La règle est que l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée à l'insu de l'auteur des propos invoqués est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue.

Dans cette affaire du 16 mars 2011, la Cour de cassation valide la position des juges qui ont écarté la pièce produite par un employeur contenant le témoignage d'un tiers à l'entreprise ayant entendu à l'insu du salarié une conversation téléphonique entre ce salarié et son interlocuteur.

Dans cette affaire, l'employeur (une banque) avait reproché à son salarié d'avoir abusé de ses fonctions pour solliciter et obtenir des avantages ou des cadeaux de clients, en l'espèce une récompense pour être intervenu dans le partage des capitaux d'une assurance clôturée à la suite du décès du souscripteur. Pour ces faits, il avait été licencié pour faute grave.

Pour prouver cette faute, l'employeur s'appuyait sur le témoignage d'inspecteurs de la banque qui avaient écouté sur haut-parleur la conversation entre le salarié et son interlocutrice sans toutefois que le salarié ait été avisé du fait que la conversation était écoutée.

Ainsi, s'agissant d'un témoignage d'un tiers à l'entreprise qui retranscrivait une conversation privée et écoutée à l'insu du salarié, ce moyen de preuve a été écarté. Les règles concernant la loyauté de la preuve s'appliquent aussi au salarié. Ainsi, l'enregistrement d'une conversation téléphonique avec un représentant de l'entreprise effectuée par un salarié à l'insu de son correspondant est un procédé déloyal et la preuve ainsi obtenue est irrecevable en justice (Soc. 29 janvier 2008).

Opérant une subtile distinction, si la Cour de cassation considère que l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectué à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n'en est pas de même de l'utilisation par le destinataire des messages écrits téléphoniquement adressés, dits SMS, dont l'auteur ne peut ignorer qu'ils sont enregistrés par l'appareil récepteur [Soc., 23 mai 2007, n° 06-43.209].

Cette solution s'applique aux salariés comme à l'employeur : il a ainsi été jugé qu'une salariée, qui se prétendait victime de harcèlement sexuel, ne pouvait produire en justice la transcription de conversations téléphoniques privées qu'elle avait eues avec son « harceleur », mais qu'elle pouvait verser aux débats les SMS que lui avait adressés cette personne (arrêt du 23 mai 2007).

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

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Soc. 16 mars 2011, n° 09-43204