Signalons ici une confirmation de jurisprudence en matière d'inaptitude médicale et donc de licenciement (cour de cassation, chambre sociale 4 juin 2009).

Lorsque le médecin du travail conclut à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'établissement ou l'entreprise (à l'issue de deux visites, ou une seule en cas de danger immédiat), l'employeur est néanmoins tenu de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient.

A cette occastion, l'entreprise ne doit pas exclure les reclassements supposant une mutation, la transformation du poste de travail ou l'aménagement du temps de travail.

Cette règle est impérative et le seul fait que le médecin du travail déclare le salarié inapte à tout poste au sein de l'entreprise ne dispense pas pour autant l'employeur à tenter de reclasser son salarié avant d'enclencher le licenciement. Ce n'est que dans l'hypothèse d'une impossibilité de reclassement qu'il pourra être procédé au licenciement.

En cas de manquement, le licenciement est tout bonnement sans cause réelle et sérieuse, ce qui signifie que le salarié est en droit d'obtenir des dommages et intérêts au titre du préjudice subi qui dépend essentiellement de son ancienneté.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

03.80.48.65.00

Soc. 4 juin 2009 n° 07-45231

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Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du jeudi 4 juin 2009

N° de pourvoi: 07-45231

Non publié au bulletin Rejet

M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Roger et Sevaux, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 septembre 2007), que Mme X... a été engagée en qualité d'agent de fabrication à compter du 7 février 1989 par la société Lestra ; qu'elle a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle, a été déclarée inapte à son poste de travail à l'issue de la seconde visite de reprise ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude le 25 octobre 2005 ; qu'estimant que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamné à verser à la salariée diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ que l'absence de poste disponible conforme aux restrictions posées par le médecin du travail établit l'impossibilité du reclassement du salarié inapte ; qu'en l'espèce, la société soulignait qu'il résultait du registre d'entrées et sorties du personnel, versé aux débats, qu'à l'époque du licenciement, seuls avaient été pourvus des postes d'agent de fabrication, pour lesquels la salariée avait été déclarée inapte, et indiquait notamment qu'aucun poste de type commercial ou administratif n'était disponible ; qu'en retenant que la soumission au médecin du travail d'une proposition de poste aménagé que ce dernier a jugé inapproprié au mal dont souffrait la salariée ne saurait suffire à établir que la société a effectivement cherché un reclassement sur l'ensemble de l'entreprise, dès lors d'une part qu'elle dispose d'un autre établissement que celui où exerçait la salariée, et d'autre part qu'elle ne rapporte pas la preuve qu'elle était dans l'impossibilité de procéder à un reclassement dans un poste administratif ou de maintenance, sans viser ni examiner le registre du personnel et sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'il n'établissait pas l'absence dans l'entreprise de tout poste disponible autre que celui auquel la salariée avait été déclarée inapte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.122-32-5 et L. 122-32-7 du code du travail ;

2°/ que parmi les emplois disponibles, l'employeur ne doit proposer que ceux correspondant aux compétences professionnelles du salarié déclaré inapte, le cas échéant après une formation d'adaptation ; qu'en revanche il n'est pas tenu de lui proposer les postes supposant une formation initiale ou de longue durée ; qu'en l'espèce, l'employeur rappelait précisément qu'il n'était pas tenu de proposer les postes invoqués par la salariée dès lors qu'ils nécessitaient la mise en oeuvre d'une formation initiale ou de longue durée ; qu'en affirmant que la société ne rapportait pas la preuve qu'elle était dans l'impossibilité de procéder à un reclassement dans un poste administratif ou de maintenance, sans vérifier que la salariée pouvait occuper de tels postes sans recevoir une formation initiale ou de longue durée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-32-5 et L. 122-32-7 du code du travail ;

Mais attendu que l'avis du médecin du travail déclarant inapte un salarié à tout emploi dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; que la cour d'appel, analysant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que l'employeur n'avait proposé qu'un aménagement de poste incompatible avec l'affection dont souffrait la salariée et qu'il ne justifiait d'aucune autre recherche de reclassement au sein de l'entreprise ou au sein du groupe, dans un poste administratif ou de maintenance ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu décider que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Lestra aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Lestra à payer à Mme X... la somme de 150 euros ;

Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Lestra à payer à la SCP Roger et Sevaux la somme de 2 350 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille neuf.