Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 13 novembre 2013
N° de pourvoi: 12-26.121
Non publié au bulletin Cassation partielle
Sur le moyen unique :
Vu les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Attendu que chaque copropriétaire use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires, ni à la destination de l'immeuble ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mai 2012) que M. X..., propriétaire de deux lots à usage de boutiques dans un immeuble en copropriété, a donné à bail ces locaux à la société Subito Pizza à usage de restauration, pizzeria, vente à emporter, livraison à domicile et terminal de cuisson ; qu'à la suite de plaintes de copropriétaires à raison de nuisances générées par ce commerce, le syndicat des copropriétaires a assigné M. X... et la société Subito Pizza en cessation, sous astreinte, de l'activité de cette dernière ;
Attendu que pour refuser d'ordonner cette cessation, l'arrêt retient que l'activité de restauration n'est pas exclue par le règlement de copropriété, et que le syndicat des copropriétaires refusant toute mesure adéquate destinée à faire cesser les inconvénients liés à une activité non prohibée par le règlement de copropriété, il y a lieu de recourir à une mesure d'expertise afin d'examiner les inconvénients et nuisances allégués et proposer les solutions techniques de nature à y remédier tout en permettant la poursuite de l'activité ;
Qu'en statuant ainsi, tout en constatant l'existence de nuisances olfactives liées à l'activité de la société Subito Pizza et alors que le règlement de copropriété excluait formellement les établissements générant ce type de nuisances, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a autorisé la poursuite de l'activité de la société Subito Pizza et ordonné une expertise, l'arrêt rendu entre les parties le 30 mai 2012 par la cour d'appel de Paris, remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... et la société Subito Pizza aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. X... et de la société Subito Pizza, les condamne in solidum à payer au syndicat des copropriétaires du 162-166 rue de Chevilly à Villejuif la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires 162-166 rue de Chevilly, Villejuif.
IL EST REPROCHE à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que l'activité de restauration, pizzeria, vente à emporter, livraison à domicile n'est pas prohibée par le règlement de copropriété de l'immeuble sis 162-166 rue de CHEVILLY à Villejuif ;
AUX MOTIFS QUE « sur les activités de la société SUBITO PIZZA ; Vu l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965, en l'espèce, le règlement de copropriété, dans son article 4-II-2°, stipule notamment : « ...sont formellement exclus : tous établissements dangereux, bruyants ou insalubres, de nature à incommoder par le bruit ou l'odeur les personnes habitant la maison » ; que le règlement de copropriété, par cette clause ou par toute autre, n'interdit pas l'activité de restauration, cette activité ne constituant pas un établissement dangereux, bruyant ou insalubre, étant observé que par l'existence de deux boutiques mentionnées dans l'état descriptif de division et la configuration des lieux avec avancée desdites boutiques par rapport aux habitations, la destination de l'immeuble est mixte ; que M. X... ne peut pas valablement soutenir que la clause précitée ne concernerait que les locaux affectés à l'habitation et occupés à titre professionnel, comme les autres paragraphes de l'article 4-II-2°, et non les boutiques alors que la généralité de la formule « sont formellement exclus » s'applique nécessairement à tous les lots incluant les boutiques du rez-dechaussée ; que le syndicat des copropriétaires ne peut pas valablement soutenir que, par application de la clause précitée, l'activité de la société SUBITO PIZZA serait interdite au motif qu'elle aurait été dès l'origine susceptible de causer des nuisances en l'absence notamment d'un conduit d'extraction des fumées conforme alors que le règlement de copropriété n'interdisant pas les activités de restauration, il ne peut être opposé que l'interdiction résulterait des modalités d'exercice de l'activité, celle-ci relevant non de la destination de l'immeuble mais, le cas échéant d'un trouble anormal de voisinage, étant observé que l'autorisation demandée par M. X... pour améliorer l'évacuation des odeurs lui a été refusée par l'assemblée générale ; ce moyen ne peut donc prospérer ; que le syndicat des copropriétaires ne peut pas non plus valablement soutenir que lorsqu'un lot est à usage de boutique on ne pourrait y exercer qu'une activité commerciale à l'exclusion de toute activité de stockage ou activité de transformation telle que l'activité de restauration alors que la désignation de locaux comme « boutiques » dans l'état descriptif de division ne peut être interprétée comme excluant les commerces de restauration, étant observé que l'état descriptif de division n'a pas de caractère contractuel ; ce moyen ne peut donc prospérer ; qu'il résulte de ce qui précède que l'activité de restauration n'est pas exclue par le règlement de copropriété et que M. X... pouvait donc consentir sur ses lots de boutiques un bail pour l'exploitation d'un commerce de restauration, pizzeria, vente à emporter, livraison à domicile et terminal de cuisson ; que le syndicat des copropriétaires ne peut pas valablement faire état, au soutien de sa demande de cessation de l'activité de la société SUBITO PIZZA, de nuisances olfactives qui seraient générées par la non-conformité du système d'extraction des fumées, de nuisances sonores liées à la fermeture tardive de l'établissement ainsi que de stationnements gênants devant l'entrée de la copropriété par la clientèle venant acheter des pizzas à emporter alors qu'il ressort des pièces versées aux débats et des écritures du syndicat que ce dernier a refusé à M. X... l'autorisation d'installer une tourelle d'extraction pour favoriser l'évacuation des fumées de nature à mettre un terme aux nuisances olfactives qu'il allègue, de même qu'il a refusé la proposition de la société SUBITO PIZZA de réorganiser l'accès de son établissement afin de diminuer les nuisances sonores pouvant émaner de sa clientèle dont il se plaint ; que dans ces conditions, la demande du syndicat, qui s'oppose à toute mesure adéquate destinée à faire cesser les inconvénients éventuels liés à une activité non prohibée par le règlement de copropriété, ne peut pas prospérer en l'état » ;
1°) ALORS QU'en présence du règlement de copropriété stipulant notamment : « ...sont formellement exclus : tous établissements dangereux, bruyants ou insalubres, de nature à incommoder par le bruit ou l'odeur les personnes habitant la maison » (règlement p.42, paragraphe 5), la Cour d'appel qui a rejeté l'action du Syndicat intentée à la suite de la plainte des copropriétaires dénonçant des nuisances olfactives et sonores, action tendant à voir ordonner la cessation de l'activité de restauration pizzeria, vente à emporter, terminal de cuisson exploitée dans les lots appartenant à Monsieur X..., pour la raison que l'activité de restauration ne constituait pas un établissement dangereux, bruyant ou insalubre et que le syndicat s'était opposé à toute mesure de nature à diminuer les nuisances dont il se plaint, a statué par voie de dénaturation du règlement de copropriété en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2°/ ALORS QU'en présence d'une clause du règlement de copropriété interdisant l'exercice d'un commerce générant des nuisances olfactives ou sonores, l'assemblée générale des copropriétaires n'a aucune obligation, pour rendre cette activité conforme au règlement, d'autoriser des travaux de nature à remédier à ces nuisances ; que, sauf s'il est allégué et démontré que son refus procède d'un abus, l'activité en cause est nécessairement interdite, sans que le copropriétaire qui prétend l'exercer puisse se retrancher derrière la théorie des troubles anormaux de voisinage ; en sorte que l'arrêt attaqué qui, après avoir constaté que l'activité que prétendait exercer Monsieur X... était susceptible de générer des nuisances sonores et olfactives, juge néanmoins que cette activité n'est pas prohibée par le règlement de copropriété qui interdisait « tous établissements dangereux, bruyants ou insalubres de nature à incommoder par le bruit ou l'odeur les personnes habitant la maison », au motif que ces nuisances intéressaient simplement les modalités d'exercice de l'activité en cause, ce qui relevait le cas échéant des troubles anormaux de voisinage, et que des travaux de nature à améliorer l'évacuation des odeurs pouvaient être réalisés sur autorisation de l'assemblée générale, s'est déterminée par des motifs radicalement inopérants et a violé ensemble l'article 1134 du Code civil, les articles 9, 25 et 26 de la loi du 10 juillet 1965.
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