Selon l'article L1332-4 du Code du travail, « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance (...) ». La prescription est donc de deux mois, pas un jour de plus. Et l'employeur qui se risque à licencier pour une faute commise il y a plus de deux mois au moment où il engage la procédure devra impérativement prouver qu'il n'a pas eu connaissance immédiatement des faits pour tenter de faire courir ce délai de deux mois à une autre date que celle de la commission des faits reprochés.

Dans son arrêt du 6 octobre 2010, la Cour de cassation apporte une précision non négligeable en terme de temps de réaction de l'employeur. Tout en rappelant qu'un fait fautif se prescrit par deux mois, la haute juridiction exige que la procédure soit mise en oeuvre dans un délai restreint, ceci pour la simple et bonne raison que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

En quelque sorte donc, même dans le délai de 2 mois, l'employeur doit réagir deux mois pour opposer sérieusement la faute grave au salarié.

Dans cette affaire, les griefs invoqués dans la lettre de licenciement dataient du 15 et 22 décembre 2006 et la convocation à l'entretien préalable était du 31 janvier 2007.

Le salarié reprochait à l'employeur d'avoir tardivement réagi, ce qui l'empêchait, selon lui, d'invoquer la faute grave puisqu'il avait été considéré de fait que son maintien dans l'entreprise n'avait pas été rendu impossible. En réponse, l'employeur indiquait que les faits étaient non prescrits au moment de l'engagement de la procédure et qu'ainsi, il pouvait librement invoquer la faute grave.

La Cour de cassation énonce sous forme de principe que la « faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la mise en oeuvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits allégués, dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire ».

Autrement dit, l'employeur peut différer la rupture du contrat de travail (ou le prononcé de la sanction, s'il choisit d'infliger une simple sanction disciplinaire) pendant le temps qui lui est nécessaire pour procéder à ces vérifications. Ce délai supplémentaire ne saurait le priver par la suite du droit d'invoquer la faute grave.

En revanche, si aucune vérification n'a lieu d'être, la condition liée au délai restreint retrouve sa pleine efficacité et l'employeur se droit de réagir rapidement.

La Cour de cassation renvoie donc cette affaire aux juges du fond à qui il appartient dorénavant de vérifier si la procédure a été mise en oeuvre dans les délais requis.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

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Cass. soc., 6 octobre 2010, n° 09-41.294