Cet arrêt est commenté par :
- Mme LE GALLOU, Revue LAMY « DROIT CIVIL », octobre 2013, p. 15.
- M. HOUTCIEFF, Gaz. Pal., 2013, n° 282, p. 15.
- Mme KAN-BALIVET, Revue trimestrielle de droit immobilier (RTDI), 2013, n° 4, p. 61.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 26 juin 2013
N° de pourvoi: 12-20.934
Publié au bulletin Rejet
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 mars 2012), que la société civile immobilière AMCO (la SCI), qui avait acquis un immeuble constitué notamment d'un lot n° 2 se composant d'un bâtiment à usage de garage, a vendu ce lot aux époux X... après avoir effectué des travaux consistant en la création d'un studio au premier étage ; que, soutenant que le notaire avait omis de procéder, avant de recevoir l'acte de vente, à la division du lot n° 2 et à la création de trois nouveaux lots, les lots n° 3 et 4 consistant en deux garages et le lot n° 5 en l'appartement du premier étage et après avoir fait établir un procès-verbal de constat le 9 septembre 2002 établissant que les époux X... avaient transformé les deux garages en locaux à usage d'habitation, la SCI les a assignés le 29 avril 2009 en nullité partielle de la vente pour erreur sur la substance et en expulsion des garages ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut méconnaître les termes du litige, tels qu'ils sont fixés par les conclusions respectives des parties, qui formulent leurs prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels celles-ci sont fondées ; que dans ses conclusions d'appel, la SCI, visant l'article 1583 du code civil et invoquant l'erreur qu'elle a commise sur l'objet même de la vente, qui ne comprenait que le studio et non les deux garages, contrairement à ce qui pouvait résulter de la désignation erronée du bien vendu dans l'acte de vente, concluait à son absence de consentement et en conséquence à l'inexistence de la vente, en ce qu'elle portait sur ces deux garages, mais à sa validité en ce qui concerne le seul studio ; qu'ainsi l'action n'était pas exclusivement fondée sur l'article 1110 du code civil et ne tendait pas qu'à faire constater l'erreur mais tendait à faire constater l'inexistence partielle de la vente ; que l'arrêt attaqué a ainsi dénaturé les termes du litige et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ que la prescription d'un acte auquel fait défaut l'un de ses éléments essentiels est la prescription de droit commun, portée de trente ans à cinq ans par la loi du 17 juin 2008 qui s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de son entrée en vigueur ; qu'est soumise à cette prescription l'action en nullité pour erreur quand celle-ci, portant sur l'objet même de la vente, a fait obstacle à la rencontre des consentements ; que dès lors seule cette prescription était applicable à l'action de la SCI qui tendait à voir constater que la vente qui n'avait porté que sur le studio était inexistante concernant les deux garages ; que l'arrêt attaqué a ainsi violé les articles 2262 ancien et 2224 du code civil ainsi que par fausse application l'article 1304 du même code ;
3°/ que le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des actes qui lui sont soumis ; que la SCI avait produit aux débats deux lettres du notaire, en date respectivement du 19 juillet 2002 et du 11 mars 2008, adressées aux époux X... et dans lesquelles M. Y..., après avoir rappelé qu'il leur avait été vendu « un studio au premier étage accessible par l'escalier prenant naissance au rez-de-chaussée comprenant : séjour, coin cuisine, salle de bains avec WC », leur indiquait que l'acte d'acquisition "mentionne la vente du lot numéro 2 du règlement de copropriété. Et que par suite d'une erreur matérielle, il n'a pas été procédé préalablement à ladite vente, à la division de ce lot en 3 nouveaux lots devant comprendre : au rez-de-chaussée : 2 garages, lots numéros 3 et 4 ; - et au premier étage : le studio, lot numéro 5 faisant l'objet de votre propriété." ; que le notaire précisait ensuite qu' "à ce jour, il est donc impératif de régulariser cette situation par la rédaction de deux actes : l'un s'appliquant à la constatation du lot numéro 2 et l'autre à l'acte rectificatif de désignation concernant les biens vendus" avant de leur demander, dans la lettre du 19 juillet 2002, de confirmer leur accord pour cette modification en lui en retournant un exemplaire revêtu de leur signature, et dans la lettre du 11 mars 2008, en leur fixant un rendez-vous au lundi 31 mars suivant ; que dans son attestation en date du 10 avril 2008, le notaire faisait explicitement référence à la lettre du 11 mars 2008 ; qu'en affirmant cependant que « le notaire n'a pas reconnu avoir oublié de procéder à la division avant la vente, mais qu'il a seulement attesté le 10 avril 2008 avoir proposé un rendez-vous aux époux X... afin de régulariser deux actes, l'un s'appliquant à la constatation du lot n° 2 et l'autre rectificatif de désignation concernant les biens acquis le 19 novembre 1999 et que ces derniers ne se sont pas présentés, les raisons pour lesquelles il avait envisagé de procéder à la rédaction de ces actes n'étant pas précisées », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des lettres des 19 juillet 2002 et du 11 mars 2008 et violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'erreur invoquée ne portait pas atteinte à l'intérêt général, la cour d'appel, qui n'a pas modifié l'objet du litige, a exactement déduit de ce seul motif que l'action en nullité du contrat était, s'agissant d'une nullité relative, soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI AMCO aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI AMCO à payer aux époux X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la SCI AMCO ;
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