ; qu'il appartenait donc à la Société HOME PACARD de mettre en oeuvre les mesures nécessaires à l'exécution du contrat par la Société CCR ; qu'en disant le contraire pour retenir qu'il y avait réticence dolosive de la part de la Société CCR, la Cour d'appel a violé ensemble les articles 1116 et 1134 du Code civil.