Le droit du travail encadre de manière stricte les contrats à durée déterminée (CDD), notamment en ce qui concerne les points suivants :

- les motifs de recours ;

- la durée des contrats (à date précise ou non) ;

- les possibilités de renouvellement et de succession ;

Concernant l'hypothèse où plusieurs CDD se succèdent, certaines règles doivent être respectées, à défaut de quoi les différents contrats seront requalifiés en contrat à durée indéterminée (CDI). C'est ainsi qu'un employeur ne peut conclure des CDD successifs sans interruption avec le même salarié que dans les cas suivants (Code du travail, art. L. 1244-1) :

- remplacement d'un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu ;

- emploi à caractère saisonnier ou pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée ;

- remplacement du chef d'entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, ou du chef d'une exploitation agricole.

Dans tous les autres cas, la conclusion d'un nouveau CDD avec le même salarié n'est possible qu'en respectant un délai de carence correspondant à :

- 1/3 de la durée initiale du contrat, lorsque celle-ci est supérieure ou égale à 14 jours ;

- la moitié de cette durée si le contrat initial ne dépasse pas 13 jours.

Dans ces conditions, si le même salarié est successivement embauché en CDD pour des motifs différents qui ne permettent pas la succession sans interruption (voir ci dessus), un délai de carence doit impérativement être respecté.

Dans cette affaire, une assistante commerciale a enchaîné 5 CDD sur une durée totale de 8 mois, sans interruption : les premier, troisième et cinquième contrats pour un accroissement temporaire d'activité,

les deuxième et quatrième pour le remplacement de salariées absentes.

Or, l'accroissement temporaire d'activité ne permet pas la succession de CDD sans délai de carence. Tous ces contrats ne pouvaient donc pas se succéder de cette manière et ils ont été requalifiés en CDI.

Du fait de cette requalification en contrat à durée indéterminée, la rupture du contrat a été jugée abusive avec octroi au salarié de dommages et intérêts.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

03.80.48.65.00

Soc. 3 juin 2009 pourvoi n° 08-40517

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Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du mercredi 3 juin 2009

N° de pourvoi: 08-40517

Non publié au bulletin Cassation

Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président

SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... est entrée au service de la société Supplay le 9 mai 2005 ; qu'elle a été employée en qualité d'assistante commerciale jusqu'au 30 décembre 2005 dans le cadre de cinq contrats à durée déterminée successifs, le premier, le troisième et le cinquième pour un accroissement temporaire d'activité , le deuxième et le quatrième pour le remplacement de salariées absentes ; qu'elle a ensuite été engagée dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2006 en qualité d'assistante commerciale, avec une période d'essai de deux mois ; que dès le 12 janvier 2006, la société Supplay l'informait de la rupture immédiate du contrat pendant la période d'essai ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à la requalification de ses contrats à durée déterminée successifs en un contrat à durée indéterminée et au paiement de sommes à titre d'indemnités pour inobservation de la procédure de licenciement et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 122-3-10, alinéa 2, devenu L. 1244-1 du code du travail ;

Attendu qu'en application de ce texte, l'employeur ne peut conclure avec le même salarié des contrats à durée déterminée successifs que dans quatre hypothèses : pour remplacer des salariés absents, pour des emplois saisonniers ou pour des emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir aux contrats à durée indéterminée, pour remplacer l'une des personnes mentionnées aux 4° et 5° de l'article L. 1242-2 du code du travail ;

Attendu que pour dire qu'il n'y avait pas lieu à requalification et débouter la salariée de ses demandes, la cour d'appel a retenu qu'il n'était pas imposé de délai de carence lorsque le contrat à durée déterminée était renouvelé au profit d'un même salarié sur un autre poste, ce qui était le cas en l'occurrence, Mme X... ayant été embauchée alternativement pour un surcroît d'activité et pour remplacer des salariés en congés d'été ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que les parties avaient conclu successivement des contrats à durée déterminée pour assurer le remplacement de salariés absents puis des contrats pour un surcroît d'activité lesquels ne rentraient pas dans le champ d'application de l'article L. 122-3-10, alinéa 2, devenu L. 1244-1 du code du travail, ce dont il en résultait que les différents contrats à durée déterminée conclus successivement avec la salariée devaient être requalifiés en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne la société Supplay aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille neuf.